Un bouddhisme pour notre temps Une interprétation moderne du Triple Sutra du Lotus par |
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Conduite originelle du bodhisattva Yakuo Avec le chapitre XXII, Passation, se termine l'étude des points principaux du Sutra du Lotus. Nous pouvons nous demander alors pourquoi le Bouddha prêcha six chapitres de plus. En effet, avec le chapitre XXII, nous avons pu comprendre les idées fondamentales des enseignements de Shakyamuni, raffermir notre foi et former la résolution de les pratiquer. Il est facile de parler des enseignements du Bouddha mais il est très difficile de les pratiquer. Nous avons défini une attitude de base envers la pratique. Mais lorsque nous arrivons à la pratique concrète des enseignements, nous avons besoin de confirmer notre attitude une fois de plus. Comment faire ? Nous devons nous appuyer sur quelque chose qui nous encourage et nous inspire afin de ne jamais abandonner ni oublier l'attitude fondamentale de la pratique. En un mot, nous devons rechercher une impérieuse motivation pour pratiquer. Quelle est donc cette impérieuse motivation ? On peut en trouver quelques suggestions chez les pratiquants du passé. Les exemples de ceux qui ont pratiqué autrefois la Voie du Bouddha peuvent nous inspirer pour obtenir les mêmes mérites-kudokus. C'est un peu comme l'éducation morale par l'exemple dans la vie quotidienne. Lorsque les parents enseignent à leurs enfants qu'il faut être prévenant avec les personnes âgées, on peut se demander s'ils appliquent leurs propres conseils. Les parents peuvent, au moins, donner un exemple concret aux enfants. S'ils disent : ‘‘Aujourd'hui, dans l'autobus, j'ai vu un petit garçon céder son siège à une vieille dame. Sa gentillesse et sa prévenance m'ont fait vraiment plaisir’’, l'enfant se sentira concerné et voudra, le cas échéant, suivre l'exemple du petit garçon. Nous avons besoin de modèles concrets pour nous encourager à pratiquer le bien. Qui donc prendre comme modèle pour notre pratique de la Voie bouddhique ? Bien sûr, on devrait tous suivre le modèle de Shakyamuni en personne et commencer par marcher sur le chemin qu’il a montré. Mais nous n'avons aucune idée de la façon de procéder pour imiter le Bouddha parce qu'il est parfait et sans défaut ‘‘ayant réalisé jusqu'à leur terme toutes les vertus’’. Les gens ordinaires peuvent imiter bien plus facilement les vertus ou les actions d'un bodhisattva. Les chapitres qui terminent le Sutra du Lotus décrivent une série de bodhisattvas-modèles. Dans ces chapitres, chaque vertu de bodhisattva est présentée de manière idéalisée ; le Bouddha, nous incitant à oublier notre autosatisfaction, nous propose d'en faire autant. Notre vie spirituelle est un processus continuel d'essais et d'erreurs : nous faisons deux pas en avant et un pas en arrière. Lorsque nous lisons les six derniers chapitres du Sutra du Lotus, nous sommes encouragés à ne pas être négligents ou arrogants. Il n’est donc pas question de faire l’impasse sur ces chapitres. Ce n'est pas parce que nous avons compris les chapitres précédents que nous pouvons nous dispenser de lire la suite. Nous devons veiller à ne pas mal interpréter ces descriptions merveilleuses qui tranchent avec les chapitres précédents du Sutra. Ce qui compte, c'est l'esprit et la signification profonde qui sont cachés derrière les événements fantastiques. Ainsi, ce chapitre XXIII relate l'histoire du bodhisattva Bhaishajyaraja* (Yakuo) qui mit le feu à ses bras. Dans l'Inde ancienne, de nombreux ascètes firent réellement de telles choses. En Chine et au Japon aussi, sans oublier le Vietnam, il y eut des cas de moines bouddhistes qui se sont immolés par le feu et qui sont morts assis calmement dans les flammes. Cependant, de telles pratiques vont à l'encontre de l'enseignement de la Voie du Milieu prêchée par le Bouddha et ne sont pas dignes de notre admiration. Pourquoi