Résumé : En
720 - Shan-wu-wei (Shubhakarasimha)
arrive en Chine venant de l'Inde en même temps que Vajrabodhi
(Jin-gang-zhi)
et Amoghavajra (Bukong).
Ils apportent avec eux les sutra Vairocana,
Kongocho et
Soshitsuji, et
fondent l'école Shingon.
Citations par ordre chronologique :
Le Sutra
du Lotus contient deux principes importants (note), dont les écoles Kusha, Jojitsu, Ritsu, Hosso et Sanron ne connaissent rien, pas même le nom. Par contre, les écoles Kegon et Shingon se sont sournoisement emparées de ces principes pour en faire le
coeur de leurs propres enseignements. Le principe d'ichinen
sanzen ne se trouve que dans l'enseignement
essentiel* du Sutra du Lotus, caché dans les profondeurs du chapitre Juryo* (XVI).
[...] Dès l'origine, les écoles Kegon et Shingon furent toutes deux des écoles provisoires basées sur des
sutras provisoires. Mais Shubhakarasimha* et Vajrabodhi*,
qui introduisirent les enseignements ésotériques en Chine,
s'approprièrent le principe d'ichinen
sanzen de Zhiyi,
pour en faire le coeur des enseignements de leur école, tout en
y ajoutant la pratique de mudra et
de mantra dharani* et prétendirent que leurs enseignements surpassaient ceux de Zhiyi.
De sorte que ceux qui étudiaient le bouddhisme, ignorant les faits
réels, en vinrent à croire que le principe d'ichinen
sanzen se trouvait déjà
dans le Sutra Vairocana* tel qu'il
était parvenu d'Inde.
[...] Quand le Grand-maître Saicho apparut au Japon, il ne se
contenta pas d'exposer les erreurs des Six écoles de Nara mais
établit clairement que l'école Shingon avait volé les principes du Sutra du Lotus exposés
par Zhiyi pour en faire l'essentiel
de sa propre doctrine.
[...] Par la suite, cependant,
les conditions du monde se détériorèrent et la sagesse
des hommes devint de plus en plus superficielle. Ils n'étudiaient
ni ne comprenaient plus les principes profonds de l'école Tendai,
et les autres écoles s'attachèrent de plus en plus étroitement
à leurs idées préconçues. Finalement, les
Six écoles de Nara et l'école Shingon se retournèrent contre l'école Tendai et l'attaquèrent. Cette dernière, s'affaiblissant toujours
plus, se retrouva en position d'infériorité. Pour aggraver
la situation, de nouvelles écoles insensées telles que le Zen et le Jodo apparurent et s'attaquèrent elles aussi à l'école Tendai, un nombre croissant d'adeptes
laïques se convertissant à leurs doctrines erronées.
Au bout du compte, même les moines considérés comme
les maîtres les plus éminents de l'école Tendai s'avouèrent vaincus et prêtèrent leur soutien aux
écoles erronées. Non seulement l'école Tendai,
mais aussi l'école Shingon et les six écoles de Nara
furent contraintes de céder leurs terres et leurs domaines aux
nouvelles écoles erronées, et le Dharma correct ne fut plus
propagé.
[...] Par ailleurs, les écoles Kegon et Shingon sont d'un niveau incomparablement plus élevé que les écoles Hosso et Sanron.
Elles prétendent que la possibilité pour les personnes des deux véhicules d'atteindre
la bodhéité, et la révélation du fait que
le Bouddha atteignit l'Éveil il y a d'innombrables kalpas sont énoncées non seulement dans le Sutra du Lotus,
mais également dans les sutras Kegon* et Vairocana*.
[...] Selon les tenants de ces écoles, les patriarches du Kegon, Dushun, Zhiyan, Fa-zang et Cheng-guan et les maîtres du Shingon, Shubhakarasimha*, Vajrabodhi* et Amoghavajra* étaient supérieurs
à Zhiyi ou Saicho.
Mieux encore, ils prétendent que les enseignements de Shubhakarasimha*.
[...] Les quatre écoles Kegon, Shingon, Sanron, et Hosso sont toutes des écoles du Mahayana.
Parmi elles, les écoles Hosso et Sanron vénèrent
un bouddha sous l'aspect du Corps manifesté supérieur (note). C'est comme si un prince héritier,
prétendant légitime à la couronne, prenait son père
pour un simple guerrier. Les écoles Kegon et Shingon rabaissent le Bouddha Shakyamuni et affirment que c'est le bouddha Mahavairocana [Vairocana] qui doit être
le véritable objet de vénération.
[...] Les sutras qui forment la base des écoles Shingon et Kegon ne contiennent même
pas les termes "ensemencement",
"maturation" et "récolte", encore moins les
principes [de l'ensemencement des graines de la bodhéité,
de la maturation de ces graines, et finalement de l'atteinte de la bodhéité]
auxquels ces termes se réfèrent. Lorsque les sutras des
écoles Kegon et Shingon affirment qu'il suffit de croire en leur enseignement pour entrer dans
la première* des dix étapes de développement* et atteindre la bodhéité
sans changer d'apparence, ils ne s'appuient que sur les enseignements
des sutras provisoires, enseignements qui voilent le passé.
[...] Le Sutra Vairocana* de l'école Shingon ne fait aucune allusion au fait que les personnes des deux
véhicules peuvent atteindre la bodhéité et que
le Bouddha Shakyamuni atteignit l'Éveil dans le passé illimité,
ou encore au principe d'ichinen
sanzen. Mais, après
son voyage en Chine, Shubhakarasimha* eut l'occasion de lire le Maka
Shikan de Zhiyi et en retira
sagesse et compréhension. Il s'appropria alors le principe d'ichinen
sanzen, l'utilisant pour interpréter les passages du Sutra Vairocana* sur "la
réalité de l'esprit" ou celui qui dit "Je [Vairocana]
suis la source et le commencement de toutes choses", pour en faire
le cœur des enseignements Shingon mais en y ajoutant la pratique des mudra et des mantra dharani*.
Et en comparant les mérites respectifs du Sutra du Lotus et du Sutra Vairocana*, il déclara
que si tous deux sont égaux d'un point de vue théorique,
le dernier est supérieur du point de vue de la pratique. Les mandala
des deux mondes symbolisent l'atteinte de la bodhéité
par les personnes des deux véhicules ainsi que l'implication mutuelle des dix mondes-états,
mais peut-on trouver ces principes où que ce soit dans le Sutra
Vairocana* ? Ceux
qui l'affirment sont coupables de la plus grossière tromperie ! [...] Shubhakarasimha*, Vajrabodhi* et Amoghavajra* de l'école Shingon ont dit que le Sutra Vairocana* et le Sutra
du Lotus étaient identiques en théorie et appartenaient
tous deux à la catégorie des "Six actions difficiles".
Mais Kukai*,
[le maître de l'école Shingon]
au Japon, a dit : "Le Sutra
Vairocana* ne rentre
ni dans la catégorie des Six actions difficiles ni dans celle des
Neuf actes aisés. Il est différent de tous les sutras enseignés
par Shakyamuni, puisqu'il fut prêché par le bouddha Vairocana*,
bouddha sous l'aspect du Corps du Dharma*."
[...] Le chemin vers
la bodhéité ne peut pas se trouver dans la doctrine du Kegon qui prétend que l'esprit
est la seule réalité, dans les huit
négations de l'école Sanron,
dans le principe du "Rien-que-Conscience"
de l'école Hosso, ni dans
cette sorte de méditation préconisée par le Shingon sur les cinq éléments universels. Seul le principe du Tendai, ichinen sanzen, est le chemin
qui mène à la bodhéité. Et, même ce
principe d'ichinen
sanzen, ni notre sagesse ni notre intelligence ne nous permettent
de le saisir pleinement. Pourtant, parmi tous les sutras enseignés
par le Bouddha de son vivant, seul le Sutra du Lotus contient
ce joyau, le principe d'ichinen
sanzen.
[...] Maintenant que
les autorités m'ont condamné à l'exil, les moines
des écoles Tendai et Shingon se réjouissent sans doute. Ce sont des hommes cruels et monstrueux.
Traité
pour ouvrir les yeux (Sado,
février 1272 à Shijo Kingo)
Le Savant-maître Shubhakarasimha* arriva en Chine venant d'un pays de l'Ouest, l'Inde, et dans la huitième
année de la même ère (720), les savants maîtres Vajrabodhi* et Amoghavajra* vinrent eux aussi d'Inde en Chine. Ils apportèrent avec eux
les sutras Vairocana*, Kongocho* et Soshitsuji*,
et fondèrent l'école Shingon.
Cette école divise les enseignements bouddhiques en deux catégories
: les enseignements exotériques de Shakyamuni, exposés dans
les sutras Kegon*,
dans le Sutra du Lotus et dans divers autres sutras, et les enseignements
ésotériques de Vairocana,
exposés dans le Sutra
Vairocana* et divers
autres sutras. Le Sutra du Lotus est le plus élevé
des enseignements exotériques. Mais, même si ses principes
essentiels [selon l'école Shingon]
ressemblent à ceux de l'enseignement ésotérique du Sutra Vairocana*, parce que
l'on n'y trouve pas la moindre allusion à la pratique des mudra et des mantra dharani*,
ni aux Trois mystères,
il est considéré comme "un enseignement incomplet".
