Bodhisattva Gadgadasvara
Ce chapitre rapporte l'histoire du bodhisattva Gadgadasvara (Myo-on, Son Merveilleux) qui est arrivé dans le monde Saha en venant d'un monde idéal. Les points importants seront expliqués au fur et à mesure. Relisons d'abord le Sutra.
Rayon de lumière depuis la touffe de poils blancs (urna-kosha)
Lorsque Shakyamuni eut terminé de raconter l'histoire du bodhisattva Bhaishajyaraja*, il
« émit un rai de lumière depuis son chignon-excroissance (ushnisha), marque caractéristique du grand
homme, et il émit une lumière de la marque de touffe blanche
entre ses sourcils (urna-kosha), illuminant complètement, en direction de
l'orient*, autant de mondes de bouddhas que les sables de cent-huit fois
dix mille myriades de milliards de Gange. Au-delà de ce nombre
se trouvait un monde appelé Ornement de Pure Lumière (Vairocana-ragmipratimandita*), et en ce royaume était un bouddha du nom d'Ainsi-Venu Kamaladala-vimala-nakshatra-raga sankusumitabhigna (Roi sage de la constellation Fleur pure, Jokeshukuochi) Arhat*, Samyak-Sambuddha*, Vidya-carana-sampanna*, Sugata*, Lokavit*, Purusa-damya-sarathi*, Sasta deva-manusyanam*, Bouddha*, Bhagavat*,
respectueusement entouré
d'une vaste multitude, innombrable et infinie, de bodhisattvas, il
leur prêchait le Dharma. La clarté émise de la touffe
blanche du Bouddha Shakyamuni illuminait complètement son royaume. »
Cela signifie que, même si le Bouddha Atemporel existe partout, les êtres vivants ne peuvent connaître son existence qu'à travers les enseignements de Shakyamuni. Le rayon de lumière représente la sagesse du Bouddha qui révèle la Vérité universelle.
Cela est régulièrement rappelé depuis le premier chapitre du Sutra du Lotus mais, ici, il est particulièrement important de s'y arrêter. C'est pourquoi l'histoire commence par raconter comment le Bouddha émet un rayon de lumière qui éclaire tous les domaines des bouddhas.
On risque de voir dans cette histoire une simple anecdote et de la mésinterpréter si nous perdons de vue l'importance de ce geste.
Le samadhi
saddharmapundarika (Samadhi du Lotus du Dharma Merveilleux)
Le Bouddha dit :
« En
ce temps-là, il y avait dans le royaume d'Ornement de Pure
Lumière
(Vairocana-ragmipratimandita) un bodhisattva du nom de Gadgadasvara (Son-Merveilleux, Myoon); il avait
de longue date planté une multitude de racines de vertu, personnellement
fréquenté et fait offrande à d'innombrables
milliers de millions de myriades de bouddhas, menant ainsi à l'accomplissement
total une fort profonde sagesse-prajna. Il avait obtenu le recueillement-samadhi dhvajagrakeyura*, le samadhi
saddharmapundarika*, le samadhi vimaladatta*, le samadhi nakshatra-rajavikridita*,
le samadhi anilambha*,
le samadhi jnanamudra*,
le samadhi sarvarutakaushalya*, le samadhi
sarvapunyasamukkaya*, le samadhi prasadavati*,
le samadhi riddhivikridita*,
le samadhi jnananolika*,
le samadhi viaharaja*, le samadhi vimalaprabha* , le samadhi vimalagarbha* , le samadhi apkritsana*,
le samadhi suryavarta* ;
il obtint ainsi autant de grands samadhis que les sables de mille
millions
de myriades de Gange. »
Le terme sanskrit "samadhi" désigne la concentration de l'esprit sur un seul objet, sans se laisser distraire par aucune pensée adventice. Il est fait mention de seize sortes de samadhis ayant chacune une signification spéciale.
- Samadhi dhvajagrakeyura (marque de l'étendard sublime) désigne la certitude ferme et inébranlable que le Sutra du Lotus est le cœur de tous les enseignements du Bouddha.