donc le bodhisattva Bhaishajyaraja est-il loué pour une pratique semblable ? Parce que, de nos jours, nous devons prendre pour modèle le zèle qu'il exprime par ce geste. Brûler son bras symbolise l'esprit indomptable dans la pratique de l'enseignement. En pratiquant le Dharma "au risque de sa vie", Bhaishajyaraja manifeste sa conviction inébranlable. C'est cet engagement profond que nous pouvons admirer sans nous laisser abuser par le sens littéral des mots. Deuxièmement, nous commettons une grave erreur si nous interprétons superficiellement la façon d’obtenir le salut. Par exemple, dans le chapitre XXV, Porte universelle du bodhisattva Avalokiteshvara (Kannon) il est dit :
On pourrait en déduire que nous n'avons pas à faire d'effort pour être sauvés mais, si nous adoptons cette croyance, aucun des enseignements du Sutra du Lotus ne portera de fruit. Il est évident que le Bouddha ne peut pas s'être contredit dans les six derniers chapitres de façon à renier fondamentalement tous les enseignements prêchés jusqu'au chapitre XXII. Il est difficilement croyable que, pendant des siècles, de nombreuses personnes ont adopté des interprétations superficielles sur un point si évident pour se tourner vers une croyance facile et paresseuse, comme si seulement penser à Avalokiteshvara pouvait leur permettre de se libérer de la souffrance. Lorsque nous lisons le chapitre XXV avec attention et en profondeur, nous comprenons que les pouvoirs surnaturels de ce bodhisattva sont identiques dans leur essence au pouvoir du Dharma prêché par Shakyamuni. Nous réalisons que notre vie spirituelle ne doit dépendre que du Dharma, que nous devons le cultiver et le pratiquer en prenant pour modèle immédiat le bodhisattva Avalokiteshvara. Il est grandement regrettable que des interprétations erronées et simplistes des sutras aient pu pénétrer profondément dans l'esprit des gens pendant de nombreux siècles, corrompant ainsi le véritable esprit du bouddhisme. Espérons sincèrement que les lecteurs de ce livre ne feront pas la même erreur. Examinons maintenant le contenu du chapitre XXIII. Dans le chapitre précédent, tous se réjouissaient de l'enseignement du Bouddha. Maintenant, le bodhisattva Nakchatra-raja-samkusumitabhijana (Splendeur Royale des Constellations) s'adresse à l'Éveillé :
L'expression "voyager jsqu'au monde Saha" signifie que le bodhisattva Bhaishajyaraja apparaît librement n'importe où dans notre monde pour éveiller et sauver tous les êtres vivants.
Comme nous l'avons vu au chapitre 12, Devadatta, la raison pour laquelle les femmes sont mentionnées ici au même titre que les enfers, les esprits faméliques, les animaux et les asuras, provient de l'idée généralement acceptée en Inde ancienne que les femmes étaient l'incarnation du mal et faisaient obstacle à la pratique des disciplines spirituelles des hommes. Nous n'avons donc pas à prendre la mention des femmes au sens littéral dans un tel contexte. Souvenons-nous que les enseignements du Bouddha ont réfuté cette idée généralement admise en Inde à cette époque.
"Le samadhi* d'apparition sous toutes les formes corporelles (sarva rupa sam darshana) " est celui du bodhisattva qui peut choisir d'apparaitre avec un corps ou sous une forme adaptée pour mener les êtres vers le Dharma. S'il y a des hommes qui peuvent être guidés avec douceur, le bodhisattva prend une expression douce et utilise des mots doux. S'il y a des hommes qui ont besoin d'être instruits plus strictement, il adopte une attitude plus sévère comme Fudo-Myo-o* (Acala) et prononce des paroles dures. Le bodhisattva change ainsi spontanément et sans se tromper. Une personne qui n'a pas encore atteint ce samadhi* a du mal, pour apprécier la capacité des autres, à comprendre l'enseignement et ne réussit pas à les guider. C'est un avertissement judicieux pour nous qui croyons au Sutra du Lotus et qui le pratiquons à l'époque du Dharma dégénéré (mappo).
