Deux cents ans plus tard, le Grand- maître Zhanlan.* disait : « Il faut le savoir : le corps et la terre sont trois mille manifestations d'ichinen (une pensée). Aussi, au moment de la réalisation de la Voie, conformément à ce principe fondamental, le corps et la pensée englobent le monde des dharmas ».
[...] Les commentaires tendai indiquent : « ouvrir le grenier profond secret correspond à Myo. Indiquer le modèle correct de l'éphémère et du véritable correspond au Dharma (Ho). Désigner l’effet fondamental (honga-myo) du passé lointain correspond au lotus (Ren). Rencontrer la voie parfaite de la non-dualité (jippu-nimon) est symbolisé par la fleur (Ge). La voix faisant l’œuvre du Bouddha correspond à Kyo (sutra) ».
[...] Dans le Sutra du Lotus, il y a le Dharma, la parabole et la cause/condition. Lors de la phase de l’exposition du Dharma, les bouddhas déterminent la voie directe pour l’obtention de la bodhéité par tous les êtres, but unique de leur venue en ce monde. Le daimoku est ce qui détermine la cause/condition (innen) pour que, non seulement moi, mais tous les êtres parviennent directement au lieu de la voie, le Sutra du Lotus : ''Montés sur ce Véhicule précieux, ils parviennent directement au lieu de la voie'', autrement dit, c'est l'obtention immédiate de la vision correcte ou l’Éveil dès ce corps»." (note)
Ce monde de l’Endurance* est l'endroit où l’on obtient la voie par la racine de l’ouïe. Comme il est dit (note) auparavant : « Sachez-le bien: notre vie et son environnement sont l'expression d'ichinen sanzen».
[...] "Cette vaste multitude, les innombrables devas*, rois dragons, yakshas*, gandharvas*, asuras*, garudas*, kimnaras*, mahoragas*,
humains et non-humains, ainsi que les bhiksus* et bhiksunis*, upasaka* et upasika*,
ceux qui sont en quête de l'état d'auditeur-shravaka*,
en quête de l'état de pratyekabuddha*,
en quête de la Voie de bouddha? Ces êtres de toutes espèces qui, face à l'Éveillé,
entendent ne serait-ce qu'une stance ou un verset du Sutra du Lotus
du Dharma Merveilleux et qui, ne serait-ce qu'un instant, s'en réjouissent
en conséquence, je leur octroie à tous la prédiction (note) qu'ils obtiendront l'Éveil complet et parfait
érieur*."
[...] "Bhaishajyaraja* (Yakuo),
des nombreuses personnes, laïques et religieuses, qui pratiquent
la voie des bodhisattvas, mais sans voir, entendre,
lire, réciter, copier, garder, honorer ce Sutra du Lotus du Dharma ne maîtrisent pas encore, il faut
le savoir, la pratique de la voie de bodhisattva. Celles qui obtiendront
d'entendre ce Sutra pourront pratiquer correctement la voie
de bodhisattva."
[...] Le Sutra ne discrimine ni les mauvais hommes, ni les femmes, ni les deux véhicules ni les icchantika. Pour cette raison, il représente vraiment la Voie de la bodhéité proposée à tous. Pour cette raison encore, on qualifie ce sutra de Grande sagesse équanime.
La doctrine d’Ichinen Sanzen, 1258
Et moi, Nichiren, en m'interrogeant sur la véracité
des paroles du Bouddha, je vois bien que ces trois sortes d'ennemis
sont déjà présents. Si je ne les fais pas apparaître,
je ne suis pas le Pratiquant du Sutra du Lotus. Si je les fais
apparaître, j'attire inévitablement sur moi la mort et
la destruction. Il est dit dans le quatrième volume du Sutra
du Lotus : "Puisque haines et jalousies abondent déjà
du vivant du Bouddha, ne seront-elles pas pires encore dans le monde
après son trépas ? "(réf.) Et dans le cinquième volume : "Il y aura beaucoup d'hostilité
dans le monde et il sera difficile de croire."(réf.) Il est dit
aussi : "Nous ne sommes pas avares de notre vie. Nous lui préférons
la Voie suprême."(réf.) Et dans le sixième volume : "Ils ne donnent pas leur vie
à contrecœur."(réf.)
L'enseignement,
les capacités, le temps et le pays (Izu,
10 février 1262 ? )
De même,
les confrontations entre Mahayana et Hinayana, ou entre enseignements
provisoires et définitifs sont comparables à des disputes entre maisons rivales ; mais,
parmi tous les sutras exposés par le Bouddha de son vivant, seul
le Sutra du Lotus occupe une position de priorité absolue.
Il est le guide sur la voie qui mène à l'atteinte immédiate
de la sagesse parfaite, le chariot qui conduit instantanément
au lieu de l'Éveil.
[...] En entendant
cette déclaration, le bodhisattva Daishogon et les 80000 autres bodhisattvas
approuvèrent d'une seule voix, ayant compris que "[celui
qui n'a jamais pu entendre enseigner ce Sutra...] en définitive,
ne pourra jamais atteindre l'Éveil
suprême, même au terme d'un nombre incalculable, infini,
inconcevable, d'asogi kalpa.
Ce passage établit que, si grand que soit le désir d'une
personne d'entrer dans la Voie bouddhique, si elle récite le
nom du bouddha Amida ou suit les
enseignements du Zen - si elle s'appuie
sur les sutras des périodes Kegon, Agon, Hodo et Hannya exposés par le Bouddha pendant les
quarante et quelques années précédentes - elle
ne parviendra jamais à l'Éveil suprême, même pendant
un nombre incalculable, infini, inconcevable d'asogi kalpa.
[...] Pour cette
raison, Zhiyi* déclare : "Après que l'Ainsi-Venu atteignît
l'Éveil, pendant quarante ans et plus, il ne révéla pas
la vérité. Avec le Sutra du Lotus, pour la première
fois, il révéla la vérité."(réf.) Autrement dit, pendant quarante ans et plus après la
venue de l'Ainsi-Venu en ce monde il ne révéla pas le véritable enseignement. Dans le Sutra du Lotus, il révéla
pour la première fois la Véritable voie qui conduit à l'atteinte de la bodhéité.
[...] La raison
en est que, depuis le début, le but fondamental de l'enseignement
de l'Ainsi-Venu était d'ouvrir aux personnes de ces deux mondes-états la voie qui mène à l'Éveil. Et les méthodes qu'il
utilisa pour enseigner tout au long de sa vie, aussi bien que les moyens
habiles utilisés dans ses trois
façons d'exposer, leur étaient principalement destinés.
[...] Voilà
pourquoi Zhiyi* a déclaré : "Ni le Sutra
Kegon* ni le Sutra Daibon ne pouvaient guérir [les maux de ces personnes des deux
véhicules. Seul le Sutra du Lotus pouvait planter
des racines de bonté chez ceux qui n'avaient plus rien à
apprendre (note) et leur rendre accessible la Voie du Bouddha. C'est la raison pour laquelle
on appelle ce sutra Myo, mystique.