-
Samadhi saddharmapundarika (lotus du Dharma merveilleux) désigne une croyance profonde dans les enseignements du Sutra du Lotus et sa mise en pratique sans aucune distraction. On considère que ce samadhi est emblématique car toutes les autres en dérivent.
Samadhivimaladatta (pure vertu)se réfère à l'état mental d'une personne possédant la pure vertu mais qui n'en est pas consciente. Une personne qui entre dans ce samadhi n'est ni arrogante ni égocentrée, et ses paroles ainsi que sa conduite influencent naturellement ceux qui l'entourent.
Samadhi nakshatra-rajavikridita (plaisirs du Roi des Constellations)désigne la concentration sur le désir de devenir un bouddha ou un grand bodhisattva doté des vertus héritées de ses vies précédentes et capable de guider spontanément les autres vers la bodhéité tout en la recherchant pour soi avec opiniâtreté.
Samadhianilambha (sans condition)signifie : se consacrer au salut aussi bien des proches que des êtres qui nous sont inconnus.
- Samadhi jnanamudra (sceau ou mudra de sagesse), c'est se concentrer profondément sur une personne afin de la comprendre et d'avoir sur elle une influence bénéfique.
- Samadhi sarvarutakaushalya (compréhension des langages de tous les êtres) est un état où l'on est capable de discerner les désirs de tous les êtres et de méditer sur le moyen de leur prêcher de façon adaptée à leurs capacités.
- Samadhi sarvapunyasamukkaya (rassemblement de tous les mérites), c'est se concentrer sur l'idée que les mérites-bienfaits (kudoku) de tous les enseignements équivalent à un seul kudoku, à savoir que nous-mêmes et les autres deviendrons des bouddhas.
- Samadhi prasadavati (pureté ; celle qui est favorable), c'est consacrer son coeur et son âme à une seule chose par laquelle on élimine toutes les illusions et grâce à laquelle on garde la pureté du corps.
- Samadhi riddhivikridita (jeu dans les pouvoirs mystiques ou plaisirs de la puissance magique), c'est s'efforcer à maintenir un état mental libre dans toutes les circonstances.
- Samadhi jnananolika (torche de la science : compréhension de la triple vérité), c'est désirer diriger la lumière de la sagesse vers son entourage comme une torche projette au loin sa lumière.
- Samadhi viaharaja (Roi des Ornements ou de la Construction), c'est désirer être une personne ayant une vertu telle qu'elle influence les autres.
- Samadhi vimalaprabha (Pure Clarté ou Splendeur sans
tache), c'est désirer purifier son entourage en émettant de son corps pur un éclat.
- Samadhi vimalagarbha (Pur-Réceptacle), c'est se concentrer sur le désir de remplir son esprit de pureté.
- Samadhi apkritsana (exclusivité ou qui enlève toute l'eau), c'est avoir comme idéal d'atteindre le même état d'esprit que le Bouddha et de pratiquer les enseignements qui mènent à cet idéal.
- Samadhi suryavarta (Révolution solaire) c'est arrêter les pensées adventices et laisser advenir toute chose , comme le soleil donnant la vie brille sur tout.
Dès que le rai de lumière du Bouddha Shakyamuni atteignit le bodhisattva Gadgadasvara (Son Merveilleux) ce dernier dit au bouddha Roi sage de la Constellation
Fleur Pure* :
« "Bhagavat, je pars
pour le monde Saha* afin de rendre
hommage au Bouddha Shakyamuni, l'approcher personnellement pour lui
faire offrande,
ainsi que pour voir le bodhisattva Manjushri*,
le prince du Dharma, le bodhisattva Bhaishajyaraja*,
le bodhisattva Ksemadatta*,
le bodhisattva Nakchatra-raja-samkusumitabhijana*, le bodhisattva Vishishta-caritra*, le bodhisattva Vyuha-raja*, le bodhisattva Bhaishajyaraja
samudgata."
« Alors l'Éveillé Kamaladala-vimala-nakshatra-raga-sankusumitabhigna* déclara au bodhisattva Gadgadasvara* :
"Ne va pas, par mépris de ce royaume, concevoir à son
propos des idées
d'infériorité. Fils de foi sincère*,
ce monde Saha* est inégal, avec des hauteurs et des dépressions,
il a des montagnes de terre et de pierres, il est rempli d'impuretés ;
le corps du Bouddha y est étriqué, la multitude des
bodhisattvas y est également d'allure médiocre, alors
que ton corps est de quarante-deux mille yojanas et
que le mien est de six millions huit
cent mille yojanas. Ton corps à toi
est des plus beaux de figure, merveilleux et resplendissant dans ses
centaines, ses milliers, ses
dizaines
de milliers de mérites. C'est pour cette raison que tu ne dois
pas aller, par mépris de ce royaume, de son Éveillé,
de ses bodhisattvas ou même de son sol, en concevoir des idées
d'infériorité."
« Le bodhisattva Gadgadasvara* s'adressa à l'Éveillé:
"Bhagavat, si je me rends à
présent dans le monde Saha,
c'est entièrement par la force du bouddha, le jeu des pouvoirs
surnaturels du Bouddha, les ornements de mérites et de
sagesse du Bouddha."»
L'idéal et la réalité
Que veut dire le fait qu'en comparaison avec le bouddha Kamaladala-vimala-nakshatra-raga-sankusumitabhigna* et le bodhisattva Gadgadasvara*, le corps du Bouddha Shakyamuni est de petite taille et que tous les bodhisattvas ont une petite stature et n'émettent pas de rayons de lumière ? Ces mots expriment l'énorme distance qui existe entre l'idéal et la réalité. Le royaume où réside
le bouddha Kamaladala-vimala-nakshatra-raga-sankusumitabhigna* est un monde idéal qui se situe dans les cieux. Pour cette raison, les corps des bouddhas et des bodhisattvas sont extrêmement grands et d'une brillance merveilleuse.
Que comprenons-nous en lisant qu’en comparaison avec le bouddha Kamaladala-vimala-nakshatra-raga-sankusumitabhigna* et le bodhisattva Gadgadasvara*, le corps de Shakyamuni est de petite taille et que tous les bodhisattvas sont d'allure médiocre et qu'ils n'émettent pas de rayons de lumière ? Ces mots expriment l'énorme distance qui existe entre l'idéal et la réalité. Le royaume où réside le bouddha Kamaladala-vimala-nakshatra-raga-sankusumitabhigna* est un monde idéal qui se situe dans les cieux. Pour cette raison, les corps des bouddhas et des bodhisattvas y sont extrêmement grands et d'une brillance merveilleuse.
Qu'est-ce que la réalité ? Elle n'a rien d'impressionnant face à l'idéal. Elle est bien plus petite, mesquine et banale. Une personne qui s'est perfectionnée dans le monde réel est bien plus sacrée que la forme idéale dans les cieux, même si son corps est petit et si elle n'est pas brillante. Il n'y a rien de plus sacré que le fait d'atteindre l'état mental du Bouddha dans le monde réel rempli d'obstacles érigés par des hommes à l'esprit mauvais. Le Bouddha Kamaladala-vimala-nakshatra-raga-sankusumitabhigna* tenait à faire comprendre cela au bodhisattva Gadgadasvara.
« A
ce moment, le bodhisattva Gadgadasvara*, sans se lever de son siège, le corps imperturbable,
entra en recueillement-samadhi.
Grâce à la force de son samadhi*, sur le Mont du Pic
du Vautour, non loin du lieu du Dharma,
il créa une fantasmagorie de quatre-vingt-quatre mille précieuses
fleurs de lotus, aux tiges d'or du
fleuve Jambu,
aux feuilles d'argent blanc, au coeur de diamant*, au calice de joyau kimshuka.
« Alors le
prince du Dharma [kumara] Manjushri*,
voyant ces fleurs de lotus, s'adressa au Bouddha: "Pour quelle
raison fait-on apparaître d'abord ces signes auspicieux, ces multiples
milliers et dizaines de milliers de fleurs de lotus aux tiges d'or
du fleuve Jambu, aux feuilles d'argent blanc,
au coeur de diamant*, au calice de joyau kimshuka? "
« Alors le
Bouddha Shakyamuni
déclara à Manjushri*: "le
bodhisattva-mahasattva Gadgadasvara* désire
venir en ce monde Sahaen provenance
du royaume du bouddha Kamaladala-vimala-nakshatra-raga-sankusumitabhigna* entouré
de quatre-vingt-quatre mille bodhisattvas, afin de me rendre hommage,
de m'approcher personnellement pour me faire offrande, et aussi dans
le désir
de faire offrande au Sutra du Lotus du Dharma et de l'écouter."
« Manjushri s'adressa à l'Éveillé:
"Bhagavat, quelles racines de bien ce bodhisattva a-t-il implantées,
à quels mérites s'est-il exercé pour être
capable de posséder une telle force dans ses pouvoirs supranaturels? Quel samadhi* a-t-il pratiqué? Veuille nous exposer le nom de ce samadhi*,
car nous voulons nous aussi nous appliquer à
sa pratique et, par l'exercice de ce samadhi*, être
capables de voir la forme et les marques de ce bodhisattva, sa taille,
sa majesté,
sa conduite. Mon seul souhait est que le Bhagavat, grâce à la force de ses pouvoirs
mystiques, nous permette
de voir ce bodhisattva lorsqu'il arrivera."
« Alors le
Bouddha Shakyamuni déclara à Manjushri :
" L'Ainsi-Venu Taho*,
celui qui est depuis longtemps passé en parinirvana,
vous fera apparaître ses marques caractéristiques."
A ce moment, le bouddha Taho* déclara à ce bodhisattvas:
"Viens, fils de foi sincère*,
le prince du Dharma Manjushri* désire te voir en ton corps."
« Sur ce,
le bodhisattva Gadgadasvara* disparut de son royaume et arriva, surgissant en compagnie de quatre-vingt-quatre
mille bodhisattvas. Les royaumes qu'il traversa tremblèrent
de six façons; en tous on vit pleuvoir
des fleurs de lotus des sept matières précieuses;
de célestes musiques résonnèrent d'elles-mêmes,
sans qu'aucun instrument fût frappé. Ce bodhisattva avait
les yeux comme d'immenses feuilles de lotus bleu; même en réunissant
des centaines, des milliers, des dizaines de milliers de lunes, la
beauté
de sa figure les aurait encore dépassées. Son corps avait
la couleur de l'or authentique, orné d'innombrables centaines
et milliers de mérites, éclatant de majesté, resplendissant
de lumière, totalement muni des marques caractéristiques,
à l'instar du solide corps de Narayana*.
Il entra sur la terrasse de sept matières précieuses et
s'éleva dans l'espace, à une hauteur de sept arbres tala,
respectueusement entouré d'une multitude de bodhisattvas, et
se rendit au Pic du Vautour en ce monde Saha.
« Une fois arrivé, il descendit de la terrasse de sept matières
précieuses et, tenant un pectoral dont le prix se chiffrait par
centaines et milliers, arriva auprès du Bouddha Shakyamuni. Il
le salua en inclinant la tête jusqu'à ses pieds, présenta
le pectoral et s'adressa au Bouddha : "Bhagavat, l'Éveillé Kamaladala-vimala-nakshatra-raga-sankusumitabhigna* salue le Bhagavat en lui souhaitant peu de maladies, peu de chagrins, aise dans
ses déplacements. Sa pratique est-elle commode ou non? Les quatre
éléments* sont-ils chez lui en harmonie ou non? Peut-il prendre en patience les
affaires du monde ou non? Les êtres sont-ils faciles à
sauver ou non? Sont-ils exempts de convoitise*, de colère, de
sottise, de jalousie, d'avarice, d'orgueil ou non? Sont-ils exempts
d'ingratitude à l'égard de leurs parents, d'irrespect
à l'égard des religieux, de vues corrompues, de mauvaises
pensées, d'incontinence des cinq
désirs ou non? Bhagavat, les
êtres sont-ils capables de soumettre les ennemis-mara ou non? L'Ainsi-Venu Taho*,
passé de longue date en parinirvana,
est-il venu dans sa Tour aux Trésors écouter le Dharma
ou non? "
« Il s'enquit aussi de l'Ainsi-Venu Taho, lui souhaitant soulagement, peu
de chagrins, sa patience est-elle durable ou non? "Bhagavat, je désire maintenant voir le bouddha Taho en son corps. Mon seul souhait est
que le Bhagavat me le fasse voir." Alors le Bouddha Shakyamuni
parla au bouddha Taho :
"Ce bodhisattva Gadgadasvara* désire pouvoir te rencontrer."
« A ce
moment, le bouddha Taho déclara
à Gadgadasvara* :
"C'est bien, c'est très
bien, tu as été capable de venir jusqu'ici afin de faire
offrande
au Bouddha Shakyamuni, d'écouter le Sutra du Lotus du Dharma et voir Manjushri* et
les autres."»
Les paroles prononcées par le Bouddha Prabhutaratna (Taho) sont très importantes. En tant que témoin de la vérité, Prabhutaratna déclare que la première nécessité, pour tout le monde, est de toujours accomplir ce qui suit : rendre hommage au Bouddha Shakyamuni qui prêcha la Vérité, écouter les prêches concernant la Vérité (c'est-à-dire le Sutra du Lotus), et suivre le modèle des bodhisattvas vertueux qui pratiquent l'enseignement.
« Alors
le bodhisattva Padmashri* s'adressa à l'Éveillé: "Bhagavat, quelles racines de bien ce bodhisattva Gadgadasvara* a-t-il plantées, à quels mérites
s'est-il exercé pour avoir ces pouvoirs
surnaturels? " Le Bouddha déclara au bodhisattva Padmashri* :
« Il était
dans le passé un bouddha du nom de Meghadundubhisvararaja (Roi au Son d'Orage des Nuées), Ainsi-Venu, Arhat*,
complet et parfait Éveillé ; son royaume avait nom Apparition
de Tous les Mondes (Sarvabuddhasamdrashana)
; son kalpa avait nom Vue de Joie.
Le bodhisattva Gadgadasvara* , douze mille ans durant, fit offrande de cent mille
sortes de musiques au bouddha Meghadundubhisvararaja* et lui fit en même temps
présent de quatre-vingt-quatre mille bols faits des sept matières
précieuses. Grâce à la rétribution (ho)
de ces circonstances, il est à présent rené dans
le royaume du bouddha Kamaladala-vimala-nakshatra-raga-sankusumitabhigna* en possession de ces forces
supranaturelles.
Padmashri*, qu'en
est-il
à ton avis? Le bodhisattva Gadgadasvara qui, en ce temps-là, auprès du bouddha
Meghadundubhisvararaja*, fit offrande de musique et offrit des vases précieux,
pourrait-il être un autre Gadgadasvara ? Cet actuel bodhisattva-mahasattva Gadgadasvara, c'est lui. Padmashri*, le bodhisattva Gadgadasvara a déjà auparavant approché personnellement
et fait offrande à d'innombrables bouddhas, implantant de longue
date les racines de mérites; il a aussi rencontré des
milliers de millions, des myriades et des milliards de bouddhas,
nombreux comme
les sables du Gange.
Rendre hommage au Bouddha par de la musique signifie honorer sa vertu. Ceci devrait être interprété plutôt comme une louange par la parole que par de la musique instrumentale.
Lepouvoir des mots
Le bouddhisme accorde une grande importance aux mots. Les sourires et les paroles aimables sont une manière de guider les gens vers la délivrance. Dans le bouddhisme ésotérique, on croit que les mots secrets et mystiques ont le pouvoir d'écarter tous les maux et les malédictions. Dans le chapitre XXVI du Sutra du Lotus, les dharanis, formules composées de syllabes mystiques qui nourrissent la vie spirituelle du récitant, sont supposées détenir un pouvoir mystique.
On trouve une conception analogue dans la Bible judéo-chrétienne. L'Évangile de Saint Jean commence par les mots : ‘‘Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu.’’(réf.)
La science moderne fait remarquer que les pensées naissent des mots. Lorsque nous réfléchissons à quelque chose, nous le formulons mentalement par des mots. Nous n'arrivons pas à penser sans utiliser de mots.
Quant au nom du bodhisattva Gadgadasvara (Myo-on, Son Merveilleux), nous découvrons qu'il est probablement dérivé de l'expression "paroles de vérité". Le Bouddha ne se réjouit pas du fait que les personnes lui rendent simplement hommage avec de la musique, si belle qu'elle soit. Il ne reçoit de véritable satisfaction que des personnes qui le louent par les paroles de vérité. C'est dans ce sens que nous devons aussi comprendre la phrase ‘‘fit en même temps présent de quatre-vingt-quatre mille bols en sept matières précieuses’’. Offrir de nombreux bols au Bouddha n'a pas de quoi réjouir celui-ci. Dans le bouddhisme, le terme "quatre-vingt-quatre mille" est utilisé pour indiquer un nombre infini de sutras et signifie donc que Gadgadasvara (Son Merveilleux) prêcha les enseignements du Bouddha à de nombreuses personnes en reconnaissance d'avoir reçu la grâce de bouddha.
Le Bouddha continue à prêcher :
« Padmashri*, tu ne vois que le bodhisattva Gadgadasvara ici présent en son corps, alors que ce bodhisattva fait apparaître une variété de corps qui, en tous
endroits, exposent ce Sutra à l'intention des êtres :
soit qu'il apparaisse dans le corps du seigneur Brahma*,
soit qu'il apparaisse dans le corps d'Indra,
soit dans le corps du Souverain Shakra,
soit dans le corps du Grand-Souverain Mahaishvara*,
soit dans le corps d'un général en chef céleste,
soit dans le corps de Vaisravana*, soit
dans le corps d'un roi balachakravartins*,
soit dans le corps de l'un des rois mandalins*,
soit dans le corps
d'un homme riche, soit dans le corps d'un maître
de maison, soit dans le corps d'un fonctionnaire, soit dans le corps
d'un brahmane, soit dans le
corps d'un bhiksu* ou d'une bhiksuni*,
d'un upasaka* ou
d'une upasika*,
soit dans le corps de l'épouse d'un homme riche ou d'un maître
de maison, soit dans le corps d'une épouse de fonctionnaire,
soit dans le corps d'une épouse de brahmane, soit dans
le corps d'un garçon ou d'une fille, soit dans le corps
d'un deva*,
d'un naga*, d'un gandharva*,
d'un asura*, d'un garuda*,
d'une kimnara*, d'un mahoraga*,
d'un humain et non-humain, pour exposer ce Sutra.»
Le Bouddha cite trente-quatre sortes de "corps" dans lesquels se manifeste Gadgadasvara pour dire que le bodhisattva se transforme et apparaît de diverses manières suivant l'époque et les circonstances, sans d’ailleurs se limiter à ces trente-quatre corps. Dans le monde Saha et dans tous les royaumes, il guide tous les êtres vivants par ses moyens appropriés (hoben) selon le caractère et la capacité de chacun.
« Alors
le bodhisattva Padmashri*,
s'adressa à l'Éveillé: "Bhagavat, ce
bodhisattva Gadgadasvara a profondément planté ses racines de bien. Bhagavat, en quel samadhi* ce bodhisattva demeure-t-il pour être capable de délivrer les êtres
en de telles transformations et apparitions? "
« L'Éveillé déclara
au bodhisattva Padmashri* : "Fils de foi sincère*, son samadhi* a nom Apparition
sous Toutes les Formes Corporelles; c'est en demeurant dans ce samadhi* que
le bodhisattva Gadgadasvara a été capable de dispenser de la sorte ses bienfaits à des êtres
innombrables."
« Tandis que
s'exposait ce chapitre du Bodhisattva Gadgadasvara, les
quatre-vingt-quatre mille qui étaient venus en compagnie du bodhisattva Gadgadasvara obtinrent
tous le samadhi* d'Apparition sous Toutes les Formes Corporelles; d'innombrables
bodhisattvas de ce monde Saha obtinrent également ce samadhi* ainsi que sa dharani.