[...] Ainsi, toutes ces écoles citées plus haut, Hosso, Kegon et Shingon,
se sont attaquées à l'école Tendai et aux enseignements du Sutra du Lotus. Mais, peut-être
parce les adeptes de l'école Tendai n'avaient pas la sagesse de leur maître, tout en sachant que ces
autres doctrines n'étaient pas fondées, aucun d'eux ne proposa
de les réfuter dans un débat public, comme Zhiyi l'avait fait.
[...] Le Grand-maître
[Saicho] savait parfaitement laquelle
des deux écoles nouvellement introduites de Chine au Japon, Tendai ou Shingon,
était supérieure à l'autre. Mais il ne le démontra
pas au cours d'un débat public comme il l'avait fait pour établir
la supériorité du Tendai sur les six écoles plus anciennes.
Pour cette raison peut-être, après la disparition du Grand-maître Saicho, les moines du To-ji,
des sept temples de Nara, du Onjo-ji aussi bien que des autres temples du Japon tout entier proclamèrent
l'école Shingon supérieure à l'école Tendai,
et tous, des personnes du plus haut rang jusqu'à celles dont la
condition était la plus modeste, en furent persuadés.
[...] Une personne qui propage le Sutra du Lotus est le père
et la mère de tous les habitants du Japon. Car, comme l'a dit le
Grand-maître Guanding* : "Permettre à quelqu'un qui offense le Dharma de se libérer
du mal, c'est remplir à son égard la fonction de parent."
Par conséquent, moi, Nichiren, je suis le père et la mère
de l'actuel empereur, le maître et le seigneur des adeptes du Nembutsu,
du Zen et des moines du Shingon.
[...] Ce traité [Bodaishin Ron] ne prend pas en compte
tous les enseignements de Shakyamuni et il comprend de nombreuses affirmations
inexactes. A commencer par la phrase qui prétend que : "Seul
l'enseignement du Shingon peut conduire à la bodhéité." C'est une erreur,
puisque cela nie la possibilité d'atteindre la bodhéité sans changer d'apparence grâce aux enseignements du Sutra du
Lotus, un fait largement établi par les preuves scripturales
aussi bien que par des événements concrets. (...). Le mot
"seul" dans l'affirmation que seul l'enseignement du Shingon peut conduire à la bodhéité est de toutes l'erreur
la plus grave.
[...] Amoghavajra* vola les préceptes du Mahayana de l'école Tendai, et,
appuyé par un décret de l'empereur Taizong,
les instaura dans les cinq temples du Mont Wu-tai. Il déclara aussi
que, pour classifier les enseignements, l'école Shingon devrait emprunter elle-aussi la classification utilisée par l'école Tendai. De manière générale,
il multiplia les falsifications. Les traductions des sutras ou des traités
faits par d'autres sont peut-être utilisables mais celles de Amoghavajra* ne sont absolument pas fiables.
[...] Un récit a été
fait de la manière dont Amoghavajra*,
de l'école Shingon,
et son disciple Hanguang, abandonnèrent
l'enseignement de l'école Shingon pour devenir des disciples du Grand-maître Zhiyi.
"On lit dans le Koso Den [Biographies de moines éminents]
: "Quand [Hanguang], en compagnie de Amoghavajra*,
voyageait en Inde, un moine lui posa la question : "En Chine, il
y a les enseignements de Zhiyi qui
permettent de faire la distinction entre ce qui est erroné de ce
qui est correct, et d'élucider la différence entre les enseignements
incomplets et parfaits. Ne serait-il pas bon de les traduire pour les
propager dans ce pays ? " Cette histoire a été
relatée par Hanguang au Grand-maître Zhanlan
[...] L'école Shingon forme une catégorie à part. Elle bénéficie
du soutien des temples du Mont Hiei,
des sept temples de Nara, du To-ji,
du Honjo-ji et de leurs patriarches,
y compris le supérieur du Mont Hiei, Omuro, le supérieur
du Honjo-ji et les administrateurs des divers temples et sanctuaires. (note) Depuis que le miroir sacré (note) conservé au palais impérial a été détruit
par le feu, on a considéré que le précieux mudra
du bouddha Vairocana*,
miroir du Bouddha, devait le remplacer pour l'empereur ; et puisque
le sabre précieux avait sombré dans la mer de l'ouest, (note) on a cru que les cinq grands Honorés avaient le pouvoir de vaincre les ennemis du Japon. Ces croyances semblent
si profondément enracinées que la pierre dont l'usure correspond
à un kalpa (note) pourrait être totalement érodée, et la terre immense
pourrait basculer sans que quiconque les mette en doute.
Quand le Grand-maître Zhiyi réfuta publiquement les maîtres des autres écoles
du Sud et du Nord, ces enseignements du Shingon n'avaient pas encore été introduits en Chine ; et, lorsque
le Grand-maître Saicho vainquit
les maîtres des Six Écoles au Japon, il ne fut plus question de
la doctrine Shingon.
A plusieurs reprises le Shingon évita la confrontation avec ses puissants ennemis, et réussit
à supplanter et mettre en danger le Grand Dharma du Sutra du
Lotus. De plus, Ennin*,
disciple du Grand-maître Saicho,
alla jusqu'à adopter l'enseignement de cette école [Shingon],
et à l'introduire au Mont Hiei,
obscurcissant ainsi les principes du Tendai et livrant l'école tout entière à l'influence du Shingon.
Mais qui pouvait s'opposer ouvertement à un personnage aussi écouté
que Ennin* ? Ainsi, en bénéficiant de préjugés favorables,
l'enseignement erroné de Kukai* n'a jamais été réfuté. Le moine Annen formula bien quelques réserves à l'égard de Kukai,
mais il se contenta de remplacer l'école Kegon par celle du Sutra du Lotus, à la deuxième place,
dans son classement par ordre d'importance ; il considéra toujours
le Sutra du Lotus comme inférieur au Sutra
Vairocana*. Il ne fut
donc rien de plus qu'un homme de compromis.
[...] L'école Shingon est une source de difficultés beaucoup plus graves que les deux
autres dont je viens de parler. Sa doctrine est extrêmement erronée
et je voudrais en discuter ici les grandes lignes.
Sous le règne de l'empereur Xuan-zang, de la dynastie Tang, Shubhakarasimha*, Vajrabodhi*,
et Amoghavajra* ont apporté les sutras Vairocana*, Kongocho* et Soshitsuji* d'Inde
et les ont introduits en Chine. Les enseignements de ces trois sutras
sont très clairement énoncés. Si nous en recherchons
le principe essentiel, nous voyons qu'il consiste à réunir
les deux véhicules et à
les remplacer par le Véhicule unique de l'état de Bodhisattva,
à réfuter les deux véhicules pour révéler le Véhicule unique de l'état
de Bodhisattva. Et la caractéristique de cette école est
la pratique des mudra et des mantra
dharani*.
[...] Shubhakarasimha* comprit que l'enseignement du Tiantai était encore supérieur à la description qu'on lui
en avait faite en Inde et qu'il serait très difficile avec les
trois sutras qu'il avait apportés de le dépasser. Aussi,
afin de tromper Yixing, il lui dit
: "Mon bon moine, vous êtes l'un des hommes les plus intelligents
de Chine et l'école Tiantai
possède un enseignement véritablement profond et mystique.
Mais l'école Shingon dont j'ai apporté les sutras en Chine est supérieure à
l'école Tiantai sur un point
: elle utilise les mudra et les mantra dharani*."
Yixing pensa que ce n'était
peut-être pas impossible. Shubhakarasimha* dit alors à Yixing : "De
la même manière que le Grand-maître Zhiyi écrivit des commentaires
sur le Sutra du Lotus, j'aimerais concevoir des commentaires
sur le Sutra Vairocana* pour propager
l'enseignement de l'école Shingon.
Pourriez-vous les écrire pour moi ? " Yixing répondit que c'était chose facile. (...) L'acarya Yixing écrivit tout cela
fidèlement, comme Shubhakarasimha* le lui avait dicté. L'enseignement
théorique* du Sutra du Lotus fut adressé à Shariputra et l'enseignement essentiel*,
à Maitreya. Dans les 360
provinces de Chine, personne ne découvrit ce subterfuge. Au début,
il y eut quelques polémiques sur les mérites relatifs des
écoles Tiantai et Shingon.
Mais Shubhakarasimha* était une personne qui inspirait un grand respect et les moines
de l'école Tiantai avaient
moins de poids que lui.
[...] Avec le passage
des années, la racine frauduleuse de ces enseignements erronés
de l'école Shingon aurait pu rester bien cachée. Le Grand-maître Saicho,
après s'être rendu du Japon en Chine, en revint avec les
textes de l'école Tiantai, mais aussi avec ceux de l'école Shingon.
Il recommanda l'enseignement de l'école Tendai à l'empereur du Japon et fit étudier celui de l'école Shingon aux maîtres des Six écoles. Il avait déjà clairement
mis en évidence la supériorité de l'enseignement
du Tendai sur celui des Six Écoles
avant son voyage en Chine. Après être rentré de Chine,
il décida de faire construire le kaidan pour l'ordination selon
les préceptes menant à l'Éveil
parfait et immédiat, mais cela suscita de nombreuses controverses.
Peut-être pensa-t-il qu'il avait déjà beaucoup d'ennemis,
et que la réalisation de ce Grand Sanctuaire serait suffisamment
difficile même s'il y consacrait tous ses efforts. Ou peut-être
a-t-il pensé que ce serait à l'époque des Derniers
jours du Dharma qu'il faudrait réfuter l'école Shingon.