Faire brûler de nombreuses sortes d'encens et boire des huiles essentielles de fleurs est une façon de purifier son corps. Cet acte symbolique nous dit que nous devons d'abord purifier notre comportement avant de rendre hommage au Bouddha. Dans l'expression "par la force de ses pouvoirs supranaturels", les pouvoirs ne sont pas ceux que l'on exerce pour soi-même mais ceux que l'on utilise dans le but de propager les enseignements du Bouddha. Le plus grand hommage que l'on puisse rendre au Bouddha est d'obtenir ce pouvoir surnaturel et propager spontanément ses enseignements.
Le don suprême Ici, le Bouddha, exalte l'enseignement selon lequel pratiquer le Dharma est le véritable hommage à l’Ainsi-Venu et que le véritable don est la pratique du Dharma. Brûler son corps, c'est se consacrer au Dharma et endurer les difficultés et les sacrifices que cela peut entraîner.
Ces paroles prononcées par le bodhisattva montrent la faim et la soif des disciples pour le Bouddha. C'est une exaltation spirituelle par laquelle le désir des disciples et la compassion du Bouddha envers eux se rejoignent parfaitement. Puissions-nous être prêts à prononcer les mêmes paroles que le bodhisattva quand nous verrons le Bouddha.
Qu'est-ce qui explique cette confiance que manifeste le Bouddha envers Sarvasattva-priyadarshana ? Le Bouddha avait remarqué que ce bodhisattva pratiquait le Dharma de tout son cœur. Notre pratique du Dharma est, à l'évidence, la chose la plus importante pour ceux qui adhérent au bouddhisme. Signification des stupas Le bouddha Chandra-vimala-suryaprabhasashri* demande au bodhisattva Sarvasattva-priyadarshana* de distribuer amplement ses reliques et de les honorer. Il ne s'agissait pas de se contenter d’un hommage aux reliques mais, par ce geste, faire en sorte que tous les êtres vivants aient faim et soif de voir le Bouddha. Chandra-vimala-suryaprabhasashri demande également d'élever plusieurs milliers de stupas. Par ces constructions, tous les êtres vivants devaient ancrer les enseignements dans leur esprit. Les stupas étaient une façon de louer les vertus du Bouddha. Si nous construisons un stupa en n'étant préoccupés que de sa forme et de son apparence et si nous oublions qu'il sert à ancrer l'enseignement dans notre esprit, nous ne sommes pas en harmonie avec le Bouddha. Ce qu'il souhaite n'est pas l'apparence mais le contenu, non une théorie mais la pratique.
On dit que le Bouddha Shakyamuni prêcha quatre-vingt-quatre milles sermons. La phrase ‘‘Lorsque le feu se fut éteint, il recueillit les reliques, confectionna quatre-vingt-quatre mille urnes précieuses et édifia quatre-vingt-quatre mille stupas.’’ est une façon de dire que le bodhisattva s'efforça de maintenir pour l'éternité tous les enseignements du bouddha, de les mémoriser et de les prêcher.
Rendre hommage au Bouddha Le plus grand hommage que Sarvasattva-priyadarshana* rendit au bouddha fut de maintenir ses enseignements pour l'éternité, de les mémoriser et de les prêcher. Cependant, pour un fidèle du Sutra du Lotus ce n'était pas assez et il réalisa que le plus grand hommage à rendre au Bouddha était la pratique de l'enseignement lui-même ; c'est pourquoi il brûla ses bras. En d'autres termes, il se consacra à la pratique du Dharma sans se soucier de la souffrance, de la douleur ou des difficultés que cela engendrerait. Ses pratiques se transformèrent en une grande lumière qui guida les hommes, dissipant les ténèbres de leur esprit, leur permettant de rechercher sans relâche la Voie. Cette description met en évidence les grands bienfaits qu’apporte la pratique du Dharma.
