Quant à la triple contemplation de l'unité (isshin sangan), il existe la triple contemplation successive et la triple contemplation non successive. Je ne préciserai cependant pas davantage ce point. Réaliser l’obtention de la triple contemplation de l'unité est appelé, dans le Sutra Kegon* : « les trois mondes sont le cœur/esprit ».
La doctrine d’Ichinen Sanzen, 1258
Ainsi,
comprendre que le Sutra du Lotus est le roi et le plus élevé
de tous les sutras, c'est avoir une compréhension correcte de
l'enseignement. Pourtant Fa-yun,
du temple Guangzhe-si, et Hui-guan,
du temple Daochang-si, ont
prétendu que le Sutra
du Nirvana était supérieur au Sutra du Lotus. Cheng-guan du Mont Qingliang et Kukai* du Mont Koya proclamèrent
que le Sutra Kegon* et le Sutra Vairocana étaient supérieurs au Sutra du Lotus. Qi-Zang, du temple Jia-xiang-si,
et le moine Kui-ji, du temple Cien-si,
ont avancé que les deux sutras Hannya* et Jimmitsu étaient supérieurs au Sutra
du Lotus.
[...] Même les lettrés des Six
Écoles du bouddhisme ancien qui étudiaient
des enseignements du Mahayana comme du Hinayana, tels que
les sutras Kegon,* Hannya, Jimmitsu* et Agama* considéraient le Sutra du Lotus comme l'enseignement
suprême. C'était vrai pour les lettrés des écoles Tendai et Shingon et encore plus vrai pour les laïcs sans connaissance approfondie
du bouddhisme.
L'enseignement,
les capacités, le temps et le pays (Izu,
10 février 1262 ? )
Dans le Sutra Kegon*,
les êtres résidant en enfer sont considérés comme capables de devenir bouddha, mais
cette capacité est déniée aux auditeurs-shravakas et pratyekabuddhas.
[...] Zhiyi* a déclaré : "Ni le Sutra
Kegon* ni le Sutra Daibon ne pouvaient guérir [les maux de ces personnes des deux
véhicules. Seul le Sutra du Lotus pouvait planter
des racines de bonté chez ceux qui n'avaient plus rien à
apprendre (note) et leur rendre accessible la Voie du Bouddha. C'est la raison pour laquelle
on appelle ce sutra Myo, mystique. Les icchantika [personnes d'une incroyance incorrigible] ont néanmoins une conscience,
il leur est donc possible d'atteindre la bodhéité. Mais
les personnes des deux véhicules ont annihilé la conscience, si bien qu'elles ne peuvent plus
faire naître dans leur coeur l'aspiration à l'Éveil. Pourtant,
le Sutra du Lotus peut les guérir et c'est pourquoi
on l'appelle Myo."(réf.) Point n'est
besoin d'expliquer en détail l'importance de ce passage. Il suffit
de comprendre, une fois pour toutes, que même le remède
du Dharma offert par les sutras Kegon*, Hodo* et Daibon ne peut pas
guérir la maladie grave affligeant les personnes dans ces deux
états d'auditeurs-shravakas et pratyekabuddhas.
Questions et
réponses sur la pratique du Sutra du Lotus (Kamakura ? mars 1263 ? à Nichiji ?)
Quoi qu'il en soit, Shakyamuni enseigna
pendant cinquante ans. Au cours des quarante et quelques premières
années, il exposa successivement : le Sutra
Kegon* dans lequel il est dit : "L'esprit, bouddha et tous les êtres
vivants n'appartiennent pas à trois catégories distinctes" ; les sutras Agama*,
énonçant les principes de souffrance, non-substantialité, impermanence,
et non-moi ; le Sutra
Daijuku qui affirme que l'on ne peut dissocier le pur
de l'impur ; le Sutra Daibon
hannya qui énonce les principes d'identification mutuelle
et de non-dualité ; et les sutras Muryoju, Kammuryoju et Amida, qui parlent
de la renaissance sur la Terre
de la béatitude parfaite.
Encouragements
à une personne malade (décembre
1264, à Nanjo Hyoe Shichiro)
L'ignorant s'écria, surpris : "Mais ne sont-ils pas tous
des enseignements sacrés,
exposés par le Bouddha, sa vie durant, pour procurer des bienfaits aux êtres vivants ? Depuis le moment où fut enseigné
le Sutra Kegon*,
en sept lieux et à huit assemblées, jusqu'à la cérémonie
[au cours de laquelle fut exposé le Sutra
du Nirvana] au bord du fleuve Hiranyavati,
toutes les doctrines furent prêchées par le Bouddha Shakyamuni
lui-même. Peut-être est-il possible de distinguer quelques
mérites rendant les unes légèrement supérieures
aux autres, mais comment une seule d'entre elles pourrait-elle être
la cause d'une renaissance dans les mauvaises
voies ? "
[...] Le Grand-maître* du Mont Koya [Kukai*]... produisit un ouvrage
en dix volumes intitulé Jujushin
Ron. Parce que cet ouvrage est si vaste et exhaustif, il en fit
une version abrégée en trois volumes qu'il intitula Hizo
Hoyaku*.
Il y décrit dix stades dans
l'évolution de l'esprit, du premier stade, "l'esprit d'un homme bas,
apparenté aux chèvres par ses désirs"(note),
jusqu'au dernier stade, "l'esprit glorieux, le plus secret et sacré"(note).
Il range le Sutra du Lotus dans le huitième stade, le Sutra Kegon* dans le neuvième, et les enseignements du Shingon [du Sutra Vairocana*] dans le
dixième. Ainsi, il considère même le Sutra du
Lotus inférieur au Sutra
Kegon*,
et le classe deux rangs plus bas que le Sutra
Vairocana. Dans son ouvrage, il écrit : "Chacun des
véhicules enseignés proclame qu'il est le véhicule
conduisant à la bodhéité, mais, lorsqu'on les envisage
du point de vue d'un stade plus avancé (note),
tous ne semblent plus que théories puériles." Il définit
également le Sutra du Lotus comme un ouvrage composé
de "mots sauvages et de phrases fleuries", et dénigre le Bouddha Shakyamuni en le disant égaré au stade de l'obscurité.
[...] Prenez le
temps de réfléchir et écoutez bien ce que je dis ! Dans les cinq ou sept mille volumes de sutra représentant la totalité
des enseignements exposés par le Bouddha de son vivant, ou dans
les trois mille volumes ou plus des écrits confucéens et taoïstes, trouve-t-on, où
que ce soit, un passage établissant clairement que le Sutra
du Lotus est une "théorie puérile" ou qu'il
se place deux rangs en dessous du Sutra Vairocana*, en étant
également inférieur au Sutra
Kegon*,
ou que le Bouddha Shakyamuni est égaré dans le domaine de
l'obscurité et n'est pas même digne de conduire les boeufs
du bouddha Vairocana* ?