Quoi qu'il en soit, il ne mentionna pas le Shingon en présence de l'empereur et n'en parla pas non plus de manière
décisive à ses disciples. Toutefois il laissa bel et bien
un ouvrage secret en un volume intitulé Ebyo Shu (note) dans lequel il décrit de quelle manière divers moines des
Sept Écoles furent convaincus par l'enseignement du Tendai.
Dans la préface de ce texte, il mentionne le caractère frauduleux
des enseignements du Shingon. Kukai* se rendit en Chine pendant l'ère Enryaku à la même
époque que le Grand-maître Saicho. (note) Il y étudia l'enseignement de l'école Shingon sous la direction de Hui-guo du
temple Qing-long-si. De retour au Japon, évaluant les mérites
des enseignements exposés par Shakyamuni de son vivant, il déclara
que les plus élevés étaient les enseignements de
l'école Shingon,
plaçant le Sutra Kegon* au deuxième rang, et, au troisième, le Sutra du Lotus.
[...] Je suppose que c'est parce que, lorsqu'il séjourna en Chine,
il étudia seulement l'enseignement de l'école Shingon,
la pratique des mudra et des mantra
dharani*.
Mais il ne semble pas avoir étudié les aspects théoriques
de la doctrine. De retour au Japon, il découvrit que l'école Tendai était beaucoup
plus florissante qu'il ne le pensait et en conclut qu'il serait difficile
de propager l'enseignement du Shingon auquel il était attaché. Par conséquent, il reprit
l'enseignement de l'école Kegon qu'il avait étudié au Japon avant son départ, et
il commença à affirmer [comme le Kegon le disait de sa propre doctrine] que l'enseignement du Shingon était supérieur à celui du Sutra du Lotus.
Mais il comprit que, s'il se contentait de l'affirmer, comme le faisaient
les maîtres de l'école Kegon,
personne ne le croirait. C'est pourquoi il modifia à sa manière
le raisonnement du Kegon (note) en disant : "Je propage en réalité
la véritable doctrine contenue dans le Sutra
Vairocana*, dans le Bodaishin Ron du bodhisattva Nagarjuna et dans l'enseignement du maître du Shingon Shubhakarasimha*",
consolidant ainsi sa position à grand renfort de mensonges absurdes.
Mais, malgré cela, les moines de l'école Tendai n'ont pas su fermement le contredire.
[...] Les temples du Mont Hiei [centre de l'école Tendai]
n'auraient pas du avoir de pires ennemis que ceux qui prétendent,
comme on le fait communément au Japon, que l'enseignement du Shingon est supérieur à celui du Sutra du Lotus. Mais parce
que Ennin* mit un bâillon sur la bouche des trois mille moines [du Mont Hiei, leur interdisant ainsi de parler], tout se passa comme les maîtres
du Shingon le souhaitaient. En fait, le To-ji [principal temple Shingon dans la région de Kyoto] n'eut pas de meilleur allié que Ennin*.
[...] Mais un moine considéré
comme le plus respectable du Mont Hiei, Annen, établit, dans son ouvrage
intitulé Kyojijo Ron, une classification des neuf écoles
donnant la première place au Shingon,
la deuxième au Zen, la troisième
à l'école Tendai-Hokke,
la quatrième au Kegon, etc.
A cause de cette redoutable erreur d'interprétation, l'école Zen parvint à répandre
ses enseignements à travers tout le Japon et le pays est au bord
de la ruine.
[...] Le Grand-maître Saicho étudia les enseignements Tendai et Shingon pendant quinze ans au Japon, par lui-même. Il possédait de
manière innée des capacités de compréhension
merveilleuses, et, sans l'aide d'un maître, s'éveilla à
la vérité. Mais, pour dissiper les doutes des autres, il
se rendit en Chine où il reçut l'enseignement des écoles Tiantai et Shingon.
Les maîtres, en Chine, avaient à cet égard diverses
opinions mais, dans son coeur, Saicho était certain que l'enseignement
du Sutra du Lotus était supérieur au Shingon.
C'est pourquoi il n'utilisa jamais le terme "école" pour
se référer au Shingon,
parlant seulement des "pratiques shikan et "paroles véritables" de l'école Tendai".
Il décida que, chaque année, seraient ordonnés deux
novices qui devraient étudier pendant douze ans au Mont Hiei.
De plus, il obtint que fut promulgué un édit impérial
désignant le Sutra du Lotus, le Sutra Konkomyo* et le Sutra Ninno* comme
les trois sutras destinés à assurer la protection et la
prospérité du pays, et décrétant qu'ils devaient
être lus et récités au Shikan-in.
[...] L'enseignement ésotérique, à son tour, se divise
en deux catégories. La première est celle de l'enseignement
théorique*,
qui comprend les sutras Kegon*, Hannya*, Vimalakirti, du
le Sutra du Lotus et du Nirvana.
Bien qu'ils enseignent l'inséparabilité des vérités
profanes et de la vérité suprême du bouddhisme, ils
n'enseignent pas les mudra et les mantra dharani*.
La deuxième catégorie est celle de l'enseignement ésotérique
à la fois la pratique et théorique. Ce sont les principes
que l'on trouve dans les sutras Vairocana*, Kongocho* et Soshitsuji*.
Ils enseignent la non-dualité des vérités profanes
et bouddhiques ainsi que les mantra
dharani* et les mudra." Ce passage signifie
essentiellement que, pour ce qui est de la supériorité relative
du Sutra du Lotus, les trois sutras du Shingon mentionnés plus haut sont théoriquement en accord, puisqu'elle
réside dans le principe d'ichinen
sanzen. Mais la pratique des mudra et des mantra dharani* n'est pas exposée dans le Sutra du Lotus. C'est pourquoi
le Sutra du Lotus représente l'enseignement ésotérique théorique, alors que les trois sutras du Shingon représentent l'enseignement ésotérique à la
fois théorique et pratique. Ces deux enseignements sont donc aussi
érents que le ciel de la terre ou que les nuages de la boue.
[...] En réalisant que l'erreur de Ennin* découle de l'interprétation qu'il donne de son rêve.
Il fit ce rêve après avoir établi, dans ses commentaires,
que l'enseignement du Shingon était supérieur à celui du Sutra du Lotus.
Si ce rêve avait été un rêve de bon augure,
comme Ennin* lui-même le prétendit, nous pourrions en conclure que l'enseignement
du Shingon est effectivement supérieur. Mais le rêve de transpercer
d'une flèche le soleil est-il donc un rêve de bon augure ?
[...] Si les forces japonaises et mongoles s'étaient livré
bataille, si les prières des maîtres du Shingon avaient prouvé leur efficacité, et si le Japon avait remporté
la victoire grâce à elles, on pourrait alors dire que le Shingon est précieux.
Le choix en fonction
du temps (Minobu, 10 juin 1275 ; adressé
à Yui)
Au cours des vingt règnes qui suivirent, et pendant les plus de
deux cents ans qui s'écoulèrent jusqu'au règne de
l'empereur Kammu, il y eut bien ce
que l'on appelle les six écoles bouddhiques au Japon, mais la supériorité relative des divers
enseignements bouddhiques ne fut pas clairement établie. Puis,
durant l'ère Enryaku [782-805], un sage apparut dans ce pays, qui
fut connu sous le nom de Grand-maître Dengyo (Saicho).
Il réfuta les enseignements des Six écoles, déjà
propagés avant lui, et tous les moines des Sept
Temples principaux de Nara devinrent ses disciples. Avec le temps,
il établit un temple sur le Mont Hiei qui devint Temple principal, et les autres temples du pays y
furent rattachés. C'est ainsi que les enseignements bouddhiques
du Japon furent unifiés en une seule école. La société,
de même, ne fut plus divisée, et le gouvernement appliquant
des règles claires, le mal disparut d'un pays purifié. Si
nous voulions évaluer les mérites de Saicho,
nous devrions dire qu'ils découlent tous de sa fidélité
au passage [déclarant que le Sutra du Lotus est le plus
élevé de tous les sutras] "que j'ai enseignés,
que j'enseigne maintenant et que j'enseignerai à l' avenir."(réf.)
[...] Dans la période qui suivit, les trois Grands Maîtres Kukai*, Ennin* et Enchin, en prétendant
s'appuyer sur des enseignements faisant autorité en Chine, soutinrent
l'idée que le Sutra
Vairocana* et les deux
autres principaux sutras du Shingon étaient supérieurs au Sutra du Lotus. De plus,
ils qualifièrent d'"école" les enseignements Shingon,
terme que le Grand-maître Saicho n'avait délibérément jamais utilisé. Le Shingon fut donc reconnu comme la huitième
école bouddhique du Japon.
Les
Quatre Etapes de la foi (Minobu ; 10e j. du 4e mois de 1277 ( ? )
à Toki Jonin).
Plus tard,
à l'époque de l'empereur retiré Go-Toba,
à l'ère Kennin [1201-1204],
deux hommes apparurent, Honen et Dainichi, qui eurent l'arrogance de se croire plus sages que tous les autres. Leurs corps étaient
possédés par les esprits maléfiques, et ils allèrent
dans tout le pays égarer les hommes de haute comme de basse condition,
jusqu'à ce que tout le monde pratique le Nembutsu ou rejoigne en toute hâte l'école Zen.
Ceux qui continuaient à respecter l'école du Mont Hiei furent de plus en plus rares et de moins en moins fervents, et
dans tout le pays, les moines éminents de l'école du Sutra
du Lotus et les enseignements Shingon furent ignorés et rejetés.