La reconstitution des bras de Sarvasattva-priyadarshana* montre l'état d'esprit idéal que ceux qui s’adonnent aux pratiques de bodhisattva doivent maintenir. Alors que se brûler les bras est considéré comme un acte très douloureux, cette action n’a rien de pénible pour une personne qui a atteint l'état d'esprit d'un grand bodhisattva. Quand on peut se sacrifier pour le Dharma, on ne ressent pas la souffrance. Le Sutra dit dans ce cas : ‘‘Le bodhisattva est toujours heureux et prêche aisément le Dharma’’.
Dix comparaisons louant le Sutra du Lotus Le Bouddha continue :
Ces dix comparaisons qui louent le Sutra du Lotus prouvent qu'il est le meilleur et le plus sublime de tous les sutras car l'intention du Bouddha est que nous inscrivions dans notre cœur, de façon indélébile, que la pratique du Dharma est la chose essentielle pour l'accomplissement de la Voie vers l'Éveil. Parmi ces comparaisons, notons que le ‘‘grand roi des devas, Brahma, est le père de tous les êtres’’ et que le Sutra du Lotus est ‘‘le père de tous les sages et les saints, des apprentis et de ceux qui sont au-delà de l'étude, ainsi que de ceux qui ont déployé la pensée de bodhisattva’’. En Inde, longtemps avant la venue de Shakyamuni, les gens croyaient que Brahma était le père de tous les êtres vivants et que ce roi des dieux dirigeait toutes les créatures. Dans la comparaison ci-dessus, le Bouddha ne dit pas expressément que cette idée est fausse mais que tous les êtres vivants considèrent Brahma comme leur père, et que, de même, ce Sutra est le père de tous. Guider de la manière douce des personnes ordinaires vers le chemin de la vérité est une des caractéristiques du bouddhisme. Le Bouddha continue :
Le Bouddha enseigne ici de manière plus détaillée que le Sutra du Lotus offre à tous les êtres vivants la possibilité d'être sauvés, d'être délivrés de la douleur et de la souffrance et de réaliser leurs vœux. Le mot "vœux" ne signifie pas des désirs immédiats pour des satisfactions matérielles ou pour une vie confortable, ce mot indique l'idéal qui est le but réel de la vie. Bien que chaque personne ait son propre vœu ou son but spécifique, ce doit toujours être quelque chose qui doit être réalisé pour le bien des autres. Pour les bouddhistes, c'est d'une importance capitale. Le Sutra du Lotus est mal interprété lorsque les personnes comprennent le mot "vœux" dans le sens de désirs fondés sur l'avidité. Il n'y a rien d'aussi dangereux que cette mauvaise interprétation du Dharma et il est bon d’y réfléchir. Douze comparaisons : les bienfaits célestes apportés par le Sutra du Lotus Le Bouddha continue :
Le Bouddha fait douze comparaisons concernant les bienfaits célestes apportés par le Sutra du Lotus. Nous constatons que ce n'est pas une simple louange du Sutra. La dernière phrase, ‘‘capable d'affranchir de toutes les entraves de la naissance et de la mort’’ est particulièrement importante. Les entraves de la naissance/mort désignent l'état d'esprit où nous sommes surpris ou troublés par des changements brusques de notre situation et où nous ne nous sentons pas en sécurité. D'où proviennent donc nos angoisses ? Tout changement peut être inquiétant. Mais si nous comprenons les Trois sceaux du bouddhisme — les multiples dharmas sont impermanents, les multiples dharmas sont sans substance, le nirvana est sérénité et pureté — nous pouvons nous libérer de tous les liens de la naissance/mort et parvenir à une véritable paix intérieure, sans s'inquiéter de ce qui change autour de nous. Ensuite le Bouddha dit :