« Alors le bodhisattva-mahasattva Gadgadasvara,
ayant fait offrande au Bouddha Shakyamuni et à la Tour aux Trésor du bouddha Taho*, s'en retourna à sa terre
d'origine. Les royaumes qu'il traversa tremblèrent de six façons,
il y tomba une pluie de fleurs de lotus précieuses, il s'y fit
des milliers de millions et des myriades de variétés de
musiques. Dès qu'il arriva dans son royaume d'origine, entouré des quatre-vingt-quatre mille bodhisattvas, il se rendit auprès
du bouddha Kamaladala-vimala-nakshatra-raga-sankusumitabhigna* et s'adressa à lui: "Vénéré du monde, arrivé au monde Saha*,
j'ai dispensé aux êtres une abondance de bienfaits; j'y
ai vu le Bouddha Shakyamuni ainsi que la Tour aux Trésor du bouddha Taho,
je leur ai rendu hommage et fait offrande. J'y ai vu encore le bodhisattva Manjushri*,
prince du Dharma, ainsi que le bodhisattva Bhaishajyaraja*,
le bodhisattva Pradanashura*, le bodhisattva Ksemadatta* et d'autres ; j'ai également permis à ces quatre-vingt-quatre
mille bodhisattvas d'obtenir le samadhi* d'Apparition
sous Toutes les Formes Corporelles." »
Le chapitre se termine par la phrase suivante :
« Quand ce chapitre du Bodhisattva Gadgadasvara fut exposé,
quarante-deux mille fils de devas* obtinrent l'adhésion à la non-production des entités et le bodhisattva Padmashri* obtint le samadhi* du Lotus du Dharma. »
À la lecture de la partie finale de ce chapitre, on peut se demander si le bodhisattva Gadgadasvara ne serait pas le Bouddha Atemporel. Gadgadasvara peut se transformer et apparaître sous diverses formes partout. Il est même écrit :
« si c'est quelqu'un qui doit être sauvé par
un bouddha, il apparaît alors en figure de bouddha pour lui prêcher
le Dharma.»
Mais Gadgadasvara n'est pas le Bouddha Atemporel. C'est un bodhisattva qui agit comme messager. Ce bodhisattva est de loin inférieur à l'Ainsi-Venu Shakyamuni car ce dernier est le Bouddha manifesté (ojin) avec son pouvoir d'éveiller tous les êtres vivants.
Comme nous l'avons vu, le bodhisattva Gadgadasvara représente un idéal : c'est un bodhisattva qui prêche de différentes manières un état d'esprit idéal. Il enseigne la suprême vertu à laquelle chaque personne doit aspirer, l'attitude idéale pour les hommes d'État, les hommes d'affaires, les savants et les maîtresses de maison. L'enseignement d'un état d'esprit idéal est certes fort louable mais n'est valable que lorsqu'il se traduit petit à petit dans la vie quotidienne.
Ceci est illustré par les actes de Gadgadasvara. Ce bodhisattva — ou idéal — avec son corps d'or resplendissant et d'une taille infinie, se rend auprès de Shakyamuni qui est doté des trente-deux signes et des quatre-vingt marques corporelles caractéristiques d'un bouddha mais qui a pris la forme d'un homme ordinaire (bompu), il s'incline à ses pieds en lui offrant un collier précieux. Gadgadasvara, symbole de l'idéal, loue le Bouddha Shakyamuni apparu dans ce monde sous la forme d'un homme accompli, en reconnaissant en lui celui qui a réalisé l’idéal. Gadgadasvara vint d'un royaume idéal dans le monde réel afin de louer et de prouver combien il est merveilleux et sacré pour les hommes d'établir le Dharma Correct et de construire une société idéale dans ce monde Saha plein d'impuretés et de maux.
L'idée profonde du chapitre XXIV est qu'un idéal n'est pas vraiment sacré tant qu'il n'est pas réalisé petit à petit par les hommes. Bien que les bouddhas qui demeurent dans des mondes idéaux, comme l'Ainsi-Venu Mahavairocana et l'Ainsi-Venu Amida, fussent parfaitement respectables, c’est le Bouddha Atemporel qui est à honorer dans l'incarnation de cet idéal, c'est l'Ainsi-Venu Shakyamuni, qui doit être le véritable objet de vénération de ceux qui vivent dans ce monde.
Suite
Chapitre XXIV du Sutra du Lotus
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