La lettre de Teradomari

Lettres et traités de Nichiren Daishonin. ACEP - vol. 4, p. 111; SG* p. 206
Gosho Zenshu p. 951 - Teradomari Gosho

Teradomari, le 22 octobre 1271, à Toki Jonin

 

J'ai bien reçu le kan de pièces de monnaie que vous m'avez envoyé. Ceux qui sont décidés à rechercher la Voie devraient se rassembler et écouter l'enseignement contenu dans cette lettre.

Au cours de ce mois (le dixième mois), le dixième jour, nous avons quitté le village d'Echi, dans la région d'Aiko, province de Sagami. En route, nous nous sommes arrêtés à Kumegawa, dans la province de Musashi, et de là, au terme d'un voyage de douze jours, nous sommes arrivés ici, au port de Teradomari, dans la province d'Echigo. D'ici, nous devons traverser la mer pour parvenir à l'île de Sado, mais, comme les vents pour l'instant ne sont pas favorables, j'ignore encore quand nous partirons.

Les difficultés sur la route ont été pires que je ne le prévoyais et, à vrai dire, je serais incapable de les décrire. Je vous laisse imaginer. De toute façon, puisque j'étais prêt à affronter tout cela, je n'ai pas lieu de m'en plaindre maintenant. Je n'en dirai donc plus rien.

On lit dans le quatrième volume du Sutra du Lotus  : "Puisque haines et jalousies abondent déjà du vivant du Bouddha, ne seront-elles pas pires encore en ce monde après son trépas  ? "(réf.) Il est dit dans le cinquième volume  : "Les gens seront pleins d'hostilité et il sera difficile de croire."(réf.) Dans le trente-huitième volume du Sutra du Nirvana, il est écrit  : "A ce moment-là, tous les brahmanes se sont rendus auprès du roi Ajatashatru et lui ont dit  : "O Grand Roi, il y a actuellement en ce monde un homme d'une malfaisance sans pareille, un moine appelé Gautama. Tous les malfaiteurs du monde, motivés par l'appât du gain et des dons, se sont rassemblés autour de lui et se sont mis à le suivre. Ils ne commettent aucune bonne action mais, en utilisant des pouvoirs occultes, ils attirent à eux des gens comme Mahakashyapa, Shariputra et Maudgalyayana."

Ce passage du Sutra du Nirvana rapporte les propos insultants que tenaient les adeptes du brahmanisme à l'égard du Bouddha Shakyamuni parce qu'il réfutait les enseignements des deux divinités [Shiva et Vishnu] et des trois ascètes.

[Toutefois] dans les passages du Sutra du Lotus [cités plus haut], ce n'est pas à l'égard du Bouddha lui-même que s'exprime l'hostilité. Mais plutôt, comme l'explique Zhiyi* [c'est au Sutra du Lotus lui-même que s'opposent] "les divers auditeurs-shravakas, pratyekabuddhas et bodhisattvas qui ne s'attachent qu'au bouddha à l'Éveil récent (note)." (réf.) Autrement dit, tous ceux qui ne manifestent aucun désir d'entendre le Sutra du Lotus ou de croire en son enseignement, ou qui disent qu'il ne convient pas à leurs capacités, même s'ils ne le critiquent pas nommément, doivent être considérés comme des personnes éprouvant rancune et hostilité [à l'égard du Dharma].

Si nous comparons l'époque qui suivit le parinirvana du Bouddha à ce qui s'est passé de son vivant [nous pouvons dire que, de nos jours, ] les maîtres des diverses écoles sont comparables aux brahmanes de son temps. Eux aussi parlent d'un "homme d'une malfaisance sans pareille" en me désignant moi, Nichiren. Et ils qualifient mes disciples et adeptes laïques de "malfaiteurs rassemblés autour de lui". Les brahmanistes, ayant mal reçu et mal transmis l'enseignement des bouddhas du passé, manifestèrent leur hostilité à l'égard de Shakyamuni, bouddha d'une époque ultérieure. Les lettrés des diverses écoles de nos jours font de même. En fait, ils se sont laissés entraîner, par leurs interprétations personnelles des enseignements bouddhiques, vers des conceptions erronées. Ils sont comparables à des gens ivres qui, parce que la tête leur tourne, pensent, devant une montagne immense, que c'est elle qui tourne comme une toupie. C'est ce que font actuellement les maîtres des huit ou dix écoles, lorsqu'ils débattent et polémiquent sur leurs diverses doctrines. Il est fait mention, dans le dix-huitième volume du Sutra du Nirvana du "trésor qui, en acquittant la rançon, sauve la vie." Le Grand-maître* Zhiyi* [après avoir étudié et médité sur ce passage] conclut dans son commentaire que "la vie" désigne le Sutra du Lotus et "le trésor", les trois [des quatre] premiers enseignements exposés dans le Sutra du Nirvana. Mais que dire alors de l'enseignement parfait* exposé dans le Sutra du Nirvana  ? Cet enseignement reprend le principe, déjà énoncé dans le Sutra du Lotus, de la nature éternelle de l'état de bouddha, et fut exposé pour inciter les gens à revenir à l'enseignement du Sutra du Lotus [d'où ce principe est tiré]. L'enseignement parfait* du Sutra du Nirvana, le principe d'une nature de bouddha éternellement inhérente [à tous les êtres humains] appartient en fait au Sutra du Lotus. Les qualités uniques du Sutra du Nirvana sont par conséquent limitées aux trois premiers des quatre enseignements : tripitaka (zokyo), commun (tsugyo) et spécifique (bekkyo), et n'incluent pas le quatrième, l'enseignement parfait*.