Rendre hommage au Sutra par des offrandes matérielles est une façon d'exprimer sa gratitude. Nous avons fréquemment souligné que la meilleure façon d'exprimer que l'on apprécie le Dharma est de le pratiquer, le proclamer et le propager largement. Ici, les offrandes faites au Sutra sous forme de fleurs, de parfums, d'encens et de diverses sortes de lampes représente l'hommage rendu au Dharma par les nombreuses pratiques de bodhisattva. Après une première partie où est commenté le Sutra du Lotus, ce chapitre passe aux mérites-kudokus , particulièrement ceux de Bhaishajyaraja. L'insistance sur les bienfaits qui résultent du fait de "recevoir et garder le Sutra du Lotus" s'explique par la nécessité d'une mise en pratique du Dharma pour qu'il devienne vivant. C'est pourquoi ce chapitre loue principalement le caractère sacré d'une personne pratiquant le Sutra du Lotus. Nous ne devons donc pas considérer ce chapitre comme nous exhortant uniquement à "recevoir et garder". Ce serait là une interprétation superficielle d'un niveau spirituel peu élevé. Il convient de lire ce Sutra avec attention et en profondeur pour éviter cette erreur. Pour cela il faut considérer ce chapitre dans sa globalité. Prenons, par exemple, ces paroles:
Le bouddha attire notre attention sur l'importance de recevoir et de garder, de lire et de réciter, de réfléchir sur ce Sutra et sur la nécessité de l'expliquer aux autres. Ce que nous devons recevoir et garder est la totalité du Sutra du Lotus. Nous devrons nous souvenir de cela lorsque nous examinerons le chapitre XXV, Porte universelle du bodhisattva Avalokiteshvara. Les cinq périodes de cinq-cents ans Nous avons vu qu'il ne convient pas de prendre à la lettre les expressions dépréciatives à l'égard des femmes :
Un remarque de même ordre doit être faite au sujet de l'expression :
Shakyamuni prédit qu'après son décès, le bouddhisme passerait par cinq périodes, chacune de cinq-cents ans. D'après le sutra Mahasamnipata, il y aura cinq périodes de cinq-cents ans chacune faisant suite à l'entrée du Bouddha dans le parinirvana. Dans la première période, les hommes seront fermes et dévoués au salut, tandis que dans la deuxième, ils se consacreront à la méditation. Ensemble, ces deux périodes sont celles du Dharma Correct (shoho) maintenu dans sa pureté. La troisième période est caractérisée par une dévotion à la lecture et à la récitation à la lettre du Dharma ; la quatrième période est dédiée à la construction de stupas et de temples, c'est-à-dire de cénotaphes aux maîtres et aux prédicateurs. Ces deux périodes sont celles du Dharma Formel appelé également Dharma de Semblance (zoho). La cinquième période — les cinq cents dernières années — se caractérise par la disparition du Vrai Dharma et par l'émergence de conflits et divisions internes ; c'est le début de la fin du Dharma (mappo). Au cours du premier demi-millénaire, les gens pratiquent correctement les enseignements du Bouddha et se libèrent des liens de l'illusion et de la souffrance. La personnalité exceptionnelle du Bouddha est encore profondément imprimée dans l'esprit des hommes, elle les guide vers l'élévation spirituelle. Il leur suffit de suivre ses enseignements pour mener une existence vertueuse et sereine. C'est une période de "pratique aisée" durant laquelle les hommes n'ont pas besoin de rechercher la bodhéité par eux-mêmes, mais pratiquent simplement les enseignements tels qu'ils les ont reçus. C'est grâce à la vertu personnelle du Bouddha que les hommes bénéficient d'une telle facilité. Mais bien que les enseignements du Bouddha subsistassent pour l'éternité, cette période prend fin après cinq-cents ans. Le deuxième demi-millénaire est une période durant laquelle ceux qui reçoivent et gardent les enseignements du Bouddha se consacrent à la méditation et réfléchissent sur l'application des enseignements adaptés à leur époque. La société se modifie grandement à la fin du millénaire après la disparition du Bouddha. Les gens se demandent comment ils doivent interpréter les enseignements et comment ils doivent les appliquer à la société