[...] Il n'est pas rare, de nos jours, d'entendre affirmer que seule une
personne dotée d'une sagesse supérieure, et s'exerçant
sans relâche à la pratique de la méditation,
a la capacité de recevoir des bienfaits du Sutra du Lotus,
et de voir dissuader des personnes dont la sagesse est limitée
de même essayer. Mais c'est le fait d'une grande ignorance, une
idée tout à fait erronée. Le Sutra du Lotus enseigne que tous les êtres humains, quels qu'ils soient, peuvent
entrer dans la Voie du Bouddha. Par conséquent, les personnes
de facultés et de capacités supérieures devraient
naturellement se consacrer à la méditation sur l'esprit et les dharma.
[...] Quand on
a eu la rare bonne fortune de
naître en tant qu'être humain, et la bonne fortune plus
grande encore de rencontrer les enseignements du bouddhisme, comment
peut-on gaspiller cette chance ? Si l'on veut croire en une doctrine
digne de foi, alors, parmi les divers enseignements du Mahayana et du Hinayana, les doctrines
provisoires et définitives, il faut croire au Véhicule
unique, le véritable but de la venue du Bouddha en ce monde, voie directe qui mène tous les êtres vivants à l'Éveil.
[...] Ainsi,
il est écrit dans le Sutra du Lotus : "Ils éprouveront
mépris, haine, envie et rancune à l'égard de ceux
qui lisent, récitent, transcrivent et croient en ce Sutra (...)
Après leur mort, ils tomberont dans l'enfer avici."
Qui ne tremblerait pas devant ces paroles d'or du Grand Sage ? Et qui pourrait douter d'une déclaration aussi nette que celle
du Bouddha lorsqu'il dit : "Rejetant sincèrement les enseignements provisoires,
[j'enseignerai seulement la Voie suprême.]" ? (réf.)
[...] Combien
de temps encore pouvons-nous espérer vivre comme nous l'avons
fait jusqu'à présent, au jour le jour, ou d'une année
à l'autre ? Nous pouvons nous remémorer notre passé
et compter les années accumulées, mais qui peut savoir
avec certitude s'il sera encore au nombre des vivants un jour ou même
une heure de plus ? Pourtant, même lorsqu'on se sait déjà
proche du moment de sa propre mort, on s'accroche à son orgueil et à ses préjugés, à sa réputation
et à ses profits en ce monde, et l'on ne se consacre pas à
la récitation du Dharma Merveilleux. La futilité d'une
telle attitude défie toute description ! On appelle bien
le Sutra du Lotus l'enseignement qui permet à tous d'entrer
sur la Voie du Bouddha, mais comment une personne agissant ainsi pourrait-elle
réellement y parvenir ? De nombreux poèmes disent
que même la lumière de la lune ne daignera pas briller
sur la manche d'une personne insensible.
[...] "[Je
n'ai qu'une pensée constante] comment puis-je permettre à
tous les êtres vivants d'accéder à la Voie
suprême ? "(réf.) Ces mots expriment le voeu le plus profond du Bouddha, celui
de permettre, à ceux qui acceptent le véritable Dharma
aussi bien qu'à ceux qui s'y opposent, d'atteindre la bodhéité.
Questions et
réponses sur la pratique du Sutra du Lotus (Kamakura ? mars 1263 ? à Nichiji ?)
Il réitéra cette
affirmation dans le chapitre Hoben* (II) du Sutra du Lotus, lorsqu'il dit : "En rejetant
sincèrement les enseignements
provisoires, j'exposerai uniquement la Voie
suprême". (réf) Par "en rejetant les enseignements
provisoires", il invitait à rejeter le Nembutsu et les autres enseignements exposés durant cette période
d'une quarantaine d'années.
[...] Moi seul, Nichiren, ai lu le Sutra avec ma propre vie. Je comprends le sens du passage : "Nous
ne sommes attachés ni à notre corps ni à notre
vie ; notre seul désir est d'accéder à la Voie
suprême."(réf.) Je suis donc, moi, Nichiren, le premier Pratiquant
du Sutra du Lotus au Japon.
Encouragements
à une personne malade (décembre
1264, à Nanjo Hyoe Shichiro)
Essentiellement, on pourrait dire que, parmi tous
les sutras exposés par le Bouddha Shakyamuni en plus de cinquante
ans d'enseignement, il est permis de remettre en cause ceux qu'il enseigna
pendant les quarante et quelques premières années. Car
le Bouddha lui-même déclare dans le Sutra
Muryogi : "Depuis plus de quarante années,
je n'ai toujours pas révélé la vérité."
Ce sont là très clairement les mots mêmes du Sutra.
Dans le Sutra du Lotus, le Bouddha lui-même proclame,
et cela vaut pour chacun de ses mots et chacune de ses phrases : "En
rejetant sincèrement les enseignements
provisoires, j'exposerai uniquement la Voie
suprême."(réf.)
Sur la récitation
des chapitres Hoben et Juryo (Kamakura
- 1264, à la femme de Hiki Daigaku Saburo Yoshimoto)
Le croyant
laïque lui tint alors ce discours : "Votre désir d'entrer
dans la Voie pourrait être digne d'admiration, mais votre démarche
est insensée. La doctrine à laquelle vous venez de faire
allusion est le plus bas des enseignements du Hinayana.
C'est pour le faire comprendre que le Bouddha formula les huit
comparaisons, et que le bodhisattva Manjushri énumera dix-sept différences.
Le Bouddha a déclaré, par exemple, que le Hinayana ne répand pas plus de lumière qu'une luciole comparée
à l'éclat du soleil, ou qu'il est comme du cristal ordinaire
comparé à l'émeraude. De plus, les maîtres
d'Inde, de Chine ou du Japon, ont écrit plus d'un traité
réfutant les enseignements du Hinayana.
[...] C'est la règle
de la vie - celui qui ne meurt pas plus tôt mourra inévitablement
plus tard, et cela n'est sans doute plus, depuis longtemps pour vous,
une surprise. Mais ce qu'il faut désirer avant tout, c'est la
voie du Bouddha, et ce que l'on devrait rechercher sans cesse, c'est
l'enseignement des sutras. D'après vos dires, il me semble que
certaines des doctrines bouddhiques que vous avez rencontrées entrent
dans la catégorie du bouddhisme Hinayana,
d'autres dans celle du Mahayana.
Mais, en laissant de côté pour l'instant la question de leur
supériorité relative, je peux dire que, loin de vous apporter
la délivrance, la pratique
de ces enseignements vous conduira à renaître dans les mauvaises
voies de l'existence."
[...] Le sage répondit
: Dans les enseignements sacrés exposés par le Bouddha de son vivant, il est possible de distinguer
diverses catégories : enseignements
provisoires ou définitifs, Hinayana ou Mahayana.
On peut distinguer encore entre les deux voies, exotérique et ésotérique.