Genèse
du Rissho Ankoku Ron (Kamakura,
le 5 avril 1268, à Hokan-bo)
[...] Les Grands maîtres Kukai*,
fondateur de l’école Shingon au Japon, et Ennin*,
troisième Grand-patriarche du Enryaku-ji sur le Mont Hiei, ont dénaturé l’enseignement correct
du Grand-maître Saicho, qui
était le plus grand sage du Japon. Car, dans la comparaison entre
de Sutra du Lotus et le Sutra
Vairocana* la supériorité du premier était pour eux trop embarrassante.
Les temples du Mont Hiei ont depuis lors pris parti pour la fourberie d'Ennin*,
tandis que le temple Jigo-ji à Takao et les sept
grands temples de Nara ont tous suivis le faux enseignement de Kukai.
Durant 400 longues années, les empereurs et leurs ministres ont
vénéré ces mauvais maîtres et le peuple croyait
en leurs enseignements mensongers.
Réponse à Gonin (Minobu,
le 26 décembre
1275)
Moi [Nichiren], je suis arrivé à la conclusion, après
avoir ré-examiné cet incident, que le camp de la cour impériale
a perdu la guerre parce qu’ils ont adressé des prières
selon les principes de l’école Shingon qui sont erronés, mensongers et déviés. Même
s’il n’y avait eu qu’une personne pour offrir une prière
à une loi aussi peu fiable, cette prière pourrait causer
un tel désastre que même une nation pourrait être ruinée
– à plus forte raison quand le dirigeant adresse des prières,
à l’unisson avec 300 moines, au Dharma de l’école Shingon qui considère le Sutra du Lotus comme son plus grand ennemi
! C’était une conséquence inévitable que le
camp de la cour impériale ait été battu. [...] Les
années passant, les enseignements erronés de l’école Shingon qui ont
causé la catastrophe, se sont progressivement répandus dans
la région de Kanto, où les moines du Shingon,
devenus des administrateurs de grands temples, ont commencé à
propager leur enseignements erronés. Dans cette région,
la plupart des gens qui sont issus de samouraïs rustres n’ont ni la connaissance, ni la capacité pour comprendre
la différence entre enseignements véritables et enseignements
faux, mais ils croient simplement que les Trois
trésors, - le Bouddha, le Dharma et le Sangha,
devraient être respectés. Ainsi, ils sont devenus naïvement
des fidèles de l’école Shingon.
[...] Comme le temps passait, la région de Kamakura fut à nouveau sur le point d’être envahie par une puissance
étrangère à cause des enseignements erronés
de l’école Shingon.
Le gouvernement shogunal de Kamakura exerçait sa juridiction, non seulement sur l’ensemble des
régions de Kanto, mais il avait aussi pris le cotrôlle du
temple Enryaku-ji au Mont Hiei, du temple To-ji à
Kyoto, du temple Onjo-ji dans la préfecture de Shiga,
et des sept temples principaux de
Nara. En conséquence, le dirigeant du gouvernement shogunal de Kamakura, avec sa famille et tous
les dignitaires et moines supérieurs de ces temples, sont devenus
des fidèles de l’école Shingon,
tout juste comme l’ex-empereur Go-Toba,
qui était exilé dans l’île d’Oki, avait
été un fidèle de l’école Shingon.
La chute des Heike et la guerre civile de la période de Jokyu sont la preuve que la croyance en la fausse loi de l’école Shingon a mené [son adepte] à sa perte.
Honzonmondosho ( Minobu, septembre 1278 à Joken-bo)
Sous le règne
du cinquantième souverain, l'empereur Kammu,
vécut un jeune moine du nom de Saicho,
que l'on connaîtrait ensuite sous le nom de Grand-maître Dengyo.
Avant de se rendre en Chine, il passa quinze ans à étudier
seul les écrits et les commentaires des écoles Shingon et Tendai. Puis, le septième
mois de la vingt-troisième année de l'ère Enryaku (804), il fit voile vers la Chine. Il revint au Japon au cours
du sixième mois de l'année suivante, et, dès lors,
enseigna, à plusieurs douzaines de moines érudits des sept
temples principaux de Nara, les doctrines des écoles Tendai et Shingon.
Quatre cents ans se sont écoulés depuis lors.
Le choix en fonction
du temps (Minobu, 10 juin 1275 ; adressé
à Yui)
De même, le Grand-maître Saicho reçut, de ses maîtres Dao-sui et Xing-man, les principes
de la méditation shikan,
et les grands préceptes de l'Éveil
parfait. Cela fait de lui un juste. Mais, avant même d'aller
en Chine, alors qu'il était encore au Japon, il avait déjà
compris et maîtrisé tous les principes du Shingon et de shikan sans l'aide d'aucun maître et il avait compris que
la sagesse de l'école Tendai surpassait celle des Six et
Sept Écoles.
Lettre à Myomitsu
Shonin (Minobu,
le 5ème jour du 3ème mois intercalaire 1276 à Myomitsu)
Venons-en
maintenant à l'école Shingon.
Elle fut introduite [en Chine] par Shubhakarasimha* sous le règne du 44e souverain, l'impératrice Gensho. Il
amena le Sutra Vairocana* au Japon
mais retourna en Chine sans le propager. Gembo rapporta de Chine le Dainichikyo Gishaku (Commentaire
sur la signification du Sutra Vairocana) en quatorze volumes et le précepteur Tokusei, du Todai-ji,
fit de même.
Le Grand-maître Saicho étudia
ces ouvrages mais il eut des doutes sur leur évaluation des mérites
relatifs du Sutra du Lotus et du Sutra
Vairocana*. C'est pourquoi,
le septième mois de la vingt-troisième année de l'ère Enryaku (804), il se rendit en Chine ; il y rencontra les moines Daosui du temple Xi-ming-si et Xingman,
du temple Fo-long-si, et reçut les enseignements shikan ainsi que les grands préceptes pour l'Éveil parfait et immédiat.
Il rencontra également le moine Shun-xiao,
du temple Ling-gang-si, et étudia sous sa direction le Shingon.
Il revint au Japon le sixième mois de la vingt-quatrième
année de l'ère Enryaku (805). L'empereur Kammu lui accorda une audience et fit publier un décret recommandant
aux étudiants des Six écoles la pratique de shikan [la méditation du Tiantai ]
et de shingon [la récitation de mantra dharani* ésotériques], et incitant à les adopter dans les
sept temples principaux de Nara.
Il y avait en Chine plusieurs théories sur la supériorité
relative de ces deux enseignements, shikan et shingon.
De plus, le Dainichikyo Gishaku affirme que, bien qu'ils soient équivalents en théorie,
le shingon est
supérieur en terme de pratique.
Le Grand-maître Saicho, cependant,
réalisa qu'il s'agissait là d'une erreur de la part de Shubhakarasimha*,
et comprit que le Sutra Vairocana* était
inférieur au Sutra du Lotus. C'est pourquoi il renonça
à établir une huitième école fondée
sur les enseignements shingon et préféra les incorporer aux enseignements de la septième
école du Japon, l'école Hokke,
après leur avoir retiré le nom de Shingon-shu.
Il déclara que le Sutra
Vairocana* devait être
considéré comme un sutra supplémentaire de l'école Hokke-Tendai,
et le situa au même niveau que les sutras Kegon*, Daibon hannya (note) et Nirvana.
Mais la question de savoir s'il fallait ou non établir un kaidan pour l'ordination selon les préceptes menant à l'Éveil
parfait et immédiat, élément d'une grande importance
pour le Mahayana, suscitait à
l'époque de vives polémiques au Japon. C'est peut-être
pour cela que le Grand-maître Saicho ne laissa pas à ses disciples d'instructions claires quant à
la supériorité relative des enseignements Shingon et Tendai.
Pourtant, dans un ouvrage intitulé Ebyo Shu, il établit
clairement que l'école Shingon avait volé les principes corrects de l'école Hokke-Tendai pour les incorporer à sa propre interprétation du Sutra
Vairocana*, afin de
déclarer les deux écoles équivalentes au niveau théorique.
En réalité, l'école Shingon avait donc été vaincue par l'école Hokke-Tendai.
[...] C'est encore plus évident si nous considérons que]
après la mort de Shubhakarasimha* et de Vajrabodhi*,
le Savant-maître [de l'école Shingon] Amoghavajra* se rendit en Inde où il rencontra le bodhisattva Nagabodhi. Nagabodhi lui apprit qu'il n'existait
pas en Inde de commentaires ou de traités énonçant
clairement la volonté du Bouddha, mais qu'il se trouvait en Chine
un traité, oeuvre d'un nommé Zhiyi,
qui permettait à tous de distinguer clairement les enseignements
corrects de ceux qui ne l'étaient pas, et de saisir la différence
entre doctrines complètes et incomplètes. Sa voix, lorsqu'il
lui dit cela, était pleine d'admiration et il lui demanda instamment
qu'un exemplaire de cet ouvrage fut envoyé en Inde.
Cette histoire fut rapportée au Grand-maître par Hanguang,
disciple d'Amoghavajra*,
et elle est relatée par Zhanlan à la fin du dixième volume du Hokke
Mongu Ki*,
ainsi que dans le Ebyo Shu du Grand-maître Saicho.
De ce passage, il ressort clairement que le Grand-maître Saicho estimait le Sutra Vairocana* inférieur
au Sutra du Lotus.