de façon à en faire bon usage. C'est une période durant laquelle les gens ont plus de difficultés à pratiquer les enseignements mais la doctrine reste intacte. C'est pourquoi ce demi-millénaire est principalement consacré à la méditation. Le troisième demi-millénaire est une période durant laquelle l'étude du Dharma continue à se développer. Alors que plus de mille ans se sont écoulés depuis la mort du Bouddha, les hommes viennent à le considérer comme une grande figure historique plutôt qu'un guide dans la réalité de la vie humaine. Il est fort éloigné de la vie quotidienne et ils le vénèrent mais ressentent moins de "faim et soif" à son égard. En même temps, comme la civilisation matérielle progresse et comme la société devient plus complexe, le bouddhisme, qui était autrefois un enseignement vivant ancré dans le quotidien, devient un objet d'étude scientifique. Le quatrième demi-millénaire voit fleurir des temples et des stupas. Les hommes se détournent de l'étude du Dharma et souhaitent recevoir des faveurs célestes du Bouddha simplement en construisant des temples et des stupas. Durant cette période, le bouddhisme continue à se développer de façon formelle, mais son esprit est complètement perdu. Aristocrates et hommes de pouvoir croient que la construction de temples splendides assurera la prospérité de leur famille. Les moines bouddhistes vivent dans le luxe sous la protection de ces nobles et de ces personnages puissants ; quant au peuple il pense qu'en fréquentant les temples et en joignant les mains devant les images des bouddhas on peut être sauvé. Le cinquième demi-millénaire est celui où la communauté bouddhique est déchirée par des conflits internes et où l'hérésie se développe. Même le formalisme purement extérieur est largement décadent. L'attitude des hommes est de plus en plus celle du chacun pour soi et ils recherchent des profits uniquement personnels ou pour leur famille, leur groupe, leur pays, leur classe sociale. Par appât du gain ils deviennent adversaires et rivalisent sans cesse. Dans l'affirmation de leur volonté personnelle ils deviennent ennemis, ce qui mène finalement à des guerres et à des effusions de sang. Même dans des conditions normales c'est une succession de conflits sociaux plus ou moins graves et toute vie paisible est impossible. Notre époque actuelle correspond bien à cette période. On appelle les mille premières années Jours du Dharma correct parce que les enseignements du Bouddha y seront maintenus et pratiqués en conformité avec ce qui a été réellement prêché. Les mille ans suivants sont appelés Jours du Dharma formel parce que les enseignements existeront encore mais uniquement de façon conventionnelle. Laest appelée des Derniers jours du Dharma parce que les enseignements du Bouddha, bien qu'impérissables et éternels, sont perdus pour les hommes. C'est pourtant à cette époque que ces enseignements sont le plus nécessaires. C'est pourquoi le Bouddha insiste régulièrement sur l'excellence de "ceux qui reçoivent et gardent, pratiquent, prêchent et propagent le Sutra du Lotus au cours de la période du déclin du Dharma.dernière période Le Bouddha dit :
Une croyance centrée sur le bouddha Amida (aussi appelé Amitabha ou Amitayus) commença à se propager dans l'Inde occidentale près de cinq-cents ans après l'extinction du Bouddha. Ses disciples cherchaient à renaître dans la Terre Pure, le paradis d'Amida, en s'abandonnant complètement au pouvoir de ce bouddha. Bien qu’Amida soit doté d'une immense compassion et du pouvoir de guider tous les êtres vivants vers la Terre Pure, cette croyance est incomplète car elle soutient l'idée d'un salut qui dépend uniquement du pouvoir d'Amida. Si les hommes ne prennent pas conscience de la Vérité universelle et ne vivent pas en accord avec cette Vérité, il est