Ainsi, ils ne sont pas tous de même nature. Laissez-moi vous expliquer
un instant où réside le problème, et dissiper ainsi
vos erreurs d'interprétation.
[...] Lorsque le Bouddha, alors âgé de trente
ans, s'assit sur le lieu de l'Éveil sous l'arbre bodhi, il observa le
coeur profond de tous les êtres avec la vision du Bouddha, et comprit
que le temps n'était pas propice pour leur enseigner le Sutra
du Lotus qui révèle la voie directe conduisant tous
les êtres à la bodhéité. Par conséquent,
de la même manière que l'on brandit une main vide pour amuser
un nourrisson, il eut recours à divers subterfuges, et, pendant
les quarante années qui suivirent, s'abstint de révéler
la vérité. Ainsi, il définit la période des enseignements provisoires aussi
clairement que le soleil se levant dans un ciel bleu ou que la pleine
lune apparaissant par une nuit obscure.
[...] Au chapitre Hoben* (II), dans le premier volume du Sutra du Lotus, le Bouddha déclare
: "En rejetant sincèrement les enseignements
provisoires, j'enseignerai exclusivement la Voie
suprême."(réf.) Ce passage indique qu'il faut honnêtement rejeter les principes
exposés par le Bouddha dans les divers sutras enseignés
au cours des quarante-deux années précédentes, nommément
les doctrines du Nembutsu, du Shingon, du Zen et du Ritsu, auxquelles vous avez
fait allusion.
[...] Ce sutra Myoho Renge Kyo* dont je parle représente la vraie raison de la venue de
tous les bouddhas en ce monde, et enseigne la voie directe conduisant
tous les êtres à la bodhéité. Le Bouddha Shakyamuni
la confia à ses disciples, le bouddha Taho témoigna de sa véracité, et les divers autres bouddhas
tendirent la langue jusqu'au Ciel de
Brahma en proclamant : "Tout ce que vous [Bouddha Shakyamuni]
avez exposé est la vérité"(réf.).
Chaque caractère de ce Sutra représente la véritable
intention des bouddhas, et un seul trait de pinceau qui s'y trouve est
une aide pour ceux qui sont prisonniers du cycle des naissances et des
morts. Il ne comporte pas un seul mot de faux.
[...] Et pourtant, dans le Sutra du Lotus lui-même, on lit : "Parmi ceux qui entendent ce Dharma,
il n'en est pas un seul qui n'atteindra pas la bodhéité."(réf.) Cela indique que, s'ils entendent ce Sutra, tous les êtres
dans les dix mondes-états,
en même temps que leur environnement, entreront dans la Voie du
Bouddha. Ainsi, le Sutra prédit que Devadatta,
bien qu'il ait commis les cinq forfaits,
deviendra à l'avenir un bouddha appelé "Roi céleste",
et relate la manière dont la fille
du Roi-Dragon, bien que femme, prisonnière des cinq
entraves et considérée comme incapable de parvenir à
la bodhéité, obtint immédiatement l'Éveil dans un
royaume du Sud.
[...] Dans le même volume du Sutra du Lotus,
le Bouddha déclare : "Pour le bien de la Voie
bouddhique j'ai, dans d'innombrables terres différentes, depuis
le commencement jusqu'à présent, largement enseigné
divers sutras, mais, parmi eux, ce Sutra est le plus élevé."(réf.) Ce passage
indique que le Bouddha Shakyamuni est apparu dans d'innombrables terres,
prenant diverses formes et adoptant des durées de vie différentes.
Et il établit que, parmi tous les sutras enseignés par le
Bouddha sous les diverses formes qu'il emprunta pour se manifester, le Sutra du Lotus tient la première place.
[...] Le fait est que le Sutra Vairocana* comprend chacune des quatre sortes
d'enseignement, et expose cette sorte de préceptes qui n'apportent
plus de bienfait lorsque la forme corporelle est arrivée à
sa fin. C'est un enseignement provisoire, désigné par des
maîtres chinois (note) comme entrant dans la catégorie Hodo*,
un groupe de sutras qui, selon la classification de Zhiyi*,
furent enseignés dans la troisième période. Quelle
honte que de le placer au-dessus du Sutra du Lotus ! Si
vous vous préoccupez vraiment de rechercher la Voie, vous devez
rapidement regretter vos erreurs passées ! Pour finir, ce sutra Myoho
Renge Kyo*,
résume en un seul moment de vie tous les enseignements et toutes
les pratiques de méditation du Bouddha Shakyamuni tout au long
de sa vie, et englobe tous les êtres vivants des dix
mondes-états et leurs environnements dans les trois
mille mondes.
[...] 2 De plus, si l'on s'efforce de faire comprendre la Voie
bouddhique, il est impossible d'en faire comprendre la signification
sans avoir recours à des mots et à des phrases. Bodhidharma arriva en Chine par l'ouest, pointa le doigt directement sur l'esprit
des hommes, et déclara que leur esprit était le Bouddha.
Mais on trouve ce principe déjà énoncé en
plusieurs endroits, dans des sutras
du Mahayana provisoire* antérieurs au Sutra
du Lotus, tels que les sutras Kegon*, Daijuku et Daihannya.
[...] 2 Mais j'aimerais
maintenant vous demander de fermer les yeux, de retrouver votre calme
et de réfléchir à la chose avec logique. Si, alors
qu'elle connaît la voie la meilleure, une personne voit ses parents
ou son souverain s'engager dans une voie mauvaise, peut-elle se dispenser
de leur faire des remontrances ?
[...] 2 On lit dans
un passage de sutra : "En renonçant à ses obligations
et en accédant au nirvana,
on peut véritablement s'acquitter pleinement de ses obligations."(réf.) Ainsi voyons-nous que ceux qui écartent tous les liens de reconnaissance
et d'amour en cette vie pour entrer dans la Véritable
voie bouddhique comprennent véritablement le sens de la reconnaissance.
[...] 2 Et bien que, au cours de ces nombreuses vies, j'aie versé, sur
ceux que j'aimais ou à qui étais redevable, plus de larmes
qu'il n'y a d'eau dans l'océan, je n'ai jamais versé une
seule larme en m'inquiétant de mon existence future. Je suis le
plus stupide des hommes stupides, un véritable insensé parmi
les insensés ! Quand bien même cela me coûterait
la vie, et au risque de perdre ce corps qui est mien, je décide
fermement, en donnant moins de poids à ma propre vie, d'entrer
dans la voie des enseignements du Bouddha, d'aider mon père et
ma mère à parvenir à l'Éveil et de me libérer
moi-même des chaînes de l'enfer. Je vous supplie de m'enseigner
précisément de quelle manière je dois procéder.
Comment faut-il pratiquer, si l'on a foi dans le Sutra du Lotus ? Des cinq pratiques, à
laquelle devrais-je me consacrer tout d'abord ? Je vous en prie,
instruisez-moi en détail de votre précieux enseignement !
[...] 2 Le sage répondit : - Je vois bien que votre aspiration à la Voie est très grande
et sincère. L'élément essentiel qui permit à
tous les bouddhas d'atteindre l'Éveil n'est autre que les cinq caractères
de Myoho Renge Kyo. C'est seulement grâce à ces cinq caractères
que le roi Dan abandonna son trône
précieux et atteignit la bodhéité, et que la fille
du Roi-Dragon quitta sa nature de reptile pour celle d'un bouddha.
[...] 2 Les six mille
feuilles (note) de commentaires par Zhiyi* et Zhanlan*,
comme des guirlandes de joyaux, et plusieurs rouleaux de commentaires
de Dao-Sui et Xing-man,
aussi précieux que leur pesant d'or, ne vont pas au-delà
de cet enseignement. Si vous craignez véritablement
le cycle de la vie et de la mort et aspirez au nirvana, si vous
persévérez dans votre foi et désirez ardemment entrer dans la Voie,
les souffrances du changement
et de l'impermanence ne deviendront
rien de plus que le rêve d'hier, et la bodhéité deviendra la réalité d'aujourd'hui. Si seulement vous récitez Namu Myoho Renge Kyo, quelle offense pourrait manquer d'être effacée ?
Conversation
entre un sage et un ignorant (1265
? à un samouraï ? )
Ainsi la
foi [shin] est l'élément fondamental pour entrer dans
la voie du Bouddha. Parmi les cinquante-deux
étapes de la pratique de bodhisattva,
les dix premières, celles
de la foi, sont essentielles et la première de ces dix étapes
consiste à faire surgir une croyance pure. Si la foi d'une personne
est pure, même si elle n'a aucune connaissance du bouddhisme ou
ne possède que des capacités médiocres, elle doit
être considérée comme une personne dont les vues
sont correctes. Tandis que, même s'il a quelque connaissance du
bouddhisme, celui qui n'a pas la foi est, en réalité,
semblable à ceux qui offensent le Dharma et aux icchantika.
Le Daimoku du Sutra
du Lotus (1266
à une femme d'Amatsu)
Toutefois,
si nous étudions de plus près le bouddhisme, nous voyons
qu'il y a des distinctions à établir entre Mahayana et Hinayana, enseignements
provisoires et définitifs,
ou entre divers enseignements en fonction de l'ordre dans lequel ils
ont été exposés. Ceux qui se trompent sur ces points
tomberont dans des conceptions erronées et même s'ils pratiquent
le bouddhisme, leur offense est plus grave que les dix
mauvaises actions ou les cinq
forfaits. C'est pourquoi ceux qui préfèrent au monde
profane la recherche de la Voie
bouddhique devraient avant tout bien comprendre [ces critères
d'évaluation]. Sinon, ils connaîtront le même sort
que le moine Kugan et d'autres
personnes ayant offensé le
Dharma. Comme il est dit dans le Sutra
du Nirvana : "Si l'on reste attaché à des
conceptions erronées, après la mort, on tombe immanquablement
dans l'enfer avici."
Réponse à
Hoshina Goro Taro (5
décembre 1267 à Hoshina)
Parce que c'est une erreur commise par beaucoup de
gens, j'ai étudié cette question très en détail.
J'ai exprimé ce que je pense à cet égard dans d'autres
écrits (note) dont j'aimerais que vous preniez connaissance. Et j'espère que
ceux qui recherchent la Voie se serviront du temps qu'ils ont en cette
vie pour étudier et transmettre la vérité aux autres.
[...] En utilisant les sutras comme un clair miroir
et en conservant comme outil de divination les principes de Zhiyi* et de Saicho*,
j'ai réfuté ces enseignements pendant ces dix-sept dernières
années, depuis la cinquième année de l'ère Kencho (1253) (note) jusqu'à maintenant,
la septième année de l'ère Bun'ei (1270). Et
il semble désormais évident que la propagation du Nembutsu au Japon a presque entièrement cessé. Même si, par
la bouche, certains n'ont pas cessé de psalmodier le Nembutsu,
je crois que, dans leur coeur, ils en sont venus à penser que
ce n'est pas la Voie qui leur permettra de se libérer du cycle
des souffrances de la vie et de la
mort.
[...] Mais quand les gens qui vivent de nos jours en ce
monde, ne pratiquant pas les Voies sacrées, veulent sculpter
ou peindre des images du Bouddha, ils préfèrent d'autres
bouddhas que Shakyamuni. Cela ne correspond ni aux voeux de ces autres
bouddhas à qui un culte sera rendu ni aux intentions du Bouddha
Shakyamuni lui-même. De plus, cela enfreint même les règles
de bienséance du monde profane.
[...] Moi, Nichiren, parmi les deux voies du bouddhisme,
exotérique et ésotérique, j'étais résolu
à adhérer à l'enseignement suprême, celui
qui nous permet de nous libérer le plus facilement du cycle des
souffrances de la vie et de la mort.
Par conséquent, j'ai étudié dans ses grandes lignes
l'enseignement secret du Shingon et je me suis interrogé sur ce destin de Shubhakarasimha*.
Mais personne ne m'a jamais donné de réponse satisfaisante
à la question que je posais plus haut. Si lui-même ne parvint
pas à échapper aux mauvaises
voies, comment, à notre époque, un seul des moines
du Shingon ou des laïcs qui n'ont pas fait plus d'un mudra
ou récité plus d'un mantra
dharani*,
pourrait-il espérer ne pas y tomber ?
[...]
Ceux qui de nos jours recherchent la Voie espèrent
sans aucun doute une meilleure existence dans leur vie prochaine. Pourtant,
ils rejettent le Sutra du Lotus et le Bouddha Shakyamuni, sans
manquer un seul instant de révérer le bouddha Amida et d'invoquer son nom. Est-ce la bonne façon d'agir ? Ils
donnent peut-être l'apparence de personnes de bien, mais je vois
mal comment on pourrait nier qu'ils abandonnent leur propre parent pour
s'allier à d'autres qui leur sont moins proches. Par contre,
une personne entièrement mauvaise qui ne s'est jamais engagée
dans la pratique du bouddhisme ne peut pas être accusée
de la faute d'abandonner le Bouddha Shakyamuni. Peut-être, si
les circonstances s'y prêtent, parviendra-t-elle un jour à
croire en l'enseignement du Bouddha.
Le savant maître
Chan-wou-wei (Kamakura, 1270 à
Joken-bo et Gijo-bo)
Mon but
premier, en étudiant, était de maîtriser les enseignements
bouddhiques, afin de pouvoir atteindre la bodhéité et
ainsi de sauver les personnes à qui je suis redevable. J'ai toujours
su que, sur la voie qui mène à la bodhéité,
il est inévitable de rencontrer de grandes épreuves, exigeant
d'être prêt à sacrifier sa vie ; c'est seulement alors
que l'on peut devenir bouddha. Et déjà, exactement comme
il est dit dans le Sutra, j'ai été insulté
et rabaissé, attaqué à coups de sabre et de bâton,
de cailloux et de tuiles, et exilé à plusieurs reprises (note). C'est
pourquoi je suis convaincu de lire le Sutra du Lotus avec tout
mon être. Ma foi n'en est que plus forte, et j'ai confiance en
mon existence future. Si je devais mourir, je sauverais certainement
aussi chacun d'entre vous.
L'exil de Sado (Echi,
octobre 1271, à un moine nommé Enjo-bo du temple Seicho-ji)
Le
Grand-maître* du Mont Hiei [Saicho*],
se rendit en Chine pour y apprendre le sens profond de cette phrase
du Sutra. "Seul" dans "n'ayant à l'esprit qu'un
seul désir" désigne l'unique voie pure* et "l'esprit"
indique tous les phénomènes. Le Grand-maître* Zhiyi* expliqua le caractère chinois "coeur" [ou "esprit"]
en disant qu'il consiste en quatre traits de pinceau représentant
la lune et trois étoiles et qu'il implique que le coeur des
hommes ordinaires est fondamentalement pur.
Lettre à Gijo-bo (Sado, mai 1273, à Gijo-bo)
Selon Zhiyi faisant allusion (note) aux temps actuels : « La dernière période de cinq cents ans recevra pleinement les bienfaits de la Voie merveilleuse». Saicho, parlant des temps actuels, a dit : «Les périodes du Dharma Correct et du Dharma Formel se sont progressivement écoulées, celle des Derniers jours du Dharma s'approche rapidement. » Ces derniers mots signifient que son temps n'était pas celui où le Sutra du Lotus devait se répandre.
[...] A l'époque du Dharma Final on enseigne tout ensemble le Mahayana et le Hinayana, les doctrines provisoire (gonkyo) et définitive (jikkyo), exotérique et ésotérique (mikkyo), mais on n'accède pas à la Voie; dans le Jambudvipa tout entier on dénigre le Dharma. Contre cette cause de discordance il n'est que le Sutra du Lotus du Dharma Merveilleux. Comme au chapitre du Bodhisattva Fukyo* (XX, Fukyo), mes disciples sont en condition concordante (jun-en); le Japon est en condition discordante (gyaku-en). (note)
Traité sur l'essentiel du Lotus (Minobu, le 29 juin 1274, à Toki Jonin)
Lorsque vous aurez
entendu cet enseignement, fortifiez toujours plus votre foi.
Ceux qui redoublent d'efforts dans leur pratique chaque fois qu'ils
entendent les enseignements du Sutra du Lotus recherchent véritablement
la Voie. Quand Zhiyi* parlait de "Tirer de l'indigo un bleu encore plus profond"(réf.),
il voulait dire que ce qui est teint avec de l'indigo devient plus bleu
que l'indigo lui-même. Pour nous, le Sutra du Lotus est
l'indigo et l'intensité croissante de notre pratique est d'"un
bleu encore plus profond."
Enfer
et bodhéité (Minobu, le 11 juillet 1274 à
la mère de Nanjo Tokimitsu)
"Si
une personne recherche la voie du Bouddha / et pendant toute la durée
d'un kalpa / [joint les mains en
(sa) présence et récite d'innombrables vers élogieux
/ ces éloges du Bouddha lui vaudront d'incommensurables bienfaits.]
Et ceux qui font l'éloge et défendent les pratiquants
de ce Sutra obtiendront une bonne
fortune encore plus grande."
[...] Un haut
dignitaire du nom de Jivaka, parce
qu'il était l'envoyé du Bouddha, pénétra dans les flammes et parvint à
sauver le fils de l'homme riche de Champa (note). A la
lumière de tout cela, il est clair que n'importe quel malfaiteur
ou n'importe quelle femme, en faisant des dons ou en rendant hommage
au Bouddha, ne serait-ce qu'une seule fois, peuvent sans aucun doute parvenir à la bodhéité et atteindre la Voie.
[...] Le Sutra
du Lotus offre à tous les êtres vivants le moyen secret
d'atteindre la bodhéité.
Il mène jusqu'à l'état de bouddha, une personne
dans le monde-état d'enfer,
dans le monde-état d'avidité,
ou dans chacun des neufs mondes-états de vie, ouvrant ainsi à tous les êtres vivants la voie
de la bodhéité. C'est comparable aux noeuds d'une tige
de bambou ; si l'on en brise un [la cassure suivant le sens des fibres]
tous les autres se brisent aussi.
[...] Il est
dit dans le Sutra du Lotus : "Nous faisons peu de
cas de notre corps ou de notre vie, notre seule préoccupation
est la Voie insurpassable."(réf.) Et dans le Sutra
du Nirvana : "[L'envoyé du Bouddha] doit transmettre
les mots de son souverain sans en omettre un seul, même au risque
de sa vie." Le Grand-maître* Guanding* commente cela ainsi : "Sans omettre un seul mot, même
au risque de sa vie" signifie que notre corps est de moindre importance
que le Dharma, qui est suprême. Il faut être prêt
à risquer sa vie pour propager le Dharma."(réf.)
Lettre à Horen (Minobu,
avril 1275 à Soya Kyoshin)
Pendant de nombreux kalpas, le bodhisattva Fukyo fut calomnié, ridiculisé,
attaqué à coups de canne et de bâton, de tuiles
et de pierres, uniquement parce qu'il pratiquait le Sutra du Lotus.
Mais par la suite, il renaquit sous la forme du Bouddha Shakyamuni.
Ainsi la voie qui mène à la bodhéité requiert des formes de pratique différentes en fonction du temps.
Lettre au nyudo
d'Ichinosawa (Minobu,
le 8 mai 1275, à l'épouse du nyudo d'Ichinosawa)
Celui qui veut s'engager
dans la voie bouddhique doit, avant tout, tenir compte du temps. Par
le passé, lorsque apparut le bouddha Daitsuchisho,
il resta pendant une période de dix kalpas
mineurs sans enseigner un seul sutra. A son propos, il est dit dans
le Sutra du Lotus : "Il demeura en méditation,
immobile, pendant plus de dix kalpas
mineurs." Et on lit encore : "Le Bouddha, sachant que
le temps n'était pas encore venu, bien qu'on lui demandât
d'enseigner, resta assis en silence."
[...] Parce que votre question est sincère, je vais vous citer
les quelques passages de commentaires. Zhiyi* a déclaré : "Dans la cinquième
période de cinq cents ans, la Voie
mystique se propagera pour longtemps dans l'avenir."(réf.) Zhanlan* a dit : "Le début des Derniers
jours du Dharma ne sera pas sans bienfaits inapparents (myoyaku)."(réf.)
[...] Ceux qui
sont décidés à trouver la Voie devraient se souvenir
de ces exemples et s'en réjouir. Lorsqu'on se préoccupe
de sa vie prochaine, il vaut mieux être une personne ordinaire
à l'époque des Derniers
jours du Dharma que grand roi au cours des deux mille ans des époques du Dharma
correct et du Dharma formel. Pourquoi les gens n'en sont-ils pas
convaincus ? Il vaut mieux être un lépreux qui récite Namu Myoho Renge Kyo que le Grand-patriarche de l'école Tendai ! Comme l'empereur Liang Wu Di (502
- 557) en prit l'engagement solennel (note) : "Je préférerais être Devadatta
et tomber dans l'enfer avici que
le sage non bouddhiste Udraka Ramaputra."
[...] Le bouddhisme se scinda ainsi en dix branches distinctes que l'on appelle
les trois écoles de la Chine
du Sud et les sept écoles de la Chine du Nord. Les écoles
du Sud divisaient respectivement les enseignements du Bouddha en trois
périodes, quatre périodes et cinq périodes ; tandis
qu'au Nord on trouvait l'école des cinq périodes ; l'école
des deux enseignements qui distingue entre formulation complète
et formulation incomplète ; l'école des quatre enseignements ; l'école des cinq enseignements ; l'école des six enseignements ; l'école qui divise le Mahayana en deux catégories ; et enfin, l'école de "la voie
unique".
[...] Le coeur
de cet enseignement de l'école Hosso réside dans l'affirmation que le bouddhisme doit tenir compte
des capacités de ceux à qui il s'adresse. Si les gens
ont la capacité de comprendre la doctrine du Véhicule
unique, la doctrine des trois
véhicules ne doit être qu'un moyen de les instruire
et la doctrine du Véhicule unique est la seule voie véritable qui puisse les conduire à l'Éveil. Autrement dit à ce
genre de personnes, le Sutra du Lotus doit être enseigné.
Mais s'ils ont la capacité de comprendre la doctrine des trois
véhicules, celle du Véhicule unique n'est qu'un moyen
de les instruire et la doctrine des trois
véhicules est la seule voie véritable qui puisse les
conduire à l'Éveil. A ce genre de personnes, les sutras Jimmitsu* et Shrimala devraient
être enseignés. Selon les tenants de l'école Hosso,
c'est là un principe que le sage Zhiyi* n'a
pas compris.
[...] Parmi les
divers enseignements du bouddha, le Sutra Daijuku ne représente
rien de plus qu'une exposition des principes du Mahayana
provisoire*.
Pour ce qui est d'enseigner la voie qui libère des souffrances
de la naissance et de la mort,
il appartient à la période où le Bouddha n'a "pas
encore révélé la vérité" (note) et ne peut donc pas conduire à l'Éveil ceux qui n'ont
jamais formé de lien par le passé avec le Sutra du
Lotus. Pourtant, en ce qui concerne les six
voies, les quatre formes de
naissance et les trois phases de la vie, tout ce qu'il énonce est exact et sans la moindre
erreur.
[...] La finalité des
enseignements du Bouddha y est totalement expliquée, sans qu'un
seul point reste obscur. Cela indique que cette école [Tendai]
est supérieure à toutes les autres écoles, car
elle offre une voie unique [que tout le monde peut emprunter]. Les principes
qu'elle enseigne sont profonds et mystiques, et nous, qui sommes les
disciples des sept grands temples et des six écoles, n'avons
jamais rien vu ni entendu de pareil.
[...] 2 Considérons d'abord l'école Jodo ou Nembutsu. En Chine, sous la dynastie
Qi, vécut un Maître
du Dharma du nom de Tanluan.
A l'origine, il était moine de l'école Sanron,
mais, après avoir lu le Jujubibasha Ron de Nagarjuna,
il accepta la distinction entre la Voie
de la pratique difficile et Voie de la pratique facile. Plus tard
sous la dynastie Tang vécut
celui que l'on appela le Maître
de méditation, Daochuo.
A l'origine, il donnait des cours sur le Sutra
du Nirvana mais lorsqu'il lut le récit fait par Tanluan de sa conversion à l'école Jodo [ou enseignement de la Terre pure], Daochuo abandonna le Sutra
du Nirvana et se convertit lui aussi à la doctrine de
la Terre pure, classant les enseignements
en deux catégories, ceux de la Voie
sacrée et ceux de la Terre
pure (note).
De plus Daochuo eut un disciple
du nom de Shandao qui définit
deux sortes de pratique religieuse, la pratique correcte et la pratique
incorrecte.
[...] 2 Les petites
rivières se rassemblent pour former le grand océan et
de minuscules grains de poussière s'accumulent pour former un Mont Sumeru. Quand moi, Nichiren,
j'ai commencé à croire dans le Sutra du Lotus,
je n'étais, dans tout le Japon, qu'une goutte d'eau ou un grain
de poussière. Mais par la suite quand deux personnes, trois,
dix, cent, mille, dix mille, et un jour dix milliards de personnes en
viendront à réciter le Sutra du Lotus et à
l'enseigner aux autres, elles formeront le Mont Sumeru de l'Éveil merveilleux (myogaku) et le grand océan
du nirvana. Ne cherchez nulle
part ailleurs la voie qui mène à la bodhéité !
[...] 2 Par contre,
si de simples mortels, vivant à l'époque mauvaise des Derniers jours du Dharma, n'observant
même pas les préceptes et passant pour des icchantika sont convaincus, comme l'enseigne le Sutra, que le Sutra
du Lotus, qui surpasse tous les sutras enseignés avant,
en même temps et après lui, est la seule voie qui conduise
à la bodhéité, de telles personnes, même
sans une once de compréhension, sont cent fois, mille fois, dix
milliards de fois supérieures à tous ces grands sages.
[...] 2 Nous lisons dans le Sutra du Lotus un passage qui
dit : "Nous ne sommes pas avares de notre vie. Nous lui préférons
la Voie suprême."(réf.) Et dans le Sutra du Nirvana : "Par exemple, si un émissaire, doué d'éloquence
et habile diplomate, est envoyé par son roi à l'étranger
pour y accomplir une mission, il doit transmettre le message de son
souverain sans en omettre un seul mot, même au risque de sa vie.
Un sage devrait agir ainsi lorsqu'il enseigne le bouddhisme. Parmi les
simples mortels, il doit, prêt à donner sa vie, exposer
sans défaillance l'enseignement
secret (zuitai, himitsu) de l'Ainsi-Venu contenu dans les sutras du Mahayana,
c'est-à-dire révéler que tous les simples mortels
possèdent l'état de Bouddha." Mais dans quelles circonstances
faut-il pratiquer au risque même de sa vie ? J'aimerais que
vous l'expliquiez de manière plus précise.
[...] 2 Lorsque je ne faisais que débuter dans la voie bouddhique,
je pensais que la phrase "sans ménager sa vie" signifiait
voyager jusqu'en Chine sur l'ordre de l'empereur comme le firent Saicho*, Kukai*, Ennin* et Enchin. Ou aller de Chine jusqu'en
Inde, comme le fit Xuanzang en mourant six fois. Ou je pensais que cela signifiait sacrifier sa
vie comme le fit Sessen Doji pour connaître la seconde partie d'un verset, ou se brûler
les coudes en offrande] pendant soixante-douze mille ans, comme le fit
le bodhisattva Yakuo. Mais si l'on
examine attentivement les passages du Sutra, il ne s'agit pas
de cela.
Le choix en
fonction du temps (Minobu, 10 juin 1275
; adressé à Yui)
Si une personne
permet aux autres de s'éveiller à un tel enseignement
et d'avoir foi en lui, il est leur
père et leur mère, ainsi qu'un bon
ami bouddhique. C'est une personne de sagesse. Après la disparition
du Bouddha, en corrigeant les conceptions erronées et les théories
nuisibles, elle permet aux autres d'entrer dans la Véritable
voie, manifestant elle-même une foi pure dans les Trois
trésors, et commettant des actes méritoires qui conduisent
àl'Éveil."
La question
à approfondir jour et nuit (Minobu,
28 août 1275 ? , Toki Jonin)
Les femmes
sont parfois craintives, et vos épouses ont probablement abandonné.
Mais, en ce qui vous concerne, vous devez serrer les dents et ne jamais
faiblir dans votre foi (note).
N'ayez pas plus de crainte que Nichiren face à Hei
no Saemon. Bien qu'ils n'aient pas choisi la voie de l'Éveil,
les fils des seigneurs Wada et Wakasa, tout comme les guerriers
commandés par Masadako et Sadato combattirent jusqu'à
la mort pour préserver leur honneur. La mort survient pour
tous, même lorsque rien de malencontreux ne se produit. Vous
ne devriez donc jamais être lâches ni vous exposer au
ridicule.
Pourquoi
nous lamenter, quand nous savons de façon certaine que nous atteindrons
la bodhéité ? A quoi sert, en définitive, de naître impératrice,
ou de renaître dans un monde céleste ? Vous emprunterez plutôt la même Voie que la fille
du Roi-Dragon et serez au même rang que la nonne Mahaprajapati.
Que c'est merveilleux ! Que c'est merveilleux !
L'arc et la flèche (Minobu,
27 mars 1276 à Toki-ama-Gozen)
Il y a
bien longtemps, dans les montagnes de l'Himalaya, vivait un jeune homme
du nom de Sessen Doji. Il
se nourrissait de racines et de baies, allait, vêtu d'une peau
de daim, et pratiquait en silence la Voie. En observant avec attention
le monde, Sessen Doji constata
que rien n'est immuable et que tout ce qui naît est un jour destiné à mourir.
Il comprit que ce monde est aussi fugace qu'un éclair, aussi
évanescent que la rosée sous le soleil du matin, aussi
éphémère que la flamme d'une lanterne dans le vent,
ou aussi fragile que les feuilles de basho.
[...] Les hommes vivent dans l'incertitude, sans connaître le moment
de leur mort, dans le monde de l'impermanence. Et pourtant, ils ne se
préoccupent, jour et nuit, que des profits qu'ils peuvent accumuler
dans cette vie. Du matin au soir, ils ne pensent qu'à ce monde-ci,
ne respectent pas le Bouddha et ne croient pas dans le Dharma. Ils ne
pratiquent pas la Voie et, manquant de sagesse, ils perdent leur temps
dans l'oisiveté. Aussi, quand ils se présenteront devant Yama (Emma), quelles provisions
auront-ils apportées pour entreprendre la longue marche qui les
conduira à travers le monde des trois
plans ?
[...] Taishaku,
qui observait Sessen Doji du haut du ciel, pensa : "Il y a quantité de petits poissons
mais bien peu deviennent grands. Le manguier fleurit abondamment mais
rares sont les fleurs qui donnent des fruits. Il en va de même
chez les hommes : beaucoup ont le désir de parvenir à l'Éveil mais rares sont ceux qui persévèrent sans jamais reculer
et entrent réellement dans la Voie correcte.
[...] Il est
dit dans l'enseignement théorique* du Sutra du Lotus : "Nous ne sommes pas avares de notre
vie, seule est précieuse pour nous la Voie
suprême."(réf.) Il est dit dans l'enseignement
essentiel* du Sutra du Lotus : "Ils ne donnent pas leur vie
à contrecoeur."(réf.) On lit dans le Sutra : "Le corps est de moins d'importance que le Dharma
qui est suprême.
[...] Persévérez dans votre pratique, sans
jamais l'abandonner, jusqu'au dernier instant de votre vie. Et quand
viendra le temps de monter au sommet de l'Éveil merveilleux,
en regardant partout autour de vous, quelle joie sera la vôtre
de découvrir que l'univers entier est une Terre
de Bouddha éternellement illuminée ! Le sol sera
en lapis-lazuli, les huit Nobles
Voies seront indiquées par des cordes d'or, et du ciel pleuvront quatre sortes de fleurs. La musique
retentira à travers les airs.
Les quatorze oppositions (Minobu,
fin 1276, au nyudo Matsuno Rokuro Zaemon)
Si Nichiren n'était pas là, quelle chance aurais-tu
de tenir la promesse que tu as faite au Bouddha ? En me voyant
dans cette situation, ne devrais-tu pas te précipiter joyeusement
au secours du Pratiquant du Sutra du Lotus, et honorer ainsi
ton serment ? Que fais-tu donc ? Je m'étonne que
tu n'aies pas encore réagi. Si rien n'est fait pour ramener ce
pays dans la voie de la justice, je ne retournerai jamais à Kamakura.
Si tu n'as pas l'intention de faire quoi que ce soit pour moi, pourquoi
continues-tu à briller avec une telle insouciance ?
[...] Je suis le
seul à avoir vécu la phrase du Sutra qui dit : "Nous [les pratiquants du Sutra du Lotus] seront exilés
bien des fois." Dans le Sutra du Lotus, le Bouddha promet
que toute personne qui croira ne serait-ce qu'en une seule phrase ou
une strophe de ce Sutra deviendra bouddha.
Ainsi, cela ne fait aucun doute, j'ai suivi la voie correcte qui mène
à la sagesse suprême et ultime du Bouddha.
Sur le comportement
du Bouddha (Minobu,
1276, à Konichi-ama)
Un passage du Sutra du Lotus enseigne "difficile
à croire et difficile à comprendre". Nombreux sont
ceux qui entendent ce sutra et y adhèrent. Rares sont ceux qui
ne l'oublient pas lorsque les grandes difficultés surviennent,
montrant qu'ils l'ont véritablement entendu et reçu. Recevoir
est facile, garder est difficile. Cependant, devenir bouddha repose sur
le fait de garder. Celui qui désire garder ce sutra doit le garder
en sachant qu'il rencontrera des difficultés. "Obtenir
rapidement la Voie du bouddha sans égale" est alors hors
de doute. Invoquer Namu Myohorengekyo,
qui est la grande affaire de tous les bouddhas des trois
phases s'appelle garder. Dans le Sutra il est dit : "Nous
protégerons et garderons ce que l’Éveillé nous a confié"(réf.).
Le Grand-maître* Zhiyi* commente : "On reçoit grâce à la force de
la foi et on garde grâce à la force de l'invocation".
Il déclare encore : "Ce sutra est difficile à
garder. Celui qui le garde, ne serait-ce qu'un moment, me réjouira
et réjouira tous les bouddhas".
Réponse
aux disciples (Minobu
le 21 mars 1278, aux croyants vivant à Kamakura)
Je suivrai
la voie de Sessen Doji et
vivrai comme le fit le bodhisattva Fukyo.
Lorsque l'on pense à des vies comme les leurs ne serait-il pas
indigne et regrettable de mourir emporté par une épidémie,
ou simplement, de vieillesse !
Réponse à
un croyant (Minobu,
avril 1278 ; peut-être à Shijo Kingo)
Les sages et les
personnes de vertu ne se lassent pas de répéter qu'ils
ont la vérité et sont supérieurs aux autres, qu'ils
sont les héritiers d'un certain fondateur et que chacun dans
son domaine, fait autorité. Ils accordent une énorme importance
à leur renommée, à leurs profits personnels, et
n'éprouvent guère le désir de rechercher avec sérieux
la Voie.
Enseignement correspondant
à l'esprit du Bouddha (Minobu,
le 2 mai 1279, à Niike Saemon-no-jo)
On
lit dans un passage du septième
chapitre du Sutra du Lotus : "Notre
voeu est que, par ces mérites / universellement à tous
propagés, / nous-mêmes et les êtres / réalisions
tous ensemble la voie de bouddha"
La porte du dragon (Minobu,
6 novembre 1279 à Nanjo Tokimitsu)
Il faut
parler, sans crainte de qui que ce soit, pas même des autorités,
et appliquer ainsi le passage du Sutra dans lequel il est dit
: "Nous faisons peu de cas de notre corps ou de notre vie et nous
nous préoccupons seulement de la voie qu'aucune autre ne surpasse."(réf.)
[...] C'est
pour cela que le roi Sen'yo* fit exécuter cinq cents maîtres brahmanes,
que le moine Kakutoku fit mettre
à mort d'innombrables opposants
au Dharma correct, et que le grand roi Ashoka condamna à mort 108000 non bouddhistes. Ces rois étaient
considérés comme les plus valeureux de tout le Jambudvipa,
et ce moine comme le plus sage parmi ceux observant les préceptes.
Le roi Sen'yo renaquit par
la suite sous la forme du Bouddha Shakyamuni ; le moine Kakutoku sous celle du bouddha Kashyapa,
et le grand roi Ashoka fut reconnu comme ayant atteint la Voie.
[...] Si vous voulez
aussi échapper aux conséquences funestes dues au fait
de vivre dans un pays dont les habitants s'opposent au Dharma, vous
devez présenter des remontrances au souverain, même si
cela peut vous valoir la condamnation à mort ou l'exil. "Nous
faisons peu de cas de notre corps ou de notre vie et nous nous préoccupons
seulement de la Voie qu'aucune autre ne surpasse", est-il écrit
dans le Sutra du Lotus. Et le commentaire [de Cien*]
ajoute : "Notre corps est de moindre poids que le Dharma qui est suprême. Il faut être prêt à donner
sa vie si l'on veut propager le Dharma."(réf.)
Lettre à
Akimoto (Minobu,
le 27 janvier 1280, à Akimo to)
Le vénérable Maudgalyayana sauva sa
mère du monde de l'avidité,
mais il ne put la conduire que jusqu'aux mondes des hommes et du ciel, sans pouvoir la mettre
sur la voie qui mène à la bodhéité.
Le Bouddha Shakyamuni, à l'âge de trente ans, enseigna
le Dharma à son père,
le roi Shuddhodana, lui permettant
ainsi de parvenir à la plus haute des quatre
étapes de l'Éveil. Et à l'âge de trente-huit
ans, il permit à sa mère, la reine Maya,
d'accéder au stade d'arhat.
En apparence, un tel comportement semble respectueux de la piété
filiale, mais en réalité le Bouddha fut coupable de manquement
à la piété filiale. Il libéra bien ses parents
des six premières voies,
mais il les entraîna sur une voie qui ne leur permettrait jamais
d'atteindre la bodhéité (note). C'était comme rabaisser
un prince héritier au rang de simple roturier ou marier une princesse
royale à un homme de basse condition.
Fidélité
ou manquement au devoir de piété filiale (Minobu,
le 8 mars 1280, à Nanjo Tokimitsu)
Il est dit dans le Sutra
Shrimala : "Le Bouddha permet aux simples mortels qui
n'ont pratiqué que des enseignements non bouddhiques de créer
de bonnes causes qui les conduiront vers les mondes
des hommes et du ciel ; à
ceux qui recherchent la voie de
l'étude, le Bouddha enseigne le véhicule qui mène
à cet état ; à ceux qui recherchent la voie
de l'Éveil personnel, il révèle le véhicule
qui mène à cet état ; et à ceux qui recherchent
la voie du Mahayana, il enseigne
cette voie." Cette affirmation décrit le principe de zuitai
[enseigner selon les capacités], celui des enseignements faciles
à croire et faciles à comprendre. Les sutras Kegon*, Vairocana*, Hannya*, Nirvana et divers
autres sutras entrent dans cette catégorie.
[...] Il est dit dans le Sutra
Shrimala : "Le Bouddha permet aux simples mortels qui
n'ont pratiqué que des enseignements non bouddhiques de créer
de bonnes causes qui les conduiront vers les mondes
des hommes et du ciel ; à
ceux qui recherchent la voie de
l'étude, le Bouddha enseigne le véhicule qui mène
à cet état ; à ceux qui recherchent la voie
de l'Éveil personnel, il révèle le véhicule
qui mène à cet état ; et à ceux qui recherchent
la voie du Mahayana, il enseigne
cette voie." Cette affirmation décrit le principe de zuitai
[enseigner selon les capacités], celui des enseignements faciles
à croire et faciles à comprendre. Les sutras Kegon*, Vairocana*, Hannya*, Nirvana et divers
autres sutras entrent dans cette catégorie.
[...] Il est dit [dans le Sutra du Lotus] : "A ce moment-là,
répondant à une question du bodhisattva Yakuo,
l'Honoré du monde s'adressa
aux quatre-vingt mille grands bodhisattvas
désireux d'entendre le Dharma : "Yakuo,
au sein de cette multitude de divinités, rois-dragons, yaksha, gandharvas*, garudas*, kimnaras*, mahoraga, parmi ces innombrables
êtres, humains comme non humains,
moines et nonnes, laïcs, hommes et femmes, distingues-tu ceux qui
recherchent l'état d'auditeur, ceux qui recherchent l'état
de pratyekabuddha, et ceux qui
recherchent la voie du Bouddha ?
Comparaison
du Sutra du Lotus avec les autres sutras (Minobu,
le 26 mai 1280 à Toki Jonin)
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