On lit dans le troisième (réf.) volume du Hokke Gengi de Zhiyi*  : "Le Sutra du Nirvana est le trésor qui, acquittant la rançon, sauve la vie [du Sutra du Lotus]. C'est comme taper dans la main pour confirmer qu'un accord a été conclu (note)." Le Hokke Gengi Shakusen explique cela en disant  : "L'école Tendai utilise cette comparaison pour indiquer que le [contenu du] Sutra du Nirvana doit être considéré comme un trésor et le Sutra du Lotus comme la vie [que ce trésor permet de sauver].

Le Grand-maître* Zhiyi*, dans son Shi'nenjo, cite un passage du Sutra du Lotus  : "Bien qu'ils puissent proposer divers chemins..." et déclare que les quatre saveurs [des sutras Kegon*, Agama*, Hodo* et Hannya*] peuvent aussi être considérées comme un trésor. S'il en est ainsi, aussi bien les sutras enseignés après le Sutra du Lotus [comme le Sutra du Nirvana] que les sutras antérieurs au Sutra du Lotus peuvent tous être considérés comme un trésor offert en échange de la vie du Sutra du Lotus.

Pourtant, les lettrés bouddhistes de notre époque estiment que c'est une interprétation propre à la seule doctrine de l'école Tendai, et qu'aucune autre école ne la partage. J'ai réfléchi à cela et voici ce que j'ai à en dire : les huit ou dix écoles dont nous parlons sont toutes nées après la disparition de Shakyamuni, et ont été fondées par les maîtres [de diverses époques]. Nous ne devrions jamais évaluer les sutras exposés par Shakyamuni de son vivant en fonction des doctrines d'écoles fondées après la disparition du Bouddha. Les commentaires du Grand-maître* Zhiyi*, par contre, sont totalement en accord avec les enseignements des divers sutras. Il n'est pas juste de les rejeter en prétextant qu'ils ne sont que la doctrine d'une école particulière.

Les théoriciens des diverses écoles continuent à s'accrocher aux erreurs des maîtres qui les ont fondées. Ils déclarent que les pratiques religieuses doivent correspondre aux capacités des gens (note), ils se retranchent derrière l'opinion des fondateurs de leur école ou s'efforcent de rallier à leur point de vue les dirigeants sages. Pour finir, ils s'abandonnent totalement au désir de nuire, s'engagent dans des polémiques concernant leurs doctrines et prennent plaisir à persécuter des personnes qui n'ont commis aucun crime.

Parmi ces divers enseignements, celui de l'école Shingon est particulièrement erroné. [Ses fondateurs] Shubhakarasimha* et Vajrabodhi* ont affirmé  : "Le concept d'ichinen sanzen est le plus essentiel des principes énoncés par Zhiyi* et le coeur même de tous les enseignements exposés par le Bouddha Shakyamuni de son vivant. Mais indépendamment du principe d'ichinen sanzen qui constitue la base des enseignements exotériques aussi bien qu'ésotériques, les mudra et les mantra dharani*, forment la partie essentielle des enseignements bouddhiques." Partant de là, les maîtres du Shingon ont affirmé par la suite que les sutras qui ne comportent ni mudra ni mantra dharani* doivent être considérés comme inférieurs, c'est-à-dire du même niveau que les enseignements non bouddhiques.