Il apparaît donc que le Bouddha Shakyamuni, ainsi que les Grands-maîtres Zhiyi, Zhanlan et Saicho sont unanimes pour considérer
le Sutra du Lotus comme le plus élevé de tous les
sutras y compris le Sutra
Vairocana*. De plus,
si l'on étudie attentivement le Daichido Ron* , il devient évident que son auteur, le bodhisattva Nagarjuna, considéré
comme le fondateur de l'école Shingon,
était du même avis. Mais malheureusement, le Bodaishin
Ron, ouvrage d'Amoghavajra*,
est pétri d'erreurs et a égaré tous ceux qui l'ont
lu, provoquant la confusion qui règne actuellement.
Nous arrivons à présent à un disciple de l'administrateur
des moines Gonso, du temple d'Iwabuchi,
du nom de Kukai*,
et qui fut connu plus tard sous le nom de Kobo Daishi [Grand-maître
Kobo]. Le douzième jour du cinquième mois de la vingt-troisième
année de l'ère Enryaku (804), il partit pour la Chine. A
son arrivée, il fit la connaissance du moine Huiguo,
dont le maître appartenait à la troisième génération
de la lignée Shingon,
commencée par Shubhakarasimha* et Vajrabodhi*.
De Huigo, il reçut la transmission des deux
mandalas du Shingon.
Il rentra au Japon le vingt-deuxième jour du dixième mois
de la deuxième année de l'ère de Daido (807).
Cela se passait sous le règne de l'empereur Heizei, l'empereur Kammu étant
depuis peu décédé. Kukai* obtint une audience de l'empereur qui lui accorda une grande confiance
et se mit à suivre ses enseignements, les considérant supérieurs
à tous les autres. Peu de temps après (809), l'empereur
Heizei céda le trône à l'empereur Saga,
dont Kukai obtint également
les faveurs.
Le Grand-maître Saicho décéda
le quatrième jour du sixième mois de la treizième
année de Konin (822), sous le règne de l'empereur Saga.
A partir de la quatorzième année de la même ère (823), Kukai* prodigua officiellement ses enseignements au souverain. Il établit
l'école Shingon et la direction du temple To-ji lui
fut confiée ; on l'appela désormais "le moine du Shingon".
C'est ainsi que fut fondée l'école Shingon,
huitième école bouddhique du Japon.
Voici comment Kukai* évaluait les mérites respectifs des enseignements exposés
par le Bouddha Shakyamuni de son vivant : "Le Sutra
Vairocana* de l'école Shingon vient en premier, le Sutra Kegon* en deuxième, et la troisième place revient au Sutra
du Lotus et au Sutra
du Nirvana.
"Comparé aux sutras Agama*, Hodo* et Hannya*,
le Sutra du Lotus est un sutra véridique mais, comparé
aux sutras Kegon* et Vairocana*, il n'offre
que des théories puériles.
"Le vénérable Shakyamuni fut un bouddha, mais en comparaison
avec le bouddha Vairocana*,
il est encore au stade de l'obscurité (réf.).
Il y a entre eux autant de différence qu'entre un empereur et un
barbare en captivité.
"Le Grand-maître Zhiyi est un voleur. Il s'est approprié le beurre clarifié du Shingon en affirmant que le Sutra du Lotus était le ghee [de tous les enseignements bouddhiques]."
Voilà ce qu'écrivait Kukai*.
En entendant de tels propos, les gens, même ceux qui avaient cru
auparavant que le Sutra du Lotus était le plus élevé
des sutras, se mirent à le considérer comme sans valeur.
Laissons de côté, pour l'instant, les enseignements non bouddhiques
exposés [par les brahmanes] en Inde. Mais les déclarations
de Kukai* sont certainement encore plus fausses que les théories des moines
du nord et du sud de la Chine, qui prétendaient que, comparé
au Sutra du Nirvana,
le Sutra du Lotus était
erroné. Elles sont plus outrancières que les assertions
des adeptes du Kegon affirmant que,
comparé au Sutra Kegon*,
le Sutra du Lotus représente les "branches".
Cela rappelle le Brahmane-Grand-Arrogance qui, en Inde, s'était fait construire une chaire
dont les quatre pieds étaient sculptés à l'image
des divinités Maheshvara, Narayana, Vishnu,
et du Bouddha Shakyamuni, et qui, juché sur cette chaire, prêchait
des doctrines erronées.
Si seulement le Grand-maître Saicho avait encore été en vie, il aurait certainement réfuté
ces erreurs. Mais d'où vient que ses disciples Gishin*, Encho*, Ennin* et Enchin* n'aient jamais remis en question la doctrine de Kukai* ? Ce fut là un grand malheur pour le monde ! Ennin* se rendit en Chine au cours de la cinquième année de l'ère
de Jowa (838) et y passa dix ans à étudier la doctrine des
écoles Tiantai et Shingon.
Pour ce qui est des mérites relatifs du Sutra du Lotus et du Sutra Vairocana*, Faxian, Yuanzheng et d'autres
encore, huit maîtres Shingon au total, lui enseignèrent que le Sutra du Lotus et le Sutra Sutra Vairocana* étaient
équivalents d'un point de vue théorique mais que le second
était supérieur du point de vue de la pratique. Il étudia
aussi sous la direction de Zhiyuan, Guanxiu et Wei-Juan,
de l'école Tiantai, et de
ceux-ci il apprit que le Sutra
Vairocana* entrait dans
la catégorie des sutras Hodo* (inférieurs au Sutra du Lotus).
Le dixième jour du neuvième mois de la treizième
année de l'ère de Towa (846), il rentra au Japon, et le
quatorzième jour du sixième mois de la première année
de l'ère de Kajo (848), il fut officiellement autorisé à
conduire des cérémonies d'ordination selon les rites de
l'école Shingon,
comme il l'avait demandé. Peut-être parce que, au cours de
ses études en Chine, il n'avait pas compris l'importance du Sutra
du Lotus par rapport au Sutra
Vairocana*, il entreprit
d'écrire un commentaire en sept volumes du Sutra Kongocho*, ainsi qu'un commentaire en sept volumes du SutraSoshitsuji*, quatorze
volumes au total. Le point central de ces commentaires est que la doctrine
exposée dans les sutras Vairocana*, Sutra Kongocho* et Soshitsuji*, et celle qui est énoncée dans le Sutra du Lotus, révèlent en définitive le
même principe, mais que, grâce au rituel des mudra et des mantra dharani* associé aux trois sutra du Shingon, ceux-ci doivent être considérés
comme supérieurs au Sutra du Lotus.
Cette position était totalement en accord avec l'opinion exprimée
par Shubhakarasimha*, Vajrabodhi* et Amoghavajra* dans leurs commentaires du Sutra Vairocana* Vajrabodhi* et Amoghavajra* souscrivirent également aux opinions de Shubhakarasimha* telles qu'elles sont exprimées dans ce traité." (note) Est-ce parce
qu'un doute persistait encore dans l'esprit d'Ennin*,
ou parce que, n'ayant plus de doutes lui-même, il souhaitait éliminer
ceux des autres ? Quoi qu'il en soit, il plaça ses quatorze
volumes de commentaires devant l'objet de culte du temple où il
résidait et formula la prière suivante : "J'ai écrit
ces traités mais la véritable intention du Bouddha est très
difficile à saisir. Le Sutra Vairocana*, les
deux autres sutras du Shingon qui lui sont associés sont-ils supérieurs ? Ou, au
contraire, le Sutra du Lotus et les deux autres sutras qui lui
sont associés (note) doivent-ils être placés à un rang plus élevé ? "
Au cinquième jour de prières ferventes et sincères,
à l'heure de la cinquième veille, un signe lui apparut soudain
en rêve. Dans le ciel bleu, le soleil brillait. Il prenait un arc
et lançait une flèche qui transperçait le soleil.
L'astre se mettait à tomber, et au moment où il allait presque
s'écraser sur la terre, Ennin* se réveilla.
Transporté de joie, il s'exclama : "J'ai fait un rêve
de très bon augure. Ces écrits, dans lesquels j'ai affirmé
que les enseignements du Shingon sont supérieurs au Sutra du Lotus correspondent bien à
la volonté du Bouddha ! " Il obtint qu'un décret impérial
soit promulgué et il répandit cet enseignement dans tout
le Japon.
Mais l'édit qui fut rendu public à sa demande déclare
en réalité : "Il a été finalement établi
que les principes de méditation [shikan] de l'école Tendai et la doctrine du Shingon s'harmonisent parfaitement en théorie." Ennin* avait prié pour avoir la confirmation que le Sutra du Lotusétait
inférieur au Sutra
Vairocana* mais l'édit
qui fut publié proclamait au contraire que le Sutra du Lotus et le Sutra Vairocana* étaient
du même niveau ! Le Grand-maître Enchin* fut, au Japon, [dans sa jeunesse] le disciple du moine Gishin*,
d'Encho*,
de l'administrateur Kojo* et de Ennin*.
Il étudia ainsi toutes les doctrines, exotériques aussi
bien qu'ésotériques, enseignées à son époque
au Japon. Toutefois, peut-être parce qu'il avait encore des doutes
quant à la supériorité relative des écoles Tendai et Shingon,
il se rendit en Chine. Il y arriva dans la deuxième année
de l'ère Ninju (852), et y suivit l'enseignement des moines du Shingon, Faxian et Yuanzheng.
Leurs enseignements s'accordaient dans l'ensemble avec l'opinion de Ennin*,
c'est-à-dire que le Sutra
Vairocana* et le Sutra
du Lotus sont équivalents en théorie, mais que le second
est supérieur du point de vue de la pratique. Enchin* étudia également sous la direction du moine Liangxu de l'école Tiantai, qui
lui enseigna que, si l'on compare les mérites respectifs des écoles Shingon et Tian-ai, il apparaît que le Sutra
Vairocana* [de l'école Shingon]
est bien inférieur au Sutra
Kegon* et au Sutra du Lotus.