[...] Nous lisons, dans le quatrième volume du Sutra
du Lotus : "Yakuo, je te
dirai ceci. Parmi tous les sutras que j'ai exposés, le Sutra
du Lotus occupe la première place."(réf.) Ce passage rappelle que, à l'Assemblée du Pic
du Vautour, le Bouddha s'adressa au bodhisattva Yakuo et lui dit que, depuis le Sutra
Kegon* jusqu'au Sutra du Nirvana,
il y avait eu des sutras aussi nombreux que les grains de sable du Gange,
mais que, parmi tous ces sutras, celui qu'il exposait maintenant, le Sutra
du Lotus, tenait la première place. Mais, apparemment, le Grand-maître*Kukai lut le mot "troisième" à la place du mot "première".
[...]2 Un peu plus
loin, nous lisons : Il est dit que Bodhidharma vint de l'Ouest, et enseigna la "désignation directe de l'esprit
de l'homme" et la manière de "percevoir sa véritable
nature et d'atteindre la bodhéité". Mais ne trouve-t-on
pas les mêmes concepts dans le Sutra
Kegon* et dans les autres sutras du Mahayana ?
[...]2 Bodhidharma arriva en Chine par l'ouest, pointa le doigt directement sur l'esprit
des hommes, et déclara que leur esprit était le Bouddha.
Mais on trouve ce principe déjà énoncé en
plusieurs endroits, dans des sutras
du Mahayana provisoire* antérieurs au Sutra
du Lotus, tels que les sutras Kegon*, Daijuku et Daihannya.
[...]2 Kukai de l'école Shingon, dans
ses écrits affirme que le Sutra du Lotus est inférieur
même au Sutra Kegon*,
et le classe deux rangs en dessous du Sutra Vairocana, le qualifiant de "théorie puérile".
Conversation
entre un sage et un ignorant (1265
? à un samouraï ? )
Si un grenier
regorge de trésors mais que l'on n'en a pas la clef, il est difficile
de l'ouvrir ; et si l'on ne peut l'ouvrir, les trésors qu'il contient
demeurent invisibles. Le Bouddha enseigna le Sutra
Kegon*,
mais il ne donna pas l'explication qui aurait pu servir de clef pour
ouvrir ce sutra. De même, pendant les quarante ans et plus qui
suivirent, il enseigna d'autres sutras tels que les sutras Agama*, Hodo*, Hannya* et Kammuryoju,
mais il ne révéla pas leur sens. Leurs portes restèrent
closes, et par conséquent personne ne parvint à comprendre
ces sutras. Même ceux qui prétendirent les comprendre n'en
eurent, en réalité, que des conceptions déformées.
[...] Quant aux
textes bouddhiques, on lit dans le Sutra
Kegon*,
premier enseignement important exposé par le Bouddha après
son Éveil : "Les femmes sont des messagers de l'enfer, capables
de détruire les graines de la bodhéité. Elles
peuvent prendre l'apparence de bodhisattva, mais, dans leur coeur, elles
sont comme des démons yaksha."
[...] Quand on
lit dans le Sutra Kegon* que les femmes sont "capables de détruire la graine de la
bodhéité", cela veut dire qu'elles dessèchent
et brûlent les graines qui pourraient leur permettre d'atteindre
la bodhéité. Quand des nuages s'amoncellent dans le ciel,
après une période de grande sécheresse et qu'une
forte pluie tombe sur le sol, partout, d'innombrables plantes et arbres
assoiffés vont bourgeonner et donner des fruits. Mais cela n'est
pas vrai des graines que l'on a brûlées. Elles ne germeront
jamais. Au contraire, une pluie abondante les fera pourrir.
[...] Ces passages
expliquent pourquoi des sutras tels que le Daihokobutsu Kegon, le Daijuku,
le Sutra Daibon hannya et le Dai Nehan ont tous le caractère Dai dans leur titre et non le caractère
Myo. C'est parce qu'ils ne peuvent guérir que les vivants et
pas les morts. Tandis que le Sutra du Lotus peut guérir
les morts c'est pourquoi on l'appelle Myo.
Le Daimoku du Sutra
du Lotus (1266
à une femme d'Amatsu)
Le Grand-maître* Zhanlan* déclare : "Je demande à ceux qui ont des yeux
d'examiner cela en profondeur."(réf.) N'est-il pas sans yeux, celui qui prétend que le Sutra
du Lotus est inférieur au Sutra
Kegon* ?
Réponse à
Hoshina Goro Taro (5
décembre 1267 à Hoshina)
Le Sutra du Lotus est le coeur, l'essentiel des enseignements
sacrés exposés par Shakyamuni de son vivant, et la
base des quatre-vingt mille corbeilles.
Le bouddhisme comprend divers sutras, exotériques et ésotériques,
tels que les sutras Vairocana*, Kegon*, Hannya* et Jimmitsu* qui ont été propagés en Chine, en Inde, dans le
palais des Rois-dragons et dans
les cieux. De plus, il y a les enseignements
exposés par tous les bouddhas
des dix directions, aussi nombreux que les grains de sable du Gange.
[...] Néanmoins, parmi les diverses écoles
en Inde et parmi ceux qui se sont intéressés au bouddhisme
au Japon, de nombreux maîtres et fondateurs de doctrine n'ont
pas su comprendre les véritables intentions du Bouddha. Certains
ont dit que le Sutra Vairocana* était
supérieur au Sutra du
Lotus. D'autres ont dit que le Sutra du Lotus était
non seulement inférieur au Sutra
Vairocana*, mais
même inférieur au Sutra
Kegon*,
ou que le Sutra du Lotus était inférieur aux Sutra du Nirvana, Hannya* et Jimmitsu*.
[...] Les Maîtres
de doctrine* surpassent les simples maîtres et les sutras du Mahayana
définitif* est supérieur aux sutras du Mahayana
provisoire*.
Par conséquent le Sutra Vairocana* de l'école Shingon ne
peut pas égaler le Sutra
Kegon*,
et moins encore le Sutra
du Nirvana et le Sutra
du Lotus. Pourtant, lorsque le Savant-maître* Shubhakarasimha* évalua les qualités relatives des sutras Kegon*, Lotus, Vairocana*,
etc., il avança une interprétation erronée en disant
que, d'un point de vue théorique, tous ces sutras sont de même
valeur, mais que, d'un point de vue pratique, le Sutra Vairocana* est supérieur aux autres. Depuis lors, les tenants de cette école
n'ont cessé de prétendre avec arrogance que le Sutra
du Lotus ne soutient pas la comparaison avec le Sutra Kegon*,
et moins encore avec les sutras
de l'école Shingon ou que, parce qu'il ne contient ni mudra ni mantra dharani* , le Sutra
du Lotus n'est même pas comparable au Sutra Vairocana*.
[...] J'ai longuement étudié la question et
j'ai conclu que Shubhakarasimha* avait été conduit devant Emma,
roi des enfers, pour deux fautes qu'il avait commises. Tout d'abord,
le Sutra Vairocana* est non seulement inférieur au Sutra
du Lotus mais il n'est même pas du niveau du Sutra
du Nirvana et des sutras Kegon* et Hannya*.
Pourtant, Shubhakarasimha* prétendit qu'il était supérieur au Sutra du
Lotus, commettant ainsi la faute de dénigrer le Dharma.