impossible de renaître dans la Terre Pure. Le salut ne peut être réalisé que si les hommes recherchent la sagesse-prajna et pratiquent la Voie menant au parachèvement de ce qu'ils sont. Afin que les hommes ne tombent pas dans une fausse interprétation et ne se placent complètement sous la dépendance d'Amida, Shakyamuni ajouta que la condition était d’ ‘‘agir suivant ses enseignements’’. C'est seulement à grâce à la vérité enseignée dans le Sutra du Lotus que la foi en Amida peut exercer son pouvoir. Les trois poisons Le Bouddha continue en affirmant que grâce à l'acceptation du Sutra,
Les trois souillures (bonno, klesha) de l'avidité (raga), de la colère (dvesha) et de la stupidité (moha) sont considérées comme les trois poisons (san-doku) originels qui mènent les hommes ordinaires à leur perte. S'ils pouvaient les éradiquer, ils en recevraient d'immenses bienfaits-mérites (kudoku). À cause de ces trois poisons, ils sont ‘‘tourmentés par l'orgueil, la jalousie et les autres impuretés’’. Les impuretés (bonno, klesha) sont communes à la fois aux hommes et aux femmes, même si le texte recommande de surveiller particulièrement ces dernières. Ensuite le Bouddha dit :
Ces mots signifient que si, en entendant ce chapitre, une personne le reçoit avec joie et le glorifie, elle exercera une bonne influence sur ceux qui l'entourent. Son parfum n'imprégnera pas seulement ses vêtements mais sera transmis à ceux qui la toucheront. La phrase ‘‘un tel homme aura, dès cette existence, une senteur de fleur de lotus bleu’’ signifie que les mots prononcés par celui qui reçoit avec joie et glorifie le Sutra du Lotus rendront plus beau l'esprit de ceux qui l'entoureront. La phrase ‘‘de ses pores émanera constamment une senteur de chandana*’’indique que tout son entourage sera naturellement influencé par ses bonnes actions. C'est un idéal que ceux qui pratiquent les enseignements du Bouddha doivent rechercher. Le Bouddha continue :
Les maladies sont les distorsions mentales des êtres vivants. Comme il a déjà été dit, il est naturel qu'une personne qui s'est remise d'un désordre mental soit aussi guérie de ses maladies physiques. Nous devons veiller à ne pas croire que les maladies sont d'ordre uniquement physique, ce serait réducteur. Dans les paroles suivantes du Bouddha :
la vieillesse, la maladie et la mort ne s’appliquent pas à la vie de l'homme ici-bas. Ces mots font allusion aux modifications capitales qui se produisent dans la vie humaine. Si une personne peut dépasser les aliénations de la vie mortelle, elle ne sera plus paralysée à cause des changements divers de son existence et n'en souffrira pas. Comme son nom l'indique, Bhaishajyaraja, le Roi des Remèdes (bhaishajya = remède), donne de bons traitements à tous les êtres vivants pour qu'ils se rétablissent de leurs désordres spirituels. L'amélioration de leurs perturbations mentales grâce à ce bodhisattva atténuera naturellement les maladies physiques. C'est par l'offrande de ses bras que le bodhisattva obtint ses pouvoirs transcendants de guérison quand il était le bodhisattva Sarvasattva-priyadarshana*. En d'autres termes, c'était dû à sa pratique personnelle du Sutra du Lotus. Le bodhisattva Sarvasattva-priyadarshana*, qui pratiquait le Sutra du Lotus, renaquit en Bhaishajyaraja, le Roi des Remèdes, et il eut le pouvoir transcendant de guérir les maladies spirituelles de tous les êtres vivants et, par là même, d'améliorer grandement l'état des maladies physiques. Nous pouvons en conclure que recevoir et garder et pratiquer de tout cœur le Sutra du Lotus devient une force pour la guérison des diverses sortes de désordres spirituels et autres. C’est pourquoi nous sommes encouragés à propager partout ce chapitre XXIII. Chapitre XXIII du Sutra du Lotus
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