Après avoir passé sept ans en Chine, Enchin* revint au Japon le dix-septième jour du cinquième mois de
la première année de l'ère Jogan (859) (note).
[...] Dans son commentaire
du Sutra Vairocana*, le Dainichikyo
Shiiki, Enchin* déclare : "Le Sutra du Lotus lui-même ne soutient
pas la comparaison [avec le Sutra
Vairocana*], et les
autres sutras encore moins." Autrement dit, il prétend dans
cet écrit que le Sutra du Lotus est inférieur au Sutra Vairocana*. Par ailleurs,
dans un autre traité, le Juketsu Shu, il déclare : "Les doctrines [des écoles] Shingon et Zen... peuvent tout au plus servir
d'introduction aux sutras Kegon*, Lotus et Nirvana." Et il reprend cette affirmation
dans ses traités Fugenkyo Ki et Hokke Ron Ki.
[...] Le vingt-neuvième
jour - sous le signe cyclique mizunoe-saru - du quatrième mois de la huitième année
de l'ère Jogan, c'est-à-dire l'année hinoe-inu (866),
un édit impérial fut promulgué, déclarant : "Il appert que les doctrines des deux écoles, Shingon aussi bien que Tendai, méritent
toutes deux l'appellation de ghee du bouddhisme, et méritent également d'être qualifiées
d'ésotériques et de profondes."
De nouveau, au troisième jour du sixième mois [de la même
année], un édit proclama : "Depuis que, par le passé,
le Grand-maître Saicho a établi
les deux disciplines (note) comme la
voie correcte de l'école Tendai,
les patriarches successifs de cette école les ont reçues
et transmises toutes deux, de génération en génération.
Pourquoi leurs disciples, par la suite, devraient-ils s'écarter
de cette ancienne tradition ? [...] "Pourtant,
nous apprenons que les moines du Mont Hiei ne cessent de s'opposer aux enseignements de leur patriarche Saicho pour suivre des interprétations
personnelles erronées. Ils semblent se consacrer presque exclusivement
à la propagation des doctrines d'autres écoles, sans garder
ni transmettre les traditions de l'école Tendai.
Si les disciples veulent suivre la voie héritée du maître,
ils ne peuvent ignorer aucune des deux pratiques [de shikan et de shingon].
Si l'on désire transmettre et propager la doctrine, ne doit-on
pas maîtriser ces deux formes d'enseignements ? Désormais,
la fonction de Grand-patriarche du temple Enrakyu-ji [de l'école Tendai] ne
sera confiée qu'à une personne les ayant parfaitement comprises
toutes deux et il en ira toujours de même à l'avenir."
[...] [Comme nous l'avons
vu] Ennin* et Enchin* furent tous deux les disciples de Saicho et de Gishin*.
De plus, ils se rendirent en Chine et y rencontrèrent des maîtres
éminents du Tiantai et du Shingon.
Mais peut-être avaient-ils des doutes concernant les mérites
relatifs de ces deux écoles. Tantôt, ils déclaraient
le Shingon supérieur, tantot le Sutra du Lotus ; parfois encore, ils
les disaient équivalents en théorie, bien que le Shingon soit supérieur en pratique. C'est alors qu'un édit proclama
que quiconque débattrait des mérites comparés de
ces deux écoles se rendrait coupable de désobéissance
aux ordres impériaux.
Les déclarations de Ennin* et Enchin* étaient de toute évidence contradictoires et les adeptes
des autres écoles ne leur accordaient pas la moindre confiance.
Pourtant, l'édit impérial établissait que les deux
écoles étaient équivalentes, prétendant que
c'était là l'opinion du patriarche fondateur [de l'école Tendai], le Grand-maître Saicho. Mais dans lequel de ses
écrits trouve-t-on une telle affirmation ? C'est là
un point qu'il faut examiner avec le plus grand soin.
Traité
sur la dette de reconnaissance (Minobu,
le 21 juillet 1276, à Joken-bo et Gijo-bo)
Lorsque la
guerre civile éclata entre Minamoto
no Yorimoto, et Taira no Kiyomori,
plus de vingt membres du clan de Kiyomori signèrent un pacte sur
lequel ils apposèrent leur sceau. Ils jurèrent : "Nous
considérerons Enrakyu-ji comme le temple de notre clan. Nous révèrerons les trois
mille moines comme nos propres parents. Les joies et les peines de ce
temple seront nos joies et nos peines." Ils firent une donation au
temple des vingt-quatre districts de la province d'Omi. Ensuite, Myoun et ses disciples employèrent tous les rites ésotériques
de l'école Shingon dans leurs prières pour vaincre l'ennemi, et ordonnèrent
même à leurs moines armés de lancer des flèches
sur les soldats de Minamoto. Pourtant, Minamoto no Yoshinaka et un de
ses vassaux, Higuchi, accompagnés de seulement cinq ou six hommes,
escaladèrent le Mont Hiei pour
faire irruption dans le hall principal. Ils arrachèrent Myoun de l'autel où il priait pour la victoire, le ligotèrent
avec une corde, le firent rouler comme une grosse pierre jusqu'au bas
de flanc ouest de la montagne pour, finalement, lui couper la tête.
Les Japonais ne se détournent pourtant pas de l'école Shingon,
et ne se sont même jamais demandé pourquoi leurs prières
ne sont pas exaucées.
[...] Pendant le cinquième, sixième et septième mois
de la troisième année de Jokyu (1221), la cour impériale
de Kyoto mena la guerre contre le régime de Kamakura.
A ce moment-là, les temples Enrakyu-ji, To-ji, Onjo-ji et les sept grands temples de Nara utilisèrent les rites les plus ésotériques du Shingon dans leurs prières aux divinités Tensho
Daijin*, Hachiman et Sanno. Quarante et un moines,
parmi les plus renommés, y compris l'ancien supérieur Jien de l'école Tendai, les
révérends du To-ji et
du Ninna-ji, ainsi que Jojuin du
temple Onjo-ji, prièrent
sans cesse pour la défaite de Hojo
Yoshitoki. Le deuxième fils de l'empereur Go-Toba entama aussi des prières dans la salle des cérémonies
d'Etat, le huitième jour du sixième mois. La cour impériale
annonça qu'elle serait victorieuse avant huit jours. Mais le septième
jour et le quatorzième jour du sixième mois, la bataille
se solda par une défaite, et le deuxième fils mourut de
chagrin parce que son page bien-aimé, Setaka, avait été
décapité. Et pourtant, malgré tout cela, personne
ne s'est jamais demandé ce qu'il y avait de faux dans les doctrines Shingon.
Les deux cérémonies religieuses qui comprenaient tous les
rites ésotériques du Shingon - la première conduite par Myoun,
la seconde par Jien - entraînèrent
la ruine complète de la cour impériale japonaise. Et voilà
que, pour la troisième fois, on prévoit une cérémonie
religieuse de ce type pour repousser l'invasion mongole. Le régime
actuel subira certainement le même sort, mais vous devez garder
ceci strictement pour vous.
Les Huit
Vents (Minobu,
1277 à Shijo Kingo)
L'empereur Antoku, quatre-vingt-unième
souverain sous forme humaine, ordonna à plusieurs centaines de
maîtres du Shingon,
parmi lesquels le Grand-patriarche du Tendai, Myoun, d'offrir des prières
pour soumettre Minamoto no Yoritomo.
Mais, comme le dit le Sutra, leurs malédictions "se
retournèrent contre ceux qui les avaient lancées."(réf.) Myoun fut décapité
par Yoshinaka et l'empereur Antoku périt noyé dans la mer de l'Ouest.
[...] A propos de cet enseignement extrêmement nuisible [le Shingon]
: les trois grands maîtres - Kukai, Ennin* et Enchin* - ont contredit les paroles d'or de Shakyamuni qui désignent le Sutra du Lotus comme le sutra le plus élevé. Ils
ont développé une théorie erronée consistant
à dire que le Sutra du Lotus ne se place qu'au deuxième
ou troisième rang, tandis que le Sutra
Vairocana* est le plus
élevé. En prêtant foi à ces conceptions erronées,
les empereurs détruisirent le pays en même temps qu'eux-mêmes
en cette vie-ci, et se condamnèrent aux souffrances incessantes
de l'enfer dans la suivante.
[...] Avec ces prières [contre les Mongols, prévues
prochainement], ce sera la troisième fois qu'il sera fait appel
aux rituels du Shingon.
Parmi mes disciples, ceux qui sont morts en voient sans doute déjà
le résultat avec l'œil du
Bouddha.
La conversion d'un père (Minobu en 1277 à Ikegami Hyoe-no-sakan
Munenaga)
Question : L’objet de culte dans l’école Shingon est Mahavairocana (Dainichi)
et celui de l’école Jodo est le bouddha Amida.
L’objet de culte de l’école Zen est le Bouddha qui
a atteint l’Éveil sous l’arbre
bodhi, nommément le Bouddha Shakyamuni. Toutes ces écoles
et groupes montrent l’image de Bouddha comme leur objet de culte,
mais pourquoi est-ce que l’école Hokke est la seule qui a le Sutra du Lotus comme son objet de culte ? Réponse : D’autres écoles montrent la statue
du Bouddha comme leur objet de culte, mais l’école Hokke a sa propres raisons significatives de vénérer le Sutra
du Lotus comme son objet sacré.
Question : Kukai* est originaire de l’île de Shiko. Il fut disciple du maître Gonso, un savant et un moine du temple
Iwabuchi, dans la préfecture de Nara. Kukai* acquit une connaissance approfondie de six
écoles, dont Sanron et Hosso. En mai 804, Kukai*,
conformément aux ordres de l’empereur Kammu,
partit en Chine (note) puis, selon les instructions de l’empereur Junso, il entra au temple
Qing-lung où il étudia les enseignements du Shingon auprès de Maître Huiguo.
On dit que Maître Huiguo était
le moine de la septième génération après le
bouddha Vairocana*.(note) Bien que les moines aient changé, les enseignements du Shingon ont été transmis de génération en génération
comme on verse de l’eau d’un récipient dans une autre.
Bien que le récipient soit différent, l’eau qui a
été transmise de Vairocana à Vajrasattva, Nagabodhi, Vajrabodhi, Amoghavajra*,
Maître Huiguo et à Kukai* est la même. Après avoir terminé ses études
avec Huiguo, Kukai* traversa la vaste étendue d’eaux et retourna au Japon. Par
la suite, Kukai* enseigna les enseignements de l’école Shingon à trois empereurs, Heijo,
Saga, et Junna. Le 19 janvier 823, Kukai* reçut l’autorisation de l’Empereur de bâtir le
temple To-ji, à Kyoto, et il
commença alors à diffuser les enseignements du Shingon autour de la région du Kansai, puis au Japon central, dans les
îles de Tsukushi [Kyushu], Shikoku, Iki et Tsushima,
et finalement, à travers tout le pays. On peut dire que ceux qui
ont fait le pèlerinage dans toutes les parties du Japon, en sonnant
une cloche sur un poteau de l’école Shingon,
étaient tous, sans exception, des disciples de Kukai*.
En 821, Ennin* voyagea en Chine et, pendant le règne de l’empereur Esho,
[Li Ang ? ] de
Chine ; il acquit la connaissance approfondie des enseignements
ésotériques et exotériques sous la direction de plusieurs patriarches vertueux de l’école Tendai et de l’école Shingon Hozen, Xuanzang, Gishin*,
Hogetsu, Shuei et Shion. Ennin* devint le neuvième patriarche de l’école Shingon.
Après être retourné au Japon, il devint un des enseignants
de l’empereur Nimmyo. Durant les périodes de Ninju et Saiko
(851-857), il rédigea deux commentaires : sur le Sutra
Kongo et sur le Sutra
Soshitsuji. Ennin* fonda le temple Soji-in (école Tendai)
au Mont Hiei et devint son troisième
patriarche. C’est le moment où l’enseignement du Shingon se mélangea à l'enseignement de l’école Tendai. (note)
[...] Pendant ce temps, le bouddhisme se propagea peu à
peu, ce qui provoqua des controverses entre Hinayanistes et Mahayanistes, et entre enseignements
provisoires (gonkyo) et définitif (jikkyo). Mais, en réalité, il n’y avait pas de grandes
différences entre eux. Six cents ans après que le bouddhisme
fut introduit en Chine, sous le règne de l’empereur Genso,
trois Maîtres, Shubhakarasimha*, Vajrabodhi* et Amoghavajra*,
vinrent d’Inde et fondèrent l’école Shingon.
En conséquence, les écoles Kegon et Hokke [celle du Sutra du
Lotus] devinrent extrêmement impopulaires. Depuis les empereurs
jusqu’au peuple en général, chacun avait l’impression
que l’enseignement Shingon et le Sutra du Lotus étaient aussi différents que
la lumière et l’obscurité. A l'ère Wado (708-715)
naquit Zhanlan [711-782]. Bien
qu’il ait considéré que le Sutra du Lotus était supérieur au sutras de l’école Shingon,
il considéra aussi qu’il n’était pas besoin
d’en faire état. Par conséquent, les gens furent dans
l’impossibilité de savoir quelle école était
supérieure, l’école Hokke ou l’école Shingon.
[...] Le Grand-maître Saicho reçut également,
du moine Shunxiao, l’initiation
ésotérique de l’école Shingon.
Après être retourné au Japon, le Grand-maître Saicho ne propagea pas les enseignements
de l’école Shingon.
A la place, il rechercha les enseignements du Sutra
Vairocana* et du Sutra
du Lotus pour déterminer quel sutra était supérieur.
Il s’était aperçu, en effet, que les savants chinois
ne lui fourniraient pas la réponse. Le Grand-maître Saicho en vint à la conclusion que le Sutra
Vairocana* de l’école Shingon était inférieur au Sutra du Lotus, et aussi que
certaines idées de l’école Tendai étaient incorporées dans le Commentaire sur le Sutra
Vairocana*, en particulier,
par Yixing.
[...]
Si les Grands maîtres Ennin* et Enchin* n’avaient pas donné beaucoup d’importance aux enseignements
des sutras Shingon,
et si le Grand-maître Kukai* s’était abstenu de les diffuser au Mont Hiei et au temple Onjo-ji,
on aurait pu éviter que son jugement erroné se répande
dans tout le Japon. Les Grands maîtres Ennin* et Enchin* ne reconnaissaient pas les sutras de l’école Kegon comme supérieurs au Sutra du Lotus. Cependant, ils apportèrent
leur soutien à l’affirmation du Grand-maître Kukai* selon laquelle le Sutra Vairocana* de l’école Shingon était supérieur au Sutra du
Lotus, bien qu’ils appartinssent à l’école Tendai. Ainsi, sans le savoir,
ils devinrent l’ennemi du Grand-maître Saicho qui avait fondé l’école Tendai au Japon.
[...] Pendant
400 ans, de cette époque à ce jour, les Japonais ont ainsi
décidé que le Sutra
Vairocana* de l’école Shingon est supérieur au Sutra du Lotus.
Cette impression a prévalu pendant 400 ans et continue aujourd’hui.
Même s’il y avait quelqu’un qui estimait que le Sutra
du Lotus surpasse les sutras de l’école Tendai,
il ne pourrait pas le reconnaître, par peur de représailles
des puissants et influents moines du Mont Hiei et du temple Ninna-ji.
Même si, par hasard, quelqu’un soutenait que le Sutra
du Lotus et le sutra de l’école Shingon sont au même niveau, il serait humilié et ridiculisé
par les gens de l’école Shingon. Ces derniers
contreraient cette affirmation en déclarant que c'est "une
erreur indéniable" et l’ignoreraient complètement.
Pour ces raisons, tous les temples au Japon, dont le nombre se monte à
des centaines de milliers, devinrent affiliés à l’école Shingon. Même s’il y avait un temple où
les enseignements de l’école Shingon et
ceux du Sutra du Lotus étaient exposés, les premiers
recevraient la priorité sur les seconds. Personne n’exposera
les enseignements du Sutra du Lotus parce que tous les moines
supérieurs des temples du Japon, aussi bien que le supérieur
du Mont Hiei, sont membres de l’école Shingon. Comme tous les gens de haute classe appartiennent
à l’école Shingon, les gens de basse
classe qui ont tendance à suivre les pas des gens de haute classe,
sans exception naturellement, sont devenus des fidèles de l’école Shingon. Les Japonais peuvent bien lire avec leurs lèvres
que le Sutra du Lotus est le premier, mais, dans leur esprit,
il occupe la seconde ou la troisième place et ils l’exprimeront
ainsi par les mots et par leurs corps.
[...] L’école Shingon, non seulement s’est
éloignée de la vérité, mais leurs [ses] voix
ont été extrêmement injustes. Ils ont caché
profondément leurs racines, de sorte que ceux qui ont une intelligence
superficielle ne pouvaient pas les distinguer. Ils ont trompé les
gens pendant longtemps. Tout d’abord, il n’y a pas d’école Shingon en Inde, mais l’école Shingon du Japon prétend qu’il y en a une dans ce pays. Où
est la preuve ? Le Sutra
Vairocana*, qui est
le sutra cardinal pour l’école Shingon,
est venu de l’extérieur ici au Japon. En comparaison avec
le Sutra Vairocana*, le Sutra
du Lotus l’emporte sur le Sutra
Vairocana* sur sept
points. Comme les preuves se trouvent dans les deux sutras, je ne vais
pas en faire un commentaire. L’école Shingon prétend que le Sutra
Vairocana* est supérieur
au Sutra du Lotus par deux ou trois facteurs. Cependant c’est
une idée absurde et erronée.
[...] Dans l’espoir de prendre une revanche sur le gouvernement
shogunal de Kamakura, le camp
de la cour impériale s’était concentré sur
un rite de prière conduit par Jien,
moine supérieur de l’école Tendai,
par un moine supérieur de l’école Shingon,
par le supérieur du temple Ninna-ji (note) et par le supérieur du temple Onjo-ji,
avec une grande assistance de moines de grande vertu venus des 15 grands
temples de Nara. Ce rite, basé
sur les quinze méthodes ou pratiques ésotériques,
instaurées comme la Grande Loi du Shingon par les Grands maîtres Kukai*, Ennin* et Enchin*,
fut accompli du 15 mai au 14 juin. En plus de ce rite, une autre session
de prières, basée sur la grande prière ésotérique
de l’école Shingon,
qui n’avait été exécutée qu’en
trois occasions au Japon, fut conduite par le prince impérial, dajo, (note) le supérieur du temple Ninna-ji,
à partir du 8 juin, dans le Hall des Cérémonies d’Etat
(Shishinden). En dépit de la tenue de telles sessions de prières,
les forces du bakufu de Kamakura attaquèrent Kyoto le 14 juin et capturèrent les trois ex-empereurs,
qui furent exilés dans différentes îles, et décapitèrent
les sept subordonnés. Les soldats du bakufu mirent le feu au Palais impérial et le brûlèrent.