[...] En dépit de cela, les maîtres du Shingon qui vécurent après Shubhakarasimha* maintinrent tous que le Sutra Vairocana* est non seulement supérieur au divers autres sutras mais aussi
au Sutra du Lotus. D'autres prétendirent même
que le Sutra du Lotus est inférieur au Sutra
Kegon*.
Bien qu'il s'agisse là de conceptions divergentes, elles constituent
toutes la même grave opposition au Dharma.
Le savant maître
Chan-wou-wei (Kamakura, 1270 à
Joken-bo et Gijo-bo)
Lorsque le vénérable
Shakyamuni enseigna le chapitre Juryo* (XVI), il déclara, en faisant allusion
à ce que tous les êtres vivants avaient entendu dans les enseignements antérieurs au Sutra du Lotus et dans l'enseignement
théorique* du Sutra du Lotus : "Tous les êtres dans les mondes-états du ciel et des hommes et tous les asuras pensent que Shakyamuni atteignit l'Éveil suprême après avoir quitté le palais des Shakya et s'être assis sur le lieu de méditation, non loin de
la ville de Gaya."(réf.) Cette phrase exprime la conception répandue chez tous les disciples
et tous les grands bodhisattvas depuis le moment où Shakyamuni
commença à enseigner le Sutra
Kegon* jusqu'au moment où il finit d'exposer le chapitre Anrakugyo* (XIV) du Sutra du Lotus.
[...] Le Bouddha
dit aussi : "Maintenant, hommes de foi sincère... le temps
est sans limites ni bornes, cent, mille, dix mille, cent mille nayuta asogi kalpa depuis que j'ai en fait atteint la bodhéité."(réf.) Par cette seule affirmation, il réfute comme de grands mensonges
les mots du Sutra Kegon* : "J'atteignis pour la première fois la bodhéité",
impliquant que Shakyamuni atteignit la bodhéité pour
la première fois en ce monde ;
[...] Si l'on
réfléchit à tout cela, il devient évident
que le bouddha Vairocana,
dépeint dans le Sutra
Kegon* comme étant assis sur un trône en forme de lotus et que
le Bouddha Shakyamuni décrit comme mesurant seize pieds (note) dans les sutras Agama*,
aussi bien que les autres bouddhas provisoires mentionnés dans
les sutras Hodo*, Hannya*, Konkomyo*, Amida et Vairocana*, ne
sont que des reflets du bouddha du chapitre Juryo* (XVI).
Le coeur du chapitre
Juryo (17
avril 1271 ou 1272)
Mais Shubhakarasimha* et Vajrabodhi*,
qui introduisirent les enseignements ésotériques en Chine,
s'approprièrent le principe d'ichinen
sanzen de Zhiyi*,
pour en faire le coeur des enseignements de leur école, tout en
y ajoutant la pratique de mudra et
de mantra dharani* et prétendirent que leurs enseignements surpassaient ceux de Zhiyi.
De sorte que ceux qui étudiaient le bouddhisme, ignorant les faits
réels, en vinrent à croire que le principe d'ichinen
sanzen se trouvait déjà
dans le Sutra Vairocana* tel
qu'il était parvenu d'Inde. De même, à l'époque
de Cheng-guan, patriarche de
l'école Kegon, le principe
d'ichinen sanzen de Zhiyi fut subrepticement incorporé et utilisé pour interpréter
le passage du Sutra Kegon* qui dit : "L'esprit est semblable à un peintre habile."
Les gens ignorent ces faits.
[...] On lit dans le Sutra
Kegon* : "Il n'y a que deux lieux au monde où l'arbre de Yakushi* grand roi-médecin,
qui symbolise la sagesse du Bouddha, ne pourra ni pousser ni apporter
de bienfaits : le vide immense (note), puits profond où tombent les personnes
des deux véhicules, ou les
eaux agitées par les désirs et les conceptions erronées
dans lesquelles se noient les icchantika* détruisant
en elles-mêmes les racines de la bonté."
Le Sutra
Kegon* ayant été enseigné en premier (note), aucune parole antérieure
du Bouddha ne vient le contredire, et par conséquent, il ne suscita
aucune mise en cause. A quel propos de grands doutes s'élèvent-ils?
De nos jours, nombreux sont ceux
qui semblent croire dans le Sutra du Lotus, mais en fait cette croyance est superficielle, le coeur n'y est pas. C'est seulement quand on leur assure que le Sutra du Lotus est identique au Sutra Vairocana*, au Sutra Kegon* ou au Sutra Amida* , que les gens se réjouissent et se convertissent à la foi.
[...] A l'âge de dix-neuf
ans, il quitta sa famille* et à trente ans, il réalisa la bodhéité.
Sur le lieu de son Éveil*,
il commença par exposer le Sutra Kegon apparaissant comme le bouddha Vairocana* dans son Monde du Trésor du Lotus (note). Il exposa les dix
mystères*, les six formes*,
et l'interdépendence de tous les phénomènes (note), le Dharma mystique*. A ce moment-là,
les bouddhas des dix directions apparurent devant lui, et tous les bodhisattvas se rassemblèrent
autour d'eux comme une nuée.
[...] Le Sutra
Kegon* dit : "C'est dans la plénitude de sa souveraineté qu'il exposa un sutra parfait..." L'ouvrage,
composé de soixante volumes, est véritablement parfait,
dans chacun de ses caractères et chacune de ses lignes.
On peut le comparer au joyau qui exauce
tous les voeux qui, à lui seul, a autant de valeur qu'une quantité
innombrable de joyaux. Car ce seul joyau peut faire pleuvoir dix mille
joyaux aussi précieux que dix mille trésors. De même,
un seul mot du Sutra Kegon est aussi riche de sens que dix mille mots. Le passage qui proclame l'identité entre "l'esprit,
le Bouddha et les simples mortels" (note), représente
non seulement le coeur des enseignements Kegon,
mais aussi celui des enseignements Hosso (note), Sanron, Shingon et Tendai.
[...] Par conséquent, le Sutra
Kegon est en fait un joyau ébréché, une lune voilée
par des nuages, un soleil au moment d'une éclipse. Comme c'est
difficile à comprendre ! Les sutras Agama*, Hodo*, Hannya* et Vairocana*, enseignements du Bouddha, sont des oeuvres splendides, et pourtant
ils sont loin d'être comparables au Sutra
Kegon*.
Comment des principes encore cachés même dans le Sutra
Kegon* pourraient-ils être révélés dans ces sutras ?
[...] le Bouddha refute le concept, énoncé dans le Sutra
Kegon,
selon lequel le monde phénoménal n'est qu'une création
de l'esprit (note). Il réfute aussi le concept, présent dans le Sutra Daijuku, de
la méditation du reflet sur l'océan (note), et le concept, développé
dans le Sutra Hannya* de la non-distinction entre tous
les êtres (note). L'étonnement vient de ce que Shakyamuni déclare :"En quarante ans et plus la vérité n'a pas encore
été révélée."(note) ou que le Sutra Muryogi considère les pratiques enseignées dans les sutras
antérieurs comme "les pratiques
de bodhisattvas dites de kotis de kalpas"(note).
