Un bouddhisme pour notre temps Une interprétation moderne du Triple Sutra du Lotus par |
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Voir : SUTRA DU LOTUS - CHAPITRE XI |
Vision de la Tour aux Trésors De même que le chapitre II, celui-ci contient des récits qui, à première vue, sont étranges. Comme nous l'avons vu dans l'Introduction, le Sutra du Lotus présente souvent des idées abstraites sous forme d'images concrètes de façon à en faciliter la compréhension. C'est le cas de tout ce chapitre XI. Voyons d'abord la description de la tour (stupa) de sept matières précieuses qui jaillit de terre. Ce stupa symbolise la nature de bouddha (buddha-dhatu) que tout le monde possède. La nature de bouddha (ici, le stupa) jaillissant de terre désigne la découverte inattendue de la nature de bouddha en soi (la terre) alors que cette terre était supposée "impure". D'où le mot "vision" dans le titre de ce chapitre. Dans cette tour, se trouve un bouddha appelé Prabhutaratna (Taho, Maints-Trésors) symbolisant la Vérité ultime réalisée en la personne de Shakyamuni. Cette vérité existe dans l’univers depuis toujours et ne change jamais. Elle est révélée dans divers enseignements du Bouddha et guide les hommes partout dans le monde. Cette universalité atemporelle est personnifiée par les "bouddhas émanés" qui prêchent le Dharma dans les dix directions. L'Ainsi-venu Prabhutaratna partage son trône de la Tour aux Trésors avec Shakyamuni, et dit : ‘‘Ô Éveillé Shakyamuni, tu peux prendre place sur ce trône’’. Ainsi, il affirme la justesse de tous les enseignements de l’Ainsi-venu Shakyamuni. C'est donc la Vérité ultime elle-même qui apporte son témoignage. Il peut paraître étrange que la vérité témoigne de sa propre vérité: pour faire court, cela signifie que tout ce que le Bouddha Shakyamuni a dit se vérifiera ultérieurement. Lorsqu'une chose se vérifie, c'est que le Bouddha a dit la vérité. Il ne peut y avoir de preuve plus convaincante que celle-ci. L'image de l'Ainsi-venu Prabhutaratna représentant la Vérité et de Shakyamuni le prédicateur qui sont assis côte à côte, les jambes croisées sur le trône léonin de la Tour aux Trésors, nous dit que s'il n'y a personne pour prêcher la Vérité, les gens ordinaires ne peuvent la comprendre; le prédicateur de la Vérité doit être honoré autant que la Vérité elle-même. « Alors les êtres de la grande multitude, [...] se firent cette réflexion: "les bouddhas sont assis bien loin dans les hauteurs; notre seul souhait est que l'Ainsi-Venu, par la force de ses pouvoirs surnaturels, nous permette de nous tenir dans l'espace avec eux."
Cela signifie que si les gens découvrent en eux leur nature de bouddha, ils sont immédiatement capables d’élire leur demeure dans le monde des bouddhas. Dans ce chapitre, la signification générale du texte est plus importante que l'exégèse des mots ou des stances. Nous nous limiterons donc aux grandes lignes du chapitre et à ses points essentiels. Après avoir écouté le sermon du Bouddha du chapitre X, les membres de la Grande assemblée prennent la ferme résolution de s'efforcer, quoi qu'il puisse arriver, de propager les enseignements sacrés de l’Ainsi-venu et de se mettre au service des individus et de la société. C'est alors que la Tour aux Trésors sortie de la Terre commence à s'élever dans le ciel. Décorée de toutes sortes de matières précieuses, cette Tour est d'une incomparable beauté. Tous les êtres du monde, les humains et les autres, se rassemblent autour d’elle, lui rendent hommage, la révèrent, l'honorent et la louent. La Terre, dans la description de la Tour qui en sort, symbolise notre corps-esprit d'hommes ordinaires, et aussi le monde Saha, peuplé de personnes ordinaires. L'Éveil et le salut bouddhique ne tombent pas des nues mais jaillissent de l'intérieur de nous. Le Bouddha nous enseigne à quel point ce jaillissement de l'Éveil et du salut est sublime et puissant. Cet épisode n'est pas une simple parabole, il est empreint d'un réalisme très actuel.
Cette voix merveilleuse est celle de Prabhutaratna qui reste encore invisible ; tous les membres de la Grande assemblée se demandent qui se trouve dans la Tour.
Le corps intact et entier d'un Ainsi-venu indique la présence de la totalité des vertus et des pouvoirs d'un bouddha. Shakyamuni nous fait comprendre de cette façon que si on s'éveille à sa nature de bouddha, on devient un Ainsi-venu atemporel avec une sagesse suprême et une compassion infinie. Et le Bouddha poursuit :
Alors le Bouddha émit de la touffe blanche entre ses sourcils un rai de lumière et tous les bouddhas de tous les royaumes du monde devinrent visibles. Partout où le rai de lumière brillait, il révélait les royaumes merveilleux des bouddhas. Ensuite, chacun des bouddhas s'adressa à la foule des bodhisattvas en disant :
Ce récit montre que la Terre Pure n'est pas située dans un endroit lointain mais se trouve ici, dans le monde Saha où nous vivons. Pour une personne Éveillée, le monde Saha est, en essence, identique à la Terre de la Lumière Toujours Paisible (jakko-do). Les bouddhas des dix directions arrivèrent et se rassemblèrent tous dans le monde Saha. Chacun d'eux envoya ses disciples pour rendre hommage au Bouddha Shakyamuni et les bouddhas exprimèrent tous ensemble le désir de voir s’ouvrir la Tour aux Trésors.
Les quatre congrégations louèrent cette merveille sans précédent et
La Grande assemblée fut d'abord profondément bouleversée par cette scène merveilleuse, mais lorsqu'ils virent haut dans le ciel les deux bouddhas assis, jambes repliées et croisées dans le stupa, ils se sentirent perdus, comme si les deux Ainsi-venus étaient soudainement distants et très éloignés. Chacun souhaita que les Ainsi-venus, grâce à leurs pouvoirs surnaturels puissent leur « permettre de tenir dans l'espace avec eux ». Aussitôt, percevant leur désarroi, Shakyamuni
Deux lieux et trois assemblées du Sutra du Lotus A partir de là, l'action du Sutra du Lotus se déplace du Pic du Vautour à l'Assemblée dans les Airs. On dit traditionnellement que Shakyamuni a exposé ce sutra en "deux lieux et trois Assemblées" (nisho-san'e) : le Pic du Vautour, ensuite dans les Airs et enfin de nouveau sur le Pic du Vautