Lettre
à Myomitsu Shonin
(Les bienfaits du Sutra du Lotus) Lettres
et traités de Nichiren Daishonin. ACEP - vol. 5, p. 211; SG* p. 671 Minobu, le 5ème jour du 3ème mois intercalaire 1276 à Myomitsu Shonin |
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J'ai bien reçu les cinq kan de pièces seifu que vous m'avez envoyés. Le premier des cinq préceptes est l'interdiction d'ôter la vie, et la première des six paramitas est celle du don. Les dix préceptes de bien, les deux cent cinquante préceptes, les dix préceptes majeurs, et toutes les autres règles de conduite commencent par l'interdiction du meurtre. Chaque être, du plus grand sage au plus petit moustique ou moucheron, considère la vie comme son trésor le plus précieux. Priver un être de la vie est commettre le plus grave de tous les crimes. Quand le Bouddha apparut en ce monde, le premier principe sur lequel il appuya sa conduite fut la bienveillance à l'égard des êtres vivants. Ne pas ôter la vie et pourvoir à la subsistance de ce qui vit sont les deux principaux préceptes exprimant la compassion à l'égard des êtres vivants. En permettant à un autre de subsister, on obtient trois sortes de bienfaits. D'abord, on soutient sa propre vie. Deuxièmement, le visage prend des couleurs. Troisièmement, on gagne en énergie. "On soutient sa propre vie" signifie naître dans les mondes-états des hommes ou du Ciel et obtenir la rétribution karmique d'une grande longévité. En atteignant la bodhéité, vous devenez un Ainsi-Venu sous l'aspect du Corps du Dharma*, dont le corps est aussi vaste que l'espace. Parce que l'on gagne en énergie, étant né dans les mondes-états des hommes ou du Ciel, on devient une personne de mérite, influente, que de nombreuses personnes suivent. En devenant bouddha, on obtient le Corps de Sagesse*, en se manifestant sous l'aspect d'un bouddha assis sur un trône en forme de lotus, aussi brillant que la pleine lune dans un ciel sans nuage un 15 août. Enfin, parce que "le visage prend des couleurs", en étant né dans les mondes-états des hommes ou du Ciel on acquiert les trente-deux traits caractéristiques et on devient d'une beauté aussi exquise et frappante qu'une fleur de lotus. En atteignant la bodhéité, on apparaît sous la forme d'un bouddha du Corps manifesté, comme le Bouddha Shakyamuni. Si nous nous interrogeons sur l'origine du Mont Sumeru, nous voyons qu'il a commencé par un simple grain de poussière ; de même, le grand océan commence par une seule goutte de rosée. En additionnant des éléments un à un, on en obtient deux, puis trois, pour arriver à dix, cent, mille, dix mille, cent mille, ou asogi. Pourtant, un est le nombre qui engendre tous les autres. Pour ce qui est des débuts du bouddhisme au Japon, après sept générations de divinités célestes et cinq générations de divinités terrestres, commencèrent les cent règnes des souverains humains, dont le premier fut l'empereur Jimmu. Sous le règne du trentième souverain à partir de Jimmu, l'empereur Kimmei, les écrits bouddhiques furent introduits au Japon, en provenance du royaume de Paekche, ainsi qu'une statue de Shakyamuni, Maître de la doctrine, apportés par des moines et des nonnes. Puis le prince Shotoku, fils de l'empereur Yomei, commença l'étude des écrits bouddhiques. Il se fit rapporter de Chine un exemplaire du Sutra du Lotus, écrivit des commentaires sur le texte et entreprit d'en propager les enseignements. Par la suite, à l'époque du trente-septième souverain, l'empereur Kotoku, l'administrateur des moines Kanroku introduisit au Japon les écoles Sanron et Jojitsu, en provenance du royaume de Silla. Et, à la même époque, le moine Dosho ramena de Chine les doctrines des écoles Hosso et Kusha, et un moine appelé le Précepteur Shinjo introduisit l'école Kegon. Sous le règne du quarante-quatrième souverain, l'impératrice Gensho, un religieux venu d'Inde [Shubhakarasimha*] introduisit le Sutra Vairocana* ; et, à l'époque du quarante-cinquième souverain, l'empereur Shomu, le moine Ganjin, venu de Chine, introduisit l'école Ritsu au Japon. Il apportait aussi avec lui des exemplaires du Hokke Gengi, du Hokke Mongu*, du Maka Shikan, du Jomyo Sho, et d'autres ouvrages de l'enseignement de Zhiyi*. Mais il ne propagea pas l'enseignement des écoles Shingon et Hokke. Sous le règne du cinquantième souverain, l'empereur Kammu, vécut un jeune moine du nom de Saicho*, que l'on connaîtrait ensuite sous le nom de Grand-maître* Saicho. Avant de se rendre en Chine, il passa quinze ans à étudier seul les écrits et les commentaires des écoles Shingon et Tendai. Puis, le septième mois de la vingt-troisième année de l'ère Enryaku (804), il fit voile vers la Chine. Il revint au Japon au cours du sixième mois de l'année suivante, et, dès lors, enseigna, à plusieurs douzaines de moines érudits des sept temples principaux de Nara, les doctrines des écoles Tendai et Shingon. Quatre cents ans se sont écoulés depuis lors. Au total, plus de sept cents ans ont passé depuis l'introduction du bouddhisme au Japon. Dans cet intervalle, certains ont exhorté le peuple à invoquer le nom d'Amida, d'autres à invoquer le nom de Vairocana ou celui de Shakyamuni. Mais personne n'a encore jamais conseillé de réciter Namu Myoho Renge Kyo, le Titre du Sutra du Lotus. Et cela n'est pas seulement vrai au Japon. En Inde, au cours des mille ans qui suivirent la disparition du Bouddha, il y eut de grands érudits tels que Mahakashyapa, Ananda, Ashvaghosha, Nagarjuna, Asanga et Vasubandhu, qui entreprirent de propager le bouddhisme dans les cinq régions de l'Inde. Et, dans les premiers siècles qui suivirent l'introduction du bouddhisme en Chine, des hommes tels que Kashyapa Matanga et Chu Fa-lan, les Savants-maîtres* Kumarajiva, Huisi, Zhiyi* et Zhanlan* écrivirent des commentaires et firent connaître l'enseignement des sutras. Mais aucun d'eux ne conseilla jamais d'invoquer le Titre du Sutra du Lotus de la même manière que l'on invoque le nom du bouddha Amida. Ils se contentèrent de le réciter eux-mêmes, ou, lorsqu'ils donnèrent des cours sur le Sutra du Lotus, celui qui professait seul récitait [cette invocation, le daimoku]. Les enseignements des huit et neuf écoles (note) diffèrent les uns des autres, mais, d'un point de vue général, nous voyons que, dans la majorité des cas, les fondateurs et maîtres de ces écoles ont récité le nom du bouddha Amida. Viennent ensuite, par ordre d'importance, ceux qui récitèrent le nom du bodhisattva Kannon, ceux qui invoquèrent le nom du Bouddha Shakyamuni, suivis par ceux qui psalmodièrent le nom de Vairocana, de Yakushi* ou d'un autre bouddha. Mais, pour une raison quelconque, aucun d'eux n'a jamais récité le Titre du Sutra du Lotus, le coeur même et l'essence de l'enseignement dispensé par le Bouddha tout au long de sa vie. Vous devriez sérieusement vous demander quelle en est la raison. Un excellent médecin, par exemple, même s'il discerne les causes de toutes les sortes de maladies, et connaît l'efficacité relative de divers médicaments, s'abstiendra d'appliquer le remède le plus puissant, préférant en employer d'autres, selon la nature de la maladie. Ainsi, peut-être parce que, au cours des deux mille ans des époques du Dharma correct et du Dharma formel, après la disparition du Bouddha, la maladie de l'illusion n'était pas encore devenue critique, personne n'a prescrit d'utiliser les cinq caractères de Myoho Renge Kyo, le meilleur remède qui se puisse trouver dans tous les enseignements exposés par le Bouddha de son vivant. Mais, maintenant, nous sommes entrés dans l'époque des Derniers jours du Dharma, et les gens sont tous gravement malades. Il serait difficile de guérir cette maladie par des remèdes aussi anodins que l'invocation des bouddhas Amida, Vairocana ou Shakyamuni. La lune est belle en toute saison, mais c'est seulement en automne qu'on la voit briller dans toute sa splendeur. Les fleurs de cerisier sont exquises, mais c'est seulement au printemps qu'elles s'épanouissent. Tout est régulé par le temps. Puisqu'il en est ainsi, ne pourrions-nous pas supposer que, pendant les deux mille ans des époques du Dharma correct et du Dharma formel, le temps n'était pas encore venu pour que le daimoku soit propagé. Toutefois, ce sont les envoyés du Bouddha qui répandent ses enseignements. Et ces disciples du Bouddha ont reçu de lui des doctrines différentes. Ainsi, les maîtres apparus au cours des mille ans de l'époque du Dharma correct, comme au cours des mille ans de l'époque du Dharma formel, furent pour la plupart des hommes qui avaient reçu les doctrines du Hinayana ou du Mahayana provisoire*, les enseignements théoriques* du Sutra du Lotus ou d'autres enseignements secondaires. Le bodhisattva Jogyo, à qui fut confié le daimoku, coeur de l'enseignement essentiel*, n'était pas encore apparu en ce monde. Mais, maintenant, à l'époque des Derniers jours du Dharma, il va apparaître et propager les cinq caractères de Myoho Renge Kyo dans tous les pays et auprès de tous les peuples du monde. Certainement, cette récitation se répandra et deviendra aussi courante que l'invocation du nom du bouddha Amida partout au Japon à notre époque. Moi, Nichiren, je ne suis ni le fondateur d'une nouvelle école ni l'adepte moderne d'une école plus ancienne. Je suis un moine qui ignore les préceptes, je ne les observe pas plus que je ne les transgresse. Je suis une créature ordinaire, que l'on pourrait comparer à un boeuf ou à un mouton, me préoccupant aussi peu de la sagesse que du manque de sagesse. Pourquoi ai-je commencé à psalmodier comme je le fais. C'est le destin du bodhisattva Jogyo d'apparaître en ce monde pour propager les cinq caractères de Myoho Renge Kyo. Mais, avant même son apparition, comme on parlerait dans un rêve, presque sans savoir ce que je faisais, j'ai commencé à réciter les mots Namu Myoho Renge Kyo, et je les récite désormais. En définitive, ai-je raison ou non d'agir comme je le fais. Je ne sais, et personne ne peut le dire de manière certaine. Quand j'ouvre respectueusement le Sutra du Lotus et le lis attentivement, je vois que même les bodhisattvas Manjushri, Maitreya, Kannon et Fugen, pourtant parvenus à l'étape de togaku avaient bien du mal à mettre en pratique ne serait-ce qu'une phrase ou un seul vers de ce Sutra, parce que dans le texte même il est dit qu'il "ne peut être compris et partagé que par des bouddhas."(réf.) Le Sutra Kegon* constitue le premier énoncé de l'enseignement soudain (tonkyo), exposé immédiatement après l'Éveil du Bouddha, un sutra concrétisant l'enseignement complet et parfait, et pourtant il fut confié aux quatre bodhisattvas, au nombre desquels Sagesse-du-Dharma, pour qu'ils l'exposent. Les sutras Hannya*, bien que d'un autre niveau que le Sutra Kegon*, sont néanmoins les plus élevés de tous les sutras exposés par le Bouddha jusqu'alors. Et pourtant ce fut Subhuti qui reçut la mission de les exposer. Il n'y a que le Sutra du Lotus qui représente l'enseignement merveilleux, des paroles d'or directement sorties de la bouche de Shakyamuni, Bouddha parfaitement doté des Trois Corps. Par conséquent, même les bodhisattvas Fugen et Manjushri furent à peine capables d'en exposer ne serait-ce qu'une phrase ou une stance. Combien plus difficile encore doit-il être pour nous, simples personnes ordinaires vivant à l'époque des Derniers jours du Dharma, de graver dans notre propre vie ne serait-ce qu'un mot ou deux de ce Sutra ! Parce que les fondateurs des diverses écoles lurent et enseignèrent le Sutra du Lotus, leurs disciples respectifs pensèrent tous que leur propre maître avait saisi le coeur du Sutra du Lotus. Toutefois, si nous y regardons de plus près, nous voyons que le Grand-maître* Cien lut le Sutra du Lotus tout en faisant ses maîtres du Sutra Jimmitsu* et du Yuishiki Ron, de même que le Grand-maître* Jizang lut aussi le Sutra du Lotus avec pour maîtres les sutras Hannya* et le Chu Ron*. Des hommes comme Dushun et Fa-zang ont lu le Sutra du Lotus en se fondant sur le Sutra Kegon* et le Jujubibasha Ron. Shubhakarasimha*, Vajrabodhi* et Amoghavajra* ont lu le Sutra du Lotus en prenant le Sutra Vairocana* pour base. Tous ces hommes ont cru avoir lu le Sutra du Lotus. Mais, en réalité, ils n'en ont pas lu une seule phrase, ni même une seule stance. Pour finir, comme le dit le Grand-maître* Saicho* : "Même en faisant l'éloge du Sutra du Lotus, il est possible d'en détruire le coeur."(réf.) Ils sont comparables aux non bouddhistes qui, ayant lu les sutras bouddhiques, les jugèrent identiques aux enseignements non bouddhiques ; ils sont comme des chauve-souris que leur aveuglement amène à confondre le jour et la nuit ; ou comme un homme au visage rouge qui, se voyant dans un miroir, pense que c'est le miroir qui est rouge ; ou encore, comme un homme au visage rond, qui apercevant son reflet dans une lame de sabre étroite, pense que son visage est devenu long et étroit. Moi, Nichiren, je suis différent de personnes de ce genre. Je garde la conviction absolue que l'enseignement du Sutra du Lotus est suprême parmi tous les sutras que le Bouddha "a enseignés, enseigne et enseignera."(réf.) De plus, je récite daimoku, le coeur et le noyau du Sutra tout entier, et j'encourage les autres à faire de même. La personne qui agit ainsi est comparable au liseron serpentaire qui pousse dans un champ de chanvre, ou au bois marqué d'une ligne à l'encre par le charpentier. Même si l'armoise et le bois ne sont pas droits au début, ils le deviendront par la suite. Pareillement, l'esprit de celui qui récite daimoku en suivant l'enseignement du Sutra du Lotus ne sera jamais déformé. Car, il faut le savoir, si l'esprit du Bouddha n'avait pas pénétré en nous, il nous serait impossible, en fait, de réciter daimoku. Les doctrines bouddhiques propagées par d'autres personnes leur ont toujours été enseignées et transmises par leurs maîtres respectifs. Elles sont comparables aux fiefs appartenant aux proches vassaux du suzerain, ou aux États administrés par les intendants des diverses provinces. Même si leurs terres, parfois, ne mesurent pas plus d'un ou deux cho, ils les doivent toujours à une faveur du défunt shogun. Combien plus redevables encore lui sont ceux dont les propriétés mesurent cent ou mille cho, ou couvrent une ou deux provinces entières ! On appelle juste celui qui suit la doctrine d'un bon maître. Et on appelle sage celui qui parvient à la vérité par lui-même, sans l'aide d'un maître. En Inde, en Chine et au Japon, depuis la disparition du Bouddha, il y eut deux sages : Zhiyi* et Saicho*. Ces deux hommes méritent pleinement le titre de sages. On peut également les appeler des justes, car le Grand-maître* Zhiyi* pratiqua les principes enseignés par Huisi ; en ce sens, il fut un juste. Mais il appréhenda aussi, par lui-même, sur le lieu de méditation, le Véhicule suprême qui mène à la bodhéité ; en ce sens, il fut un sage. De même, le Grand-maître* Saicho* reçut, de ses maîtres Dao-sui et Xing-man, les principes de la méditation shikan, et les grands préceptes de l'Éveil parfait. Cela fait de lui un juste. Mais, avant même d'aller en Chine, alors qu'il était encore au Japon, il avait déjà compris et maîtrisé tous les principes de shingon et de shikan sans l'aide d'aucun maître et il avait compris que la sagesse de l'école Tendai surpassait celle des Six et Sept Écoles. Cela fait de lui un sage. Il se trouve que l'on peut lire, dans un des classiques du confucianisme : "Ceux qui ont des choses une compréhension innée sont les plus éminents." Eminent ici, veut dire sage. "Ceux qui étudient, et qui, par l'étude, parviennent à la même compréhension, les suivent Ceux qui... désigne les justes. Et dans l'un des sutras bouddhiques, on lit : "Dans ma pratique religieuse, je ne suis aidé par aucun maître."(réf.) Shakyamuni, seigneur du Dharma, est le plus grand sage en ce monde Saha. Zhiyi* et Saicho* furent tous deux des sages, en même temps que des justes. Ashvaghosha, Nagarjuna, Asanga, Vasubandhu, Lao-Zi et Confucius furent à la fois des sages et des justes, soit des enseignements du Hinayana, soit du Mahayana provisoire* ou des enseignements non bouddhiques ; toutefois, aucun d'eux ne fut un sage ou un juste du Sutra du Lotus. De nos jours, moi, Nichiren, je ne suis ni un sage ni un juste ; je n'observe pas plus les préceptes que je ne les transgresse ; quant à la sagesse, je ne la possède pas plus qu'elle ne me fait défaut. Mais je suis né quelque 2.220 ans après la disparition du Bouddha, dans la dernière période de cinq cents ans, au moment où le Titre du Sutra du Lotus doit être propagé. Et, avant que quiconque, dans aucune autre école - pas plus au Japon que dans ces pays lointains que sont l'Inde et la Chine - ait révélé l'invocation du Titre, j'ai commencé à réciter Namu Myoho Renge Kyo d'une voix sonore, et je continue à le faire depuis plus de vingt ans. Dans ce laps de temps, j'ai été insulté, battu, parfois blessé. A deux reprises, j'ai été exilé, en une occasion, j'ai été condamné à mort, et les autres grandes épreuves que j'ai subies sont trop nombreuses pour être énumérées ; j'ai été comme un germe de soja plongé dans un grand chaudron d'eau bouillante ou comme un gros poisson dans une petite flaque d'eau. Il est dit dans le Sutra du Lotus : "Puisque haine et jalousies abondent déjà du vivant du Bouddha, ne seront-elles pas pires encore en ce monde après son trépas."(réf.) On lit aussi : "Dans le monde, à cette époque, les gens seront très hostiles, et il sera extrêmement difficile de croire."(réf.) Ou encore : "Beaucoup d'ignorants nous insulteront et médiront de nous"(réf.) et "Ils nous attaqueront à coups de sabre et de bâton, de pierres et de tuiles (…) encore et encore, nous serons bannis."(réf.) Si moi, Nichiren, je n'étais pas né sur la terre du Japon, ces passages du Sutra n'auraient été que de vaines paroles dans la bouche du Bouddha - des mots vides de toute signification. Ils auraient été comme des bourgeons fleurissant sans donner de fruit, ou des coups de tonnerre jamais suivis de pluie. Ces paroles d'or du Bouddha auraient été prononcées en vain, et le Sutra du Lotus, dont chaque mot est véridique, aurait été extrêmement mensonger. Lorsque je pense à cela, j'ai l'impression d'être l'égal des sages Zhiyi* et Saicho, et d'être supérieur à Lao-Zi et Confucius. Dans le Japon entier, je suis la seule personne à avoir récité Namu Myoho Renge Kyo. Je suis comme le premier grain de poussière à l'origine du Mont Sumeru, ou la seule goutte de rosée au départ du grand océan. Mais, par la suite, deux, trois, dix, cent personnes se réuniront pour réciter [ce mantra], tant et si bien qu'il se répandra dans une province, deux provinces, dans toutes les soixante-six provinces du Japon, en parvenant jusqu'aux deux îles. Les personnes qui m'ont calomnié le réciteront un jour de la même manière ; et tous, du souverain jusqu'à la multitude de ses sujets, comme c'est décrit dans le chapitre Jinriki* (XXI) du Sutra du Lotus, réciteront à l'unisson Namu Myoho Renge Kyo. Même si les arbres voulaient rester immobiles, le vent ne cesserait pas pour autant de souffler ; et si désireux que nous soyons de retenir le printemps, il devra bien faire place à l'été. Les Japonais ont une haute opinion du Sutra du Lotus, mais parce qu'ils sont hostiles au moine Nichiren, ils refusent de réciter Namu Myoho Renge Kyo. Pourtant, quand les envahisseurs venus du grand royaume des Mongols frapperont de nouveau, une fois ou deux, comme ils l'ont fait à Iki et à Tsushima, attaquant et tuant les hommes, et emmenant les femmes en captivité, livrant bataille pour arriver jusqu'à Kyoto la capitale, et jusqu'à la ville de Kamakura, capturant le souverain lui-même, ses grands ministres et cent personnages officiels, quand [les Mongols] les jetteront dans la poussière, sous les sabots de leurs bœufs et de leurs chevaux, les frappant à coups de pieds et les brutalisant de multiples façons - comment les habitants du Japon pourront-ils éviter de réciter Namu Myoho Renge Kyo. Par le passé, à plusieurs reprises, j'ai été frappé au visage avec le cinquième rouleau du Sutra du Lotus (note), mais je n'en ai pas éprouvé de colère. En fait, j'en étais même ravi. Car être attaqué de la manière décrite dans le chapitre Fukyo* (XX), subir l'assaut prédit dans le chapitre Kanji* (XIII) est, en réalité, un grand honneur. Mais, en voyant ces attaques, quelle honte doivent ressentir Bonten, Taishaku, les divinités Nitten, Gatten et les quatre Rois du Ciel, eux qui firent le serment, en présence du Bouddha, de ne jamais permettre à des hommes mauvais de frapper le Pratiquant du Sutra du Lotus ! Si ceux qui m'attaquent ne sont pas punis en cette vie même, les conséquences n'en seront pas légères. Non seulement ces divinités [pour ne pas les avoir punis] seront détruites dans les trois phases de la vie, mais, en ce moment même, le Bouddha doit leur demander de rendre compte de leurs actions. Et, si cela se produit, ce ne sera en rien la faute de Nichiren ! Ce sont plutôt ces divinités elles-mêmes, en s'alliant aux moines qui s'opposent au Dharma, qui appellent les catastrophes sur elles. Lorsque je pense à tout cela, la sincérité avec laquelle vous me faites parvenir un don de cinq kan de pièces seifu, chaque fois que vous en avez l'occasion, mérite de vous faire connaître comme une personne qui propage le daimoku du Sutra du Lotus au Japon. Peu à peu, lorsqu'une personne, deux, mille, dix mille, cent mille, puis tous les habitants du pays, en viendront à réciter daimoku, avant même que vous le réalisiez, les bienfaits dus à leur pratique s'accumuleront en vous. Ces bienfaits seront comme les gouttes de rosée se rassemblant pour former un grand océan, ou comme des grains de poussière s'accumulant jusqu'à former un Mont Sumeru. Les dix Filles-démones, en particulier, ont fait vœu de protéger ceux qui récitent le daimoku du Sutra du Lotus ; ces divinités doivent donc veiller sur vous, Myomitsu Shonin, ainsi que sur votre femme, comme une mère protège son enfant unique. Elle vous chériront autant qu'un yak est attaché à sa propre queue, et veilleront sur vous jour et nuit. Comme c'est rassurant ! J'aimerais vous dire encore bien d'autres choses, mais je n'ai pas le temps d'écrire plus en détail. S'il vous plaît, expliquez bien tout cela à votre femme. Ce que j'écris ici n'est pas flatterie à votre égard. Plus on travaille l'or à la flamme, plus il acquiert de brillant ; plus on aiguise un sabre, plus il devient tranchant. Et plus une personne vante les bienfaitsdu Sutra du Lotus, plus les bienfaits qu'elle reçoit augmentent. Souvenez-vous que, parmi les vingt-huit chapitres du Sutra du Lotus, seuls quelques passages sont là pour révéler la vérité, mais qu'on y trouve de très nombreuses phrases de louanges (note). Nichiren Le cinquième jour du troisième mois intercalaire ARRIERE-PLAN. - Nichiren
Daishonin écrivit cette lettre au Mont Minobu, le cinquième
jour du troisième mois intercalaire de 1276, à l'âge
de cinquante-cinq ans. Elle était adressée à Myomitsu
Shonin, un croyant qui vivait à Kuwagayatsu, à Kamakura.
On sait peu de chose de Myomitsu, sinon que sa femme et lui semblent
avoir souvent envoyé des offrandes à Nichiren Daishonin,
dans son petit ermitage isolé du Mont Minobu. En anglais : Letter to Myomitsu Shonin ou The Blessings of the Lotus Sutra - http : //www.sgilibrary.org/view.php?page=667&m=1&q=Blessings%20of%20the%20Lotus%20Sutra |
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