Certains [maîtres du bouddhisme ésotérique] disent que le Sutra Vairocana* a été exposé par [le bouddha Vairocana*] un bouddha différent de Shakyamuni, d'autres déclarent que le Sutra Vairocana* est l'enseignement le plus élevé du Bouddha Shakyamuni, tandis que d'autres encore prétendent que le même bouddha se manifesta tantôt sous la forme du Bouddha Shakyamuni pour enseigner les sutras exotériques, tantôt sous la forme du bouddha Vairocana* pour enseigner les sutras ésotériques. Ainsi, en ignorant la logique de l'enseignement du Bouddha, ils offrent une infinie variété d'opinions qui sont toutes erronées. Ils sont comparables à des personnes qui ignoreraient la couleur du lait mais s'efforceraient de la deviner, sans jamais parvenir à la déterminer de manière correcte (note). Ou encore, ils ressemblent aux aveugles de la parabole qui s'efforcent de décrire la véritable forme d'un éléphant. A cet égard, les maîtres des diverses écoles devraient comprendre que le Sutra Vairocana*, s'il est enseigné avant le Sutra du Lotus, est du même niveau que le Sutra Kegon*, et s'il est enseigné après, est du même niveau que le Sutra du Nirvana [qui sont tous deux le trésor qui, en acquittant la rançon, sauve le Sutra du Lotus].

Se pourrait-il qu'en Inde le Sutra du Lotus ait contenu des descriptions de mudra et de mantra dharani* mais que ceux qui le traduisirent en chinois les aient supprimés - Kumarajiva nommant sa version Myoho Renge Kyo  ? Et que Shubhakarasimha*, en y ajoutant des mudra et des mantra dharani*, ait appelé la sienne le Sutra Vairocana*  ? Par exemple, il y eut différentes versions du Sutra du Lotus, telles que le Sho-hokke-kyo [traduction chinoise existante du Sutra du Lotus faite par Dharmaraksha en 286], le Tembon-Hokke-kyo [traduction chinoise existante du Sutra du Lotus faite par Jnanagupta et Dharmagupta en 601], le Hokke-zammai-kyo [traduction chinoise perdue du Sutra du Lotus faite par Cien en 427] et le Satsuun Fundari-kyo [traduction chinoise perdue du Sutra du Lotus dont l'auteur est inconnu].

En Inde, après la disparition du Bouddha, le bodhisattva Nagarjuna fut celui qui comprit véritablement le rapport entre le Sutra du Lotus et les autres sutras ; et la première personne à l'appréhender correctement en Chine fut le Grand-maître* sage Zhiyi*. Des hommes comme Shubhakarasimha*, de l'école Shingon, Cheng-guan de l'école Kegon, Jizang de l'école Sanron et Cien de l'école Hosso ont publiquement professé la doctrine de l'école qu'ils avaient fondée mais, dans leur coeur, ils étaient tous convertis à l'enseignement de l'école de Zhiyi*. Leurs disciples ont ignoré ce fait [et par conséquent se sont forgés des conceptions erronées]. Comment pourraient-ils ne pas être coupables d'opposition au Dharma ?

Les uns disent, en critiquant Nichiren : "Sans tenir compte des capacités des gens [de notre époque], il entreprend de convertir de manière brutale, voilà pourquoi il rencontre des persécutions." Les autres disent : "Les pratiques de shakubuku (note) exposées dans le chapitre Kanji* (XIII) sont des pratiques pour des bodhisattvas parvenus à une étape très élevée. [Pour les autres] il faudrait pratiquer la méthode de shoju (note) exposée dans le chapitre Anrakugyo* (XIV), mais Nichiren fait le contraire." Certains disent : "Dans mon coeur, je sais bien, moi aussi, que le Sutra du Lotus est suprême, mais je ne le crie pas à tous vents." D'autres encore disent : "Il ne prête attention qu'à la doctrine [sans rien dire de l'observation du coeur (note)]."

Je connais bien toutes ces critiques. Mais [je me souviens de divers exemples : ] Bian-Ho eut les pieds coupés, et Kiyomaro [Homme pur], fut surnommé Kegaremaro [Homme souillé] et échappa de peu à la peine capitale. Tous, à leur époque, les méprisèrent et les ridiculisèrent, mais, [à la différence de ces deux hommes, ] ceux qui les tournèrent en ridicule n'ont pas laissé leur nom à la postérité. Et tous ceux qui m'adressent des critiques injustifiées connaîtront le même sort.