Ce ne fut pas tout. Ils capturèrent Setaka, le fils bien-aimé
du Prince impérial, qui vivait dans le temple Ninna-ji,
et le décapitèrent. Ils tuèrent aussi sa mère,
avec beaucoup d’autres gens qui croyaient en les enseignements de
l’école Shingon. (note)
Les prières secrètes de l’école Shingon étaient les suivantes : 1) Ichiji Konrin ho (dharani du cercle d'or). Un culte à
ce mandala est rendu pour empêcher
l’empoisonnement, éviter les mauvais esprits et écarter
les désastres.
2) Shitenno ho (Les quatre rois du Ciel).
3) Fudomyo ho (L'Inébranlable, Acala).
4) Daiitoku ho (Grande Vertu). (note)
5) Temborin ho (Mise en branle de la Roue
du Dharma).
6) Myoirin ho (Roue de la satisfaction des désirs).
7) Aizen-o ho (Rituel dédié à Aizen,
le dieu de l’Amour).
8) Butsugen ho (Rite accompli dans le but d’arrêter les calamitiés).
9) Rokuji ho (Nom en six caractères du Bouddha Amida).
10) Kongo Doji ho ( Une déité sous la forme d’un garçon
à l’apparence furieuse représenté dans le mandala
du Monde de la Matrice*).
11) Sonjoo ho (Rituel dédié à l’Auguste-Etoile-du-Ciel) (note). Ce rituel
ésotérique, traditionnellement exécuté au
temple Onjo-ji, est dédié
à Myoken, déification de la Grande Ourse (hokuto shichisei)
– comme prière pour la longévité et l’élimination
des catastrophes.
12) Taigen (Rituel exécuté au Palais impérial du
8 au 14 du premier mois dans le but de prier pour la longue vie de l’Empereur
et la paix de l’Etat).
13) Le Sutra Shugo (Sutra
de la protection du souverain de la nation)
Questions
- réponses concernant l’objet de vénération (Minobu, septembre
1278 à Joken-bo)
Aucune autre
doctrine ne surpasse cet enseignement [du Sutra du Lotus], grande
lanterne qui illumine la longue nuit des souffrances de la vie
et de la mort, épée acérée qui tranche
la racine de l'obscurité fondamentale inhérente à la vie. Les enseignements des écoles Shingon et Kegon entrent dans la catégorie
de zuitai. Ils sont par conséquent
faciles à croire et faciles à comprendre puisque le Bouddha
les exposa en tenant compte des capacités ou des désirs
des personnes dans les Neuf états,
tout comme un père sage instruirait son enfant ignorant [de la
manière la mieux adaptée à ses facultés de
compréhension]. Par ailleurs, on appelle zuiriki l'enseignement que le Bouddha exposa en puisant directement dans son état
de Bouddha, de la même manière qu'un père sage guide
son enfant ignorant vers la compréhension à laquelle il
est lui-même parvenu.
Comparaison du
Sutra du Lotus avec les autres Sutra (Minobu,
le 26 mai 1280 à Toki Jonin)
Par la suite,
le Grand-maître Zhanlan réfuta
les principes introduits par les écoles Hosso, Kegon et [...] Shingon,
ce que n'avait évidemment pas pu faire le Grand-maître Zhiyi.
Mais ces réfutations ne furent pas prononcées au cours de
débats publics, comme ce fut le cas avec le Grand-maître Zhiyi. Ainsi, le Sutra du Lotus devint comparable à une pièce de tissu de soie précieuse
portée par une nuit obscure, tandis que les mudraet
les mantra dharani*,
dont il n'est nulle part question dans le Sutra du Lotus, s'étalaient,
bien visibles aux yeux de tous. C'est pourquoi chacun s'accorda à
reconnaître la supériorité de l'école Shingon.
[...] Avant de se rendre
en Chine, il [Saicho] étudia
en profondeur les doctrines des six
écoles. De plus, pendant quinze ans, retiré dans la
montagne [le Mont Hiei], il compara
les doctrines des écoles Tendai et Shingon.
Par conséquent, avant même son départ pour la Chine,
en s'appuyant sur l'enseignement du Tendai,
il parvint à réfuter celui des six premières écoles ; si bien que, reconnaissant leur défaite, les supérieurs
des sept temples principaux de Nara
devinrent ses disciples. Ainsi, les principes de ces six
écoles furent invalidés.
Par la suite, dans la 23e année de l'ère Enryaku [804], Saicho partit en
Chine, et il revint au Japon dans la 24e année de la même
ère [805]. Il propagea alors au Japon les enseignements du Tendai et du Shingon.
Mais s'il semble bien qu'il ait discerné dans son coeur la supériorité
des uns par rapport aux autres, il ne s'est pas exprimé publiquement
à ce sujet.
[...] Le Grand-maître Saicho eut un disciple du nom d'Ennin*,
plus tard connu sous le nom de Grand-maître Jikaku. Ce dernier se
rendit en Chine dans la 5e année de l'ère Jowa [838] et
revint au Japon dans la 14e année de la même ère [847].
Pendant cette décennie, il étudia à la fois les doctrines
du Shingon et du Tendai.
Au Japon, il avait étudié en profondeur les doctrines Tendai et Shingon sous la direction des grands maîtres Saicho, Gishin* et Encho*.
De plus, durant les dix années de son séjour en Chine, il
étudia le Shingon sous la direction de huit maîtres
éminents et le Tendai sous la direction de Zongjui, Zhi-yuan et d'autres. De retour
au Japon, il déclara que les écoles Tendai et Shingon correspondaient toutes deux à la saveur du ghee,
et que les sutras de ces deux écoles étaient également
profonds et ésotériques. Cette déclaration fut officialisée
par un édit impérial.
[...] Après lui,
il y eut Enchin*,
connu plus tard sous le nom de Grand-maître Chisho. Avant de se
rendre en Chine, il avait été disciple de l'éminent
moine Gishin*.
Au Japon, il avait étudié les enseignements du Tendai et du Shingon sous la direction de Gishin*, Encho*, Ennin* et d'autres. De plus, il partit pour la Chine dans la 3e année
de l'ère Ninka [853], et en revint dans la 1ère année
de l'ère Jogan [859]. Au cours des sept années qu'il passa
en Chine, il fit une étude approfondie des deux enseignements du Tendai et du Shingon sous la direction d'hommes tels que Faxian et Liang-xu.
[...] Il déclara
que les mérites relatifs des écoles Tendai et Shingon lui apparaissaient aussi clairement que dans un miroir mais que, parce
que ce point susciterait probablement des polémiques à l'avenir,
il désirait résoudre définitivement la question.
A son avis, les deux écoles, Tendai et Shingon étaient comparables
aux deux yeux d'une personne ou aux deux ailes d'un oiseau. Ceux qui donneraient
des interprétations différentes trahiraient l'enseignement
du fondateur de la doctrine, le Grand-maître Saicho,
et n'auraient plus le droit de résider sur le Mont Hiei. Un nouveau décret impérial fit largement connaître
cette position d'Enchin* à travers tout le pays.
[...] Mais je persiste
à croire que ces interprétations avancées par Ennin*, Enchin* et d'autres ne correspondent absolument pas au voeu du Bouddha. Lorsqu'on
lit les huit volumes et vingt-huit chapitres du Sutra du Lotus, il apparaît que si un autre sutra lui
était supérieur, le Sutra du Lotus ne serait plus
qu'un rassemblement de bouddha venus des dix
directions pour amonceler mensonge sur mensonge. Mais en réalité,
lorsque nous étudions attentivement les sutras Kegon*, Nirvana, Hannya*, Vairocana* et Jimmitsu*,
nous ne trouvons nulle part le moindre passage contredisant cette claire
affirmation du Sutra du Lotus : "parmi tous les sutras, celui-ci
est de tous le plus élevé".
[...] C'est pourquoi
bien qu' ils aient avancé quantité d' arguments habiles, Shubhakarasimha*, Xuanzang, Kukai, Ennin*, Enchin* et les autres ne purent trouver le moindre passage prouvant la supériorité
du Sutra Vairocana sur le Sutra du Lotus. Toute leur argumentation repose seulement
sur la présence ou non, dans un sutra, des mudra et des mantra dharani*.
Plutôt que de développer leurs théories en cent volumes,
de faire d'incessants aller et retours entre la Chine et le Japon, de
fomenter d'innombrables intrigues et d'appuyer leur opinion sur l'autorité
de décrets impériaux, ils auraient mieux fait de produire
un passage clair, une preuve littérale irréfutable, tirée
des sutras eux-mêmes. Qui aurait pu alors douter de leurs affirmations
Sous le règne du quarante-quatrième souverain, l'impératrice
Gensho, un religieux venu
d'Inde introduisit le Sutra
Vairocana ; et, à l'époque du quarante-cinquième
souverain, l'empereur Shomu, le moine Ganjin, venu de Chine, introduisit
l'école Ritsu au Japon. Il
apportait aussi avec lui des exemplaires du Hokke
Gengi, du Hokke Mongu*,
du Maka Shikan, du
Jomyo Sho, et d'autres ouvrages de l'enseignement de Zhiyi.
Mais il ne propagea pas l'enseignement des écoles Shingon et Hokke.
Le corps et l'esprit
des simples mortels (Minobu,
à un disciple)
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