Dans ce sutra, il est dit :
"j'ai pu réaliser l'Éveil parfait
et complet sans supérieur*,
au bout de six ans, m'étant assis bien droit sur le trône de la sagesse
sous l'arbre bodhi", utilisant
ainsi le même langage que le Sutra
Kegon dans lequel on lit que le Bouddha Shakyamuni "atteignit
l'Éveil pour la première fois en Inde".
Les enseignements provisoires tels
que les sutras Kegon*, Hannya* et Vairocana*, non
seulement cachent le fait que les personnes des deux
véhicules
[...] De ce point
de vue, nous comprenons que le bouddha Vairocana* décrit dans le Sura Kegon*,
le Bouddha Shakyamuni décrit dans les sutras Agama*,
et les bouddhas venus de toutes les directions de l'univers décrits dans les sutras Hodo* et Hannya* ainsi que dans les sutras Konkomyo*, Amida et Vairocana ne sont
que des reflets du Bouddha du chapitre Juryo* (XVI), semblables aux reflets de la lune flottant à la surface de vasques
emplies d'eau, grandes et petites.
[...] Ainsi, l'école Hosso devint l'école dominante du bouddhisme dans les trois pays*. Cette école affirme : "Dans tous les enseignements du Bouddha depuis le Sutra
Kegon*,
exposé en premier, jusqu'aux Sutra du Lotus et du Nirvana exposés en dernier, il est établi que ceux qui ne possèdent
pas de prédispositions pour devenir bouddha et ceux qui sont voués
aux mondes-états d'auditeurs-shravakas et pratyekabuddhas ne pourront
jamais devenir bouddha (note)
[...]2 Dans le monde
du Trésor du lotus que décrit le Sutra
Kegon*,
les bouddhas, sous l'aspect de leur Corps
de sagesse*,
séjournent tous sur leur terre respective.
[...]2 Les grands bodhisattvas des assemblées décrites dans les
sutras Kegon*,
sutras Hodo* et Hannya*,
et dans le chapitre Hoto* (XI) du Sutra du Lotus, Kongosatta et les autres seize grands bodhisattvas du Sutra Vairocana* ressemblaient
à une bande de singes, auprès de ces bodhisattvas nouvellement
arrivés, resplendissants comme Taishaku. [...] Devant ces quatre personnages,
même les quatre bodhisattva du Sutra
Kegon*,
les quatre bodhisattva du Sutra Vairocana* (note) ou les seize grands bodhisattvas
du Sutra Kongocho* (note) étaient
comme des hommes éblouis s'efforçant de fixer le soleil,
ou comme de simples pêcheurs en présence de l'empereur.
Zhiyi* dit à ce propos : "Depuis l'époque où,
juste après son Éveil, Shakyamuni enseigna le Sutra
Kegon*,
jusqu'au rassemblement au Pic du Vautour,
des bodhisattvas étaient constamment venus des dix
directions pour rejoindre l'Assemblée. Ils étaient en
nombre illimité, mais Maitreya,
avec la sagesse et le pouvoir propres à celui qui devait succéder
au Bouddha, les avait vus et les connaissait tous.
[...]2 Mais ces
paroles du Bouddha ne firent qu'amplifier la perplexité de Maitreya et des autres grands bodhisattvas. Quand le Bouddha enseigna le Sutra
Kegon*,
Hoe et d'innombrables grands bodhisattvas apparurent dans l'assemblée.
[...]2 Les divers
bodhisattvas qui avaient assisté aux multiples assemblées
au cours des quarante et quelques années écoulées
depuis l'exposé du Sutra
Kegon*,
avaient formulé des doutes à chacune de ces assemblées.
[...]2 A trois reprises,
dans le Sutra Kegon*,
le Bouddha dit : "Pour la première fois, j'ai atteint l'Éveil
[en Inde]."
[...]2 Il apparaît maintenant clairement que le
bouddha Vairocana* du Sutra Kegon* ainsi que les divers bouddhas des sutras Hodo*, Hannya* et Vairocana* sont
tous, en fait, des disciples du Bouddha Shakyamuni.
[...] 2 Néanmoins, Cheng-guan, Jizang, Cien, Kukai* et d'autres maîtres des écoles provisoires comme le Kegon et le Shingon, pour faire l'éloge
des divers sutras sur lesquels sont basées leurs doctrines provisoires,
vont jusqu'à affirmer : "Le bouddha du Sutra
Kegon* est le "bouddha du Corps de sagesse*, "
alors que le bouddha du Sutra du Lotus n'est que "le bouddha
du Corps manifesté."(réf.)
[...] 2 La graine
de l'Éveil de tous les bouddhas mentionnés dans le Sutra
Kegon*,
dans les divers autres sutras du Mahayana,
et dans le Sutra Vairocana*, est
l'unique principe d'ichinen
sanzen. Et le Grand-maître* Zhiyi* fut la seule personne capable de percevoir la vérité de
ce principe. Cheng-guan de l'école Kegon, s'empara du
principe d'ichinen sanzen qu'il utilisa pour interpréter le passage du Sutra
Kegon* qui dit : "L'esprit est semblable à un peintre de talent."
Traité pour
ouvrir les yeux (Sado,
février 1272 à Shijo Kingo)
Les écoles Kusha, Jojitsu, Ritsu disent : « Les explications du Bouddha sont dans les quatre Agon et dans les Préceptes, le Kegonkyo* et le Sutra du Lotus* ne sont pas des explications du Bouddha, ce sont des livres de non-bouddhistes », etc.
[...] Dans le Kegonkyo*, il est dit que «croire en ce sutra est la chose la plus difficile qui soit ».
[...] Or, les uns disent : «Si l'on compare [ce sutra-ci] à tout ce que prêchaient Brahma, Indra, les Quatre Rois du ciel, il est le roi de tous ces sutras ». D'autres disent : «Si l'on compare [ce sutra-ci] à tous les sutras du Hinayana, il est le roi de tous ces sutras ». D'autres encore disent : «Si on compare [ce sutra-ci] au Kegonkyo*, au Shomangyo, il est supérieur à tous ces sutras». Mais si on fait la comparaison avec tous les sutras du Mahayana et du Hinayana, provisoires et définitifs, exotériques et ésotériques, chacun de ces sutras n'est nullement le grand roi des rois des autres sutras. En résumé, c'est par une confrontation [générale] que l'on décide de la valeur des différents sutras.
[...] L'Ainsi-Venu Vairocana, l'Ainsi-Venu Amida, l'Ainsi-Venu Yakuo*, tous les bouddhas des dix directions sans exception sont subordonnés au Vénéré Shakya, Fondateur de la Doctrine, notre Maître originel. Il est comme la lune qui se reflète sur toutes les eaux. Le Vairocana du Kegonkyo*, assis sur les feuilles de lotus dans les dix directions, l'Ainsi-Venu Vairocana des deux plans [de Matrice et de Diamant] du Dainichikyo* et du Kongocho*, sont des acolytes qui encadrent l'Ainsi-Venu Taho* du chapitre de la Tour aux Trésors comme les deux ministres de la droite et de la gauche d'un roi séculier. Ce bouddha Taho* est subordonné (note) à la lune. Cependant, certains Maîtres instructeurs rabaissent le Vénéré Shakyamuni et révèrent l'Ainsi-Venu Vairocana. Certains autres disent que le Vénéré Shakyamuni n'a pas de liens avec nous, mais que l'Ainsi-Venu Amida en a. D'autres disent : ce n'est que le Vénéré Shakya du Hinayana. Certains disent : c'est le Vénéré Shakya du Kegonkyo*.