Il est dit dans le chapitre Kanji* (XIII) : "Il y aura de nombreux ignorants qui nous critiqueront et nous calomnieront." Je retrouve ma propre situation dans ce passage du Sutra. Pourquoi ne s'appliquerait-il pas à vous tous de la même manière  ? Il est dit plus loin : "Ils nous attaqueront à coups de sabres et de bâtons." J'ai fait l'expérience de ce passage dans ma propre vie. Pourquoi vous [mes disciples] ne feriez-vous pas de même  ? Plus loin encore, on lit : "Ils ne cesseront d'aller trouver les gens du peuple en s'efforçant ainsi de nous calomnier." Et encore : "Ils s'adresseront aux souverains, aux dignitaires de haut rang, aux brahmanes et aux grands bienfaiteurs du bouddhisme [en nous rabaissant et en disant du mal de nous]." Et aussi : "Ils nous insulteront et nous montreront des visages furieux ; nous serons bannis encore et encore."(réf.) "Encore et encore" signifie à plusieurs reprises, et moi, Nichiren, j'ai été sans cesse pourchassé, et par deux fois exilé (note).

Le Sutra du Lotus est l'enseignement [auquel aboutissent invariablement tous les bouddhas qui exposent le Dharma] dans les trois phases de la vie. Les événements du passé décrits dans le chapitre Fukyo* (XX) sont ceux que je vis à notre époque, comme il était prédit dans le chapitre Kanji* (XIII) ; ainsi, ce présent annoncé dans le chapitre Kanji* (XIII) correspond au passé décrit dans le chapitre Fukyo* (XX). Le chapitre Kanji* (XIII) [dont les prédictions s'accomplissent] à notre époque deviendra le chapitre Fukyo* (XX) à l'avenir, et, à ce moment-là, Nichiren sera le bodhisattva Fukyo.

Le Sutra du Lotus est un ouvrage qui se compose de huit volumes et vingt-huit chapitres, mais on dit qu'en Inde ce Sutra était si long qu'il aurait pu se dérouler sur une longueur d'un yojana. Peut-être comportait-il alors un beaucoup plus grand nombre de chapitres. Les vingt-huit chapitres actuellement connus en Chine et au Japon représentent l'essentiel d'une version abrégée.

Laissons de côté pour l'instant la deuxième partie du Sutra, la révélation (note). Dans la partie suivante, celle de la transmission, avec les trois déclarations du chapitre Hoto* (XI), le Bouddha confie la tâche de la propagation à l'Assemblée réunie au Pic du Vautour, présente à la Cérémonie dans les Airs. Quant au voeu [de propager le Dharma] formulé dans le chapitre Kanji* (XIII) par vingt mille, quatre-vingt mille, quatre-vingts myriades de millions de nayuta de grands bodhisattvas, un homme comme moi, d'une sagesse superficielle, a du mal à le comprendre. Mais le passage "Dans une époque effroyablement mauvaise..." [que l'on trouve dans ce chapitre] désigne le début des Derniers jours du Dharma. Cette "ère de la peur et du mal" est évoquée ensuite dans le chapitre Anrakugyo* (XIV) comme "l'époque des Derniers jours". Si nous comparons avec les autres traductions du Sutra, nous lisons dans le Sho-hokke-kyo : "Dans les Derniers jours du Dharma qui suivront la disparition du Bouddha", ou : "A l'époque à venir des Derniers jours du Dharma", tandis que dans le Tembon-hoke-kyo on lit : "Dans une époque dominée par la peur et le mal".

Nous sommes dans l'époque des Derniers jours du Dharma et les Ennemis de trois sortes sont bel et bien apparus, mais nulle part on ne voit un seul des quatre-vingts myriades de millions de nayuta de bodhisattvas. Notre monde est comparable à un lac asséché n'ayant plus une goutte d'eau, ou à une lune décroissante, incapable de redevenir pleine lune. Lorsqu'une eau est pure, elle reflète la lune et lorsque des arbres ont été plantés, les oiseaux viennent s'y nicher. Parce que moi, Nichiren, je propage cet enseignement à la place de ces quatre-vingts myriades de millions de nayuta de bodhisattvas, je demande à ces bodhisattvas de m'accorder leur aide et leur protection.

Le nyudo [qui me remet cette lettre] me dit que vous lui avez donné pour instruction de m'accompagner jusqu'à l'île de Sado. Mais sachant ce qu'il en coûterait en argent et en peine, je le renvoie chez vous. Ce n'est pas la première fois que je ressens la profondeur de votre sincérité. J'aimerais que vous transmettiez aux autres tout ce que j'ai écrit ici. Je suis très préoccupé par le sort des moines qui sont en prison (note) et, dès que cela sera possible, j'aimerais que vous le leur disiez et me donniez de leurs nouvelles.

Respectueusement,
Nichiren.

A l'heure du coq*, le vingt-deuxième jour du dixième mois.

ARRIERE-PLAN - Après avoir tenté sans succès d'exécuter Nichiren Daishonin à Tatsunokuchi, le 12 septembre 1271, Hei no Saemon, commandant en second des forces armées et de police n'eut d'autre possibilité que de suivre les ordres qui lui avaient été donnés par le gouvernement, à savoir de le confier à la garde de Homma Rokuro Zaemon Shigetsura, le connétable de Sado. Nichiren Daishonin resta prisonnier pendant près d'un mois dans la résidence de Homma, à Echi, dans la province de Sagami, attendant qu'on l'informe du sort que lui réservaient les autorités.
A la même époque, des troubles dont on connaissait mal l'origine s'étaient élevés dans la résidence du régent Hojo Tokimune, et un devin lui avait dit qu'ils avaient un rapport avec la tentative d'exécution. Tokimune ordonna donc que l'on relâche Nichiren Daishonin, mais une succession rapide d'événements rendit caduque cette décision. Une vague d'incendies criminels déferla sur Kamakura, et la rumeur se répandit que les disciples de Nichiren Daishonin en étaient responsables. Le gouvernement ordonna finalement que la condamnation initiale à l'exil soit maintenue.
Le 10 octobre, Nichiren Daishonin quitta Echi, escorté par les guerriers d'Homma. Quand la troupe atteignit le littoral de la mer du Japon, le 21, le sol était couvert de neige et la mer très agitée. Ils furent contraints de s'arrêter pendant plusieurs jours dans un port appelé Teradomari, à Echigo (actuellement dans la préfecture de Niigata) et d'attendre que les vents soient suffisamment calmes pour permettre la traversée jusqu'à l'île de Sado. Teradomari, prospéra, dit-on, dès le début du IXe siècle, en assurant les transports maritimes entre l'île de Sado et le Honshu.
Le lendemain de son arrivée à Teradomari, Nichiren Daishonin écrivit cette lettre et la confia à un nyudo à qui Toki Jonin avait demandé de l'accompagner. Toki Jonin, l'un des principaux disciples de Nichiren Daishonin, était au service d'un certain seigneur Chiba, dans la province de Shimosa. Il s'était converti au bouddhisme de Nichiren Daishonin vers 1254. Homme d'une grande érudition, il fut le destinataire de nombreux textes de Nichiren Daishonin, notamment le traité "Sur le véritable objet de vénération."
La troupe arriva à Sado le 28 octobre, et le 1er novembre, à Tsukahara, le site choisi comme lieu d'exil pour Nichiren Daishonin. Aucun de ses ennemis ne s'attendait à ce qu'il puisse rentrer vivant d'un lieu aussi froid et difficile d'accès. Nichiren Daishonin resta sur l'île de Sado près de deux ans et demi, et pendant ce laps de temps fit de nombreux adeptes, inscrivit le Gohonzon pour des croyants particuliers et écrivit plusieurs gosho importants révélant son Éveil en tant que bouddha fondamental apparu à l'époque des Derniers Jours du Dharma afin de sauver l'humanité tout entière.
La communauté des croyants, à Kamakura, avait été gravement affectée par la persécution de Tatsunokuchi et l'exil sur l'île de Sado. De nombreux disciples et adeptes de Nichiren Daishonin, cédant aux pressions du gouvernement, abandonnèrent leur foi, ou, voyant leur maître persécuté, commencèrent à avoir des doutes et à perdre confiance en son enseignement. Parmi ceux qui trahirent leur foi, certains commencèrent à critiquer Nichiren Daishonin, disant que sa manière trop sévère de propager la Loi était la cause de ces persécutions, ou qu'il était impossible qu'il soit le Pratiquant du Sutra du Lotus parce qu'il n'avait pas réussi à obtenir la protection des divinités bouddhiques. Pour aider ses disciples à dissiper leurs doutes et à persévérer dans la foi, Nichiren Daishonin, au cours de son exil, écrivit plusieurs gosho dans lesquels il s'efforça de donner des réponses précises aux diverses questions qu'ils se posaient : pourquoi ceux qui pratiquent correctement le bouddhisme rencontrent-ils des persécutions  ? D'où vient qu'en apparence les divinités bouddhiques ne leur accordent pas leur protection  ? Et pourquoi shakubuku est-il le mode de propagation approprié à l'époque des Derniers Jours du Dharma  ? La présente lettre est le premier de ces textes qui comprennent le "Traité pour ouvrir les yeux", la "Lettre de Sado" et "La pratique telle que le Bouddha l'enseigne".
(Commentaire ACEP)

Voir également : Bouddhisme Japonais Traducteur G. Renondeau. Albin Michel 1965

En anglais : Letter from Teradomari

- http : //www.sgilibrary.org/view.php?page=206&m=1&q=Teradomari
- commentaires : http : //nichiren.info/gosho/bk_LetterTeradomari.htm

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