Traité sur l'essentiel du Lotus (Minobu, le 29 juin 1274, à Toki Jonin)
Même sans avoir étudié les sutras Agama* comme le fit Shariputra, même
sans comprendre le Sutra Kegon* comme l'avait compris le bodhisattva Gedatsugatsu,
et même sans avoir appris par coeur, comme l'avait fait le bodhisattva Manjushri, tous les enseignements
sacrés exposés par le Bouddha de son vivant, en entendant
ne serait-ce qu'un seul caractère ou une seule phrase du Sutra
du Lotus, on ne peut manquer d'atteindre la bodhéité.
[...] Cela devient
ainsi évident : les grands bodhisattvas, les êtres célestes
et autres, aussi nombreux que les grains de poussière de tous
les mondes des dix directions,
qui se rassemblèrent, telle une nébuleuse, pour entendre
le Bouddha enseigner le Sutra
Kegon* sur le lieu où il parvint à l'Éveil ; les divers sages
présents lorsqu'il enseigna les sutras Daijuku et Daibon ; les honorés, au nombre de mille deux cents et plus, qui écoutèrent
les sutras Vairocana* et Kongocho* - tous à un moment donné, dans une vie
antérieure, avaient entendu la partie Jigage du Sutra du Lotus. Mais parce que leur foi était faible,
une période d'une longueur incalculable - sanzen
jintengo* et gohyaku jintengo* - s'écoula
sans qu'ils puissent atteindre l'Éveil. Lorsqu'ils rencontrèrent
le Bouddha Shakyamuni, toutefois, les bienfaits du Sutra du Lotus qui leur étaient déjà acquis ont commencé
à jouer en leur faveur, et ils parvinrent à l'Éveil grâce
aux sutras antérieurs au Sutra du Lotus, sans avoir besoin d'attendre l'enseignement
donné à l'Assemblée du Pic
du Vautour.
Lettre à Horen (Minobu,
avril 1275 à Soya Kyoshin)
Au moment où Shakyamuni
s'apprêtait à enseigner le Sutra
Kegon*,
[sur le lieu où il était parvenu à l'Éveil ] les
divers bouddhas des dix
directions apparurent et tous les grands bodhisattvas s'assemblèrent. Bonten, Taishaku,
les quatre Rois du Ciel arrivèrent,
leur robe flottant au vent. Les dieux-dragons et les huit groupes d'êtres
non-humains marquèrent leur respect en joignant les mains, les
mortels de capacité supérieure tendirent l'oreille ; les
bodhisattvas parvenus au stade où l'on perçoit que rien
ne naît ni ne meurt [musho honin]
et le bodhisattva Gedatsugatsu,
tous supplièrent le Bouddha d'enseigner. Mais l'Honoré
du monde ne dit pas un mot du principe de l'atteinte de la bodhéité par les personnes des deux véhicules,
ni du fait qu'il avait lui-même atteint la bodhéité
dans un passé atemporel.
Il n'exposa pas non plus les principes, les plus vitaux de tous, de
l'atteinte de la bodhéité
sans changer d'apparence et d'ichinen
sanzen. Et cela pour une unique raison : ils avaient la capacité
de comprendre mais, parce que le temps n'était pas encore venu,
il n'a rien expliqué. Comme il est dit dans le Sutra du Lotus : "Parce que le temps d'enseigner n'était pas encore venu"(réf.).
[...] Honen,
au Japon, donne l'interprétation suivante. Selon lui, le Sutra
du Lotus, le Sutra
Kegon*,
le Sutra Vairocana* et divers
autres sutras du Hinayana, ainsi
que les enseignements des écoles Tendai, Shingon et Ritsu qui se sont répandus au Japon aujourd'hui, représentent
le Dharma pur des deux mille ans des périodes du Dharma
correct et du Dharma formel mentionnés dans le Sutra
Daijuku. Mais, dès que le monde sera entré dans
l'époque des Derniers jours
du Dharma,
ces enseignements perdront toute validité.
[...] Ainsi,
chacune de ces écoles défendit ses propres principes et
développa des notions en apparence aussi différentes que
l'eau du feu. Pourtant, essentiellement, leur perspective était
la même. Parmi les enseignements
sacrés exposés par Shakyamuni de son vivant, elles
plaçaient le Sutra
Kegon* au premier rang, le Sutra
du Nirvana, au deuxième, et au troisième, le Sutra du Lotus. Toutes
ces écoles admettaient que par rapport au sutras Agama*, Hannya*, Vimalakirti et Shiyaku, le Sutra du Lotus était l'expression de
la vérité, un "enseignement complet" énonçant
des principes corrects. Mais elles maintenaient que, comparé
au Sutra du Nirvana,
il représentait un enseignement dont la vérité
n'est pas éternelle, un sutra incomplet contenant certains principes
erronés.
[...] Voyant l'école Tiantai attaquée par l'école Hosso,
il se fit le champion du Sutra
Kegon* que Zhiyi* avait précédemment réfuté et relégué
à une place inférieure, et déclara que, parmi les
enseignements exposés par Shakyamuni de son vivant, la première
place revenait au Sutra
Kegon*,
la deuxième, au Sutra du Lotus, et la troisième
au Sutra du Nirvana.
Sous le règne de Xuanzhong,
le quatrième successeur de Tang
Taizhong, dans la quatrième année de l'ère
Kai-yuan (716), le Savant-maître* Shubhakarasimha* arriva en Chine venant d'un pays de l'ouest, l'Inde, et dans la huitième
année de la même ère (720), les Savant-maître* Vajrabodhi* et Amoghavajra* vinrent eux aussi d'Inde en Chine. Ils apportèrent avec eux les
sutras Vairocana*, Kongocho* et Soshitsuji*,
et fondèrent l'école Shingon.
Cette école divise les enseignements bouddhiques en deux catégories
: les enseignements exotériques de Shakyamuni, exposés
dans les sutras Kegon*,
dans le Sutra du Lotus et dans divers autres sutras, et les
enseignements ésotériques de Vairocana,
exposés dans le Sutra Vairocana* et divers
autres sutras. Le Sutra du Lotus est le plus élevé
des enseignements exotériques.
[...] Le Sutra parle de "la personne qui a la force de pratiquer ce Sutra"(réf.) et de "la personne capable de l'enseigner."(réf.) Que signifie "capable de l'enseigner" ? Cela ne désigne-t-il
pas celui qui affirmera, comme il est dit dans un passage du Sutra lui-même : "De tous les sutras, c'est le plus élevé"(réf.) et qui proclamera, comme le Sutra l'enseigne, la supériorité
du Sutra du Lotus sur les sutras Vairocana*, Kegon*,
du Nirvana, Hannya* et autres ? N'est-ce pas celui-là que le Sutra désigne comme "le Pratiquant du Sutra du Lotus" ? S'il faut en croire ces passages du Sutra, en plus de sept
cents ans, depuis l'introduction du bouddhisme au Japon, à l'exception
du Grand-maître* Saicho* et de moi Nichiren, il n'y a pas eu un seul pratiquant du Sutra
du Lotus.
[...] Question : Est-ce à dire que Nagarjuna, Vasubandhu et d'autres n'ont
pas enseigné les véritables principes du Sutra du
Lotus ?Réponse : C'est exact. Ils ne l'ont pas fait. Question : Quel enseignement ont-ils donc propagé ?Réponse : Ils ont enseigné les sutras
du Mahayana provisoire*,
divers enseignements ésotériques comme exotériques,
tels que les sutras Kegon*, Hodo*, Hannya*,
et Vairocana*, mais ils
n'ont pas exposé les principes du Sutra du Lotus.
[...] Et nous constatons que par la suite,
soixante-dix maîtres poursuivirent la lignée de Nagarjuna,
tous des Maîtres de doctrine*.
Chacun de ces soixante-dix maîtres appuya son enseignement sur
le Chu Ron*. Le Chu Ron* est un ouvrage en quatre volumes
composant vingt-sept chapitres, et l'essentiel de son enseignement consiste
en une strophe de quatre vers (note) énonçant
que tous les phénomènes sont, à l'origine, interdépendants.
Cette strophe de quatre vers résume les Quatre
Enseignements et la Triple Explication comme on les trouve dans les sutras
Kegon* et Hannya et autres
sutras provisoires, mais elle n'énonce pas la Triple Explication
telle que la définit le Sutra du Lotus.
[...] Un tel
principe ne peut même pas soutenir la comparaison avec le remplacement
des trois véhicules par le Véhicule unique de l'état de Bouddha, notion énoncée dans les sutras Kegon* et Hannya* et n'est pas même aussi profond que l'enseignement
spécifique (bekkyo) et l'enseignement
parfait* qui précédèrent le Sutra du Lotus comme
l'a clarifié l'école Tendai.
Pour ce qui est de sa signification essentielle un tel principe correspond
tout au plus aux deux types d'enseignement les moins élevés,
les enseignements tripitaka (zogyo) et commun (tsugyo).
[...] Kukai* se rendit en Chine pendant l'ère Enryaku à la même
époque que le Grand-maître* Saicho*(note). Il y
étudia l'enseignement de l'école Shingon sous la direction de Huiguo du
temple Qing-long-si. De retour au Japon, évaluant les mérites
des enseignements exposés par Shakyamuni de son vivant, il déclara
que les plus élevés étaient les enseignements de
l'école Shingon, plaçant
le Sutra Kegon* au deuxième rang, et, au troisième, le Sutra du Lotus.
[...] J'ai été moi-même stupéfait en lisant ces
commentaires et j'ai donc fait des recherches dans tous les sutras,
y compris dans les trois attribués au bouddha Vairocana*.
Mais je ne trouve pas un seul mot ou passage dans les sutras indiquant
que le Sutra du Lotus, comparé aux sutras Kegon* ou Vairocana* est un enseignement
puéril ; que, par rapport au Sutra
Rokuharamitsu, Zhiyi* agit comme un voleur, ou que le Sutra
Shugo décrit Shakyamuni "à l'étape de l'obscurité"(note).
Le choix en
fonction du temps (Minobu, 10 juin 1275
; adressé à Yui)
Le Grand-maître* Ennin*,
déclara : "Même si l'on appelle les sutras Kegon* et divers autres "ésotériques", ils n'exposent
pas la totalité de l'enseignement
secret* du Tathagata ; c'est pourquoi
ils sont différents des enseignements du Shingon". (réf.) Le Grand-maître* Enchin*,
déclara : "Comparés au Sutra Vairocana*, le Sutra
Kegon* et les sutras du Lotus sont des théories puériles."(réf.) Et Kukai*,
le Grand-maître* Kukai*,
fit remarquer : "Chaque véhicule proposé se
proclame le véhicule véritable, mais lorsqu'on les considère
d'un point de vue plus large, on voit bien qu'ils ne sont que théories
puériles."(réf.)
La question
à approfondir jour et nuit (Minobu,
28 août 1275 ? , Toki Jonin)
C'est
à une époque aussi reculée, dans le lointain
passé de sanzen-jintengo,
que les trois groupes de disciples de Shakyamuni, comprenant, Mahakashyapa, Ananda et Rahula,
eurent connaissance du Sutra du Lotus par la bouche d'un
bodhisattva, seizième fils du bouddha Daitsu.
Pourtant, trompés par des personnes mauvaises, ils finirent
par abandonner le Sutra du Lotus. Ils retombèrent
dans les enseignements des sutras Kegon*, Hannya*, Daijuku ou du Nirvana ou plus bas encore, dans ceux des sutras Vairocana*, Jimmitsu* ou Kammuryoju,
voire même retombèrent dans l'erreur des enseignements Hinayana des sutras Agama*.
[...] Quand il se trouve par hasard que l'un d'entre
eux a l'esprit de recherche, s'il se sent impuissant à faire
tomber un croyant du Sutra du Lotus dans le mal, il essaie
de l'abuser progressivement en l'attirant par ruse vers le Sutra
Kegon*,
qui ressemble au Sutra du Lotus.[...] La phrase : "Si vous tombez sous leur influence,
vous serez entraînés dans les mauvaises
voies" ne fait pas seulement référence aux
trois Voies mauvaises,
mais aussi aux mondes-états des hommes et du ciel,
et plus généralement à l'ensemble des neuf états.
Par conséquents, tous les sutras, à l'exception du Sutra
du Lotus - compris les sutras des périodes Kegon, Agon, Hodo et Hannyaa ainsi que le Sutra
du Nirvana et le Sutra Vairocana* - entraîneront
les êtres humains dans les mauvaises
voies.
Lettre aux Frères (Minobu, 16 décembre 1275 aux
frères Ikegami)
Dans son traité le Jujushin Ron, Kukai* affirme que le Sutra du Lotus est inférieur au Sutra
Kegon*.
Dans le Hizo Hoyaku, il prétend que le Bouddha Shakyamuni,
auteur du chapitre Juryo* (XVI), n'est qu'un simple mortel et dans le Kemmitsu-nikyo
ron, il traite le Grand-maître* Zhiyi* de voleur.
Sur le comportement
du Bouddha (Minobu,
1276, à Konichi-ama)
Le Sutra Kegon* commence par : «Sutra Daihokobutsu Kegon. Ainsi ai-je entendu.»
Au début du Sutra Hannya* on lit : « Sutra Makahannya Haramitsu,
ainsi ai-je entendu. » Le titre du Sutra
Vairocana* comporte
la mention : « Daibirushana Jimbenkaji*, ainsi ai-je entendu. » Quel est donc le sens de cet "ainsi"
dans le titre de ce sutra, comme dans celui des autres ?
[...] [Les disciples
de] 95 écoles non bouddhiques, après avoir entendu les
titres des sutras Agama*,
ont abandonné leurs conceptions erronées et ont reconnu
comme une vérité le principe de l'impermanence.
Ceux qui ont entendu les titres des sutras du Hannya
haramita* se sont éveillés aux trois principes de taiku*,
de tanchu* et de futanchu*. Ceux qui
ont entendu le titre du Sutra
Kegon* se sont éveillés à tanchu* ou futanchu*. Ceux qui
ont entendu les titres des sutras Vairocana*, Hodo* et Hannya* , ont compris le principe de shakku* ou de taiku*
; le principe de tanku* ou celui de futanku*, les principes de tanchu* et de futanchu*.
"Ainsi ai-je
entendu" (Minobu, 28 novembre
1277, à Soya Kyoshin)
Dans les dix stades de l’esprit du Hizo Hoyaku [La Clef précieuse du grenier des mystères],
un ouvrage en trois fascicules de Kukai*,
les sutras sont classés selon la profondeur de doctrine, le premier
étant le niveau le plus bas et le dixième le plus élevé.
Ainsi, le Sutra du Lotus occupe le 8ème rang, le Sutra
Kegon* le 9ème et le Sutra Vairocana* le 10ème.
Dans une version abrégée du Kongocho*,
ainsi que dans une version abrégée du Soshitsuji* Ennin* explique que le Sutra du Lotus occupe la seconde place après
le Sutra Vairocana*, qui,
lui, vient en premier. Il en est de même de l’explication
d'Enchin.
[...] Il ne fait pas de doute que Kukai* a lu le Sutra du Lotus, aussi bien que les autres sutras. Cependant,
il a mal interprété certains d’entre eux. Pour décider
quel sutra est supérieur à l’autre, du Sutra du
Lotus, du Sutra Kegon*,
ou du Sutra Vairocana*, et
quelle doctrine est profonde ou superficielle, Kukai* lit les passages du Sutra du Lotus et les interprète de
la manière suivante : "Le Sutra du Lotus est le véritable
Dharma de tout bouddha et devrait être classé comme le plus
bas des sutras" (alors qu'en fait, il [le sutra] déclare qu’"il
est le plus élevé de tous".
[...] le Grand-maître* Kukai* fit une fausse déclaration aux gens selon laquelle le Sutra
du Lotus était inférieur, non seulement au Sutra Vairocana*, mais
aussi au Sutra Kegon*.
Si les Grands-maîtres Ennin* et Enchin n’avaient pas donné
beaucoup d’importance aux enseignements des sutras
Shingon, et si le Grand-maître* Kukai* s’était abstenu de les diffuser au Mont Hiei et au temple Onjo-ji,
on aurait pu éviter que son jugement erroné se répande
dans tout le Japon. Les Grands maîtres Ennin* et Enchin ne reconnaissaient pas
les sutras de l’école Kegon comme supérieurs au Sutra du Lotus. Cependant, ils apportèrent
leur soutien à l’affirmation du Grand-maître* Kukai* selon laquelle le Sutra Vairocana* de l’école Shingon était supérieur
au Sutra du Lotus, bien qu’ils appartinssent à l’école Tendai.
Questions
- réponses concernant l’objet de vénération (Minobu,
septembre 1278 à
Joken-bo)
L'interdiction
de tuer les êtres vivants est un précepte primordial. Le premier des cinq
préceptes interdit d'ôter la vie et les huit préceptes,
les dix préceptes, les deux cent cinquante préceptes,
les dix principaux préceptes du Sutra
du filet de Brahma* , les dix préceptes insondables du Sutra
Kegon* et les dix préceptes du Sutra
du collier de bodhisattva*,
tous commencent par le précepte proscrivant l'acte de tuer. Et
parmi les trois mille sanctions codifiées par le confucianisme,
la première est la peine capitale.
Lettre à
Akimoto (Minobu,
le 27 janvier 1280, à Akimo to)
L'infériorité des sutras Kegon*, Vairocana* et autres,
par rapport au Sutra du Lotus, est aussi évidente que
la différence de poids entre un cheveu et une montagne énorme,
ou entre une robe qui ne pèse pas plus que trois plumes et la
terre. Si l'on compare un Pratiquant du Sutra du Lotus de condition modeste aux moines les plus
éminents des écoles Kegon et Shingon, la supériorité
du premier sur les seconds est comparable à celle de Taishaku sur un singe, ou d'un lion sur un lièvre.
La bonne fortune
inégalée (Minobu,
1l mai 1280, au seigneur Nishiyama).
Je considère que
les enseignements non bouddhiques sont plus faciles à croire
et à comprendre que les sutras du Hinayana ; les sutras du Hinayana sont
plus faciles à croire et à comprendre que le Sutra
Vairocana* et d'autres
sutras Hodo* ; le Sutra Vairocana* est plus
facile à croire et à comprendre que les sutras Hannya* ; les sutras Hannya* sont plus faciles que le Sutra
Kegon* ; le Sutra Kegon* est plus facile que le Sutra
du Nirvana ; le Sutra
du Nirvana est plus facile que le Sutra du Lotus,
et l'enseignement théorique* est plus facile que l'enseignement
essentiel* du Sutra du Lotus. Il y a ainsi différents niveaux de
difficulté ou de facilité relative [à croire et
à comprendre].
[...] Les enseignements
des écoles Shingon et Kegon entrent dans la catégorie
de zuitai. Ils sont par conséquent
faciles à croire et faciles à comprendre puisque le Bouddha
les exposa en tenant compte des capacités ou des désirs
des personnes dans les Neuf états,
tout comme un père sage instruirait son enfant ignorant [de la
manière la mieux adaptée à ses facultés
de compréhension]. Par ailleurs, on appelle zuiriki l'enseignement que le Bouddha exposa en puisant directement dans son
état de Bouddha, de la même manière qu'un père
sage guide son enfant ignorant vers la compréhension à
laquelle il est lui-même parvenu. [A la lumière
de ces principes de zuijii et de zuitai, ] j'ai sérieusement analysé
les sutras Vairocana, Kegon*,
le Sutra du Nirvana et d'autres sutras provisoires
et j'ai finalement découvert que tous ces sutras font partie
de l'enseignement zuitai.
[...] A
ceux qui recherchent la voie de
l'étude, le Bouddha enseigne le véhicule qui mène
à cet état ; à ceux qui recherchent la voie
de l'Éveil personnel, il révèle le véhicule
qui mène à cet état ; et à ceux qui recherchent
la voie du Mahayana, il enseigne
cette voie." Cette affirmation décrit le principe de zuitai
[enseigner selon les capacités], celui des enseignements faciles
à croire et faciles à comprendre. Les sutras Kegon*, Vairocana*, Hannya*, Nirvana et divers
autres sutras entrent dans cette catégorie.
Comparaison
du Sutra du Lotus avec les autres sutras (Minobu,
le 26 mai 1280 à Toki Jonin)
Le très sage Grand-maître* Zhiyi* commenta les cinq caractères de Myo Ho Ren Ge Kyo dans les mille
pages de son Hokke
Gengi en dix volumes. Le point central de cet ouvrage
est le suivant : les quatre-vingt, soixante, ou quarante volumes du Sutra
Kegon* ; les quelques centaines de volumes des sutras Agama* ; les nombreux volumes du Sutra
Dajuku hodo ; les quarante ou six cents volumes du Sutra
Daibon hannya ; les quarante ou trente-six volumes du Sutra
du Nirvana, ainsi que les innombrables sutras en Inde, dans
les palais des Rois-dragons,
dans les cieux et dans les mondes des dix
directions, aussi nombreux que tous les grains de poussière
de la terre - tous ces sutras sont les serviteurs et les seconds du
seul caractère Kyo (sutra) de Myoho Renge Kyo.
[...] De même, les sutras des périodes Kegon, Agon, Hodo et Hannya ; le Sutra Vairocana*, le Sutra du Nirvana et les divers autres sutras enseignés avant le Sutra du Lotus,
en même temps que lui ou après lui, sont des petits souverains
comparables aux gouverneurs des diverses provinces du Japon.
Chevaux blancs et
cygnes blancs (Minobu,
14 août.1280, à la dame d'Utsubusa)
Où
peut-on trouver la moindre preuve écrite pour appuyer l'affirmation
du Grand-maître* Kukai* que le Sutra Vairocana* est
supérieur au Sutra du
Lotus et au Sutra
Kegon* ? En revanche, dans le Sutra du Lotus, certains passages affirment
clairement l'infériorité des sutras Kegon* et Vairocana*. Tel
est le sens, par exemple, des mots : "parmi tous les sutras que
le Bouddha a enseignés, enseigne et enseignera à l'avenir (note) [le Sutra du Lotus est le plus élevé (réf.)].
Si respecté que soit Kukai*,
il ne pourra pas échapper à la grave accusation de s'opposer
à Shakyamuni, Taho et à
tous les autres bouddhas des
dix directions, émanations du Bouddha Shakyamuni !
[...] Mais
les alliés de Nichiren sont Nitten et Gatten, Taishaku et Bonten. Divinités Nitten et Gatten, ouvrez vos yeux célestes
et observez ce qui se passe ! Dans les palais de Nitten et de Gatten, se trouvent sûrement
des copies du Sutra du Lotus et des sutras Vairocana* et Kegon*.
Comparez-les et voyez où se trouve la vérité ! Quels enseignements méritent la plus haute place ? Ceux
de Kukai*, Ennin*, Enchin et Annen,
ou ceux de Nichiren ?
Le principe de l'atteinte
de la bodhéité sans changer d'apparence (Minobu,
en 1280? , à Myoichinyo)
Ou encore, il se présente comme un moine éminent
ou un moine de grande sagesse, respectueux des préceptes. Puis,
les sutras Kegon*, Agama* ou les enseignements du Nembutsu ou du Shingon à la main,
il s'efforce de nous faire abandonner le Sutra du Lotus et
de nous faire croire en ces autres enseignements, en rusant pour nous
empêcher de devenir bouddha.
Réponse à
Jibu-bo (Minobu,
le 22 août 1281, à Jibu-bo Nichii)
Le Sutra
Trapusha traite des mondes-états des hommes et du ciel.
Les sutras Agama* décrivent les personnes des deux
véhicules. Le Sutra
Kegon* décrit les bodhisattvas. Les sutras Hodo* et Hannya* ressemblent soit aux sutras Agama* et Trapusha, soit
au Sutra Kegon*.
[...] Il y eut
toutefois un point sur lequel tout le monde s'accordai : parmi tous
les enseignements exposés par le Bouddha de son vivant, le Sutra
Kegon* était le plus élevé, le Sutra
du Nirvana venait en deuxième, et le Sutra du Lotus en troisième. Nul, du souverain aux personnes des plus basses
conditions, ne contestait cette opinion car c'était aussi celle
du Maître du Dharma Fayun,
du Maître du Dharma Zhizang et des autres maîtres des dix
écoles, tous considérés comme de grands sages. Ensuite,
à l'époque du Dharma formel, sous les dynasties Chen et Shui, apparut un novice du nom de Zhiyi* qui fut appelé plus tard le Grand-maître* du Tiantai. Il formula de nombreux enseignements mais le point le plus important,
en définitive, fut qu'il établit un ordre de supériorité
relative entre le Sutra du Lotus, le Sutra
du Nirvana et le Sutra
Kegon*.
[...] Il est clairement indiqué dans le Sutra
Muryogi que les sutras déjà enseignés
par le Bouddha désignent le Sutra
Makahannya, le principe kegon du vide de l'océan (note) et d'autres. A propos des sutras qu'il enseignerait à l'avenir,
on lit dans le Sutra du Nirvana : "Du Sutra Hannya Haramitsu découle le grand Sutra
du Nirvana." Ces passages scripturaux démontrent
la supériorité du Sutra du Lotus sur le Sutra
Kegon* et le Sutra du Nirvana ; tout cela est d'une clarté aveuglante, il est impossible de ne
pas le comprendre."
[...] Plus tard,
sous le règne de l'impératrice Zetian,
l'école Kegon fut fondée
en Chine. On abandonna la traduction du Sutra
Kegon* en soixante volumes (note),
que le Grand-maître* Zhiyi* avait critiquée, et désormais l'école s'appuya
sur une nouvelle traduction du Sutra
Kegon en 80 volumes, introduite par le Maître
du tripitaka Jih-chao. Cette
école enseigne principalement que le Sutra
Kegon est "la racine", l'enseignement fondamental
du Bouddha tandis que le Sutra du Lotus en est "les branches",
l'enseignement secondaire. L'impératrice Zetian s'était faite nonne et elle avait une certaine connaissance des
écrits bouddhiques aussi bien que non bouddhiques. Avec arrogance,
elle rabaissa l'école de Zhiyi*.
Ainsi, par les écoles Hosso aussi bien que Kegon, le Sutra
du Lotus fut donc doublement dissimulé.
[...] C'est à
la même époque que vécut Kukai*,
connu parla suite sous le nom de Grand-maître* Kobo. Il se rendit lui aussi
en Chine, dans la 23e année de l'ère Enryaku [804], et
revint au Japon dans la 3e année de l'ère Daido [808] (note). Il étudia exclusivement
la doctrine Shingon et la propagea
au Japon. Selon lui, le Sutra du Lotus ne pouvait même
pas être comparé au Sutra
Kegon*,
et encore moins aux enseignements du Shingon.
[...] Mais en réalité,
lorsque nous étudions attentivement les sutras Kegon*, Nirvana, Hannya*, Vairocana* et Jimmitsu*,
nous ne trouvons nulle part le moindre passage contredisant cette claire
affirmation du Sutra du Lotus : "parmi tous les sutras,
celui-ci est de tous le plus élevé".
Le corps et
l'esprit des simples mortels (Minobu,
à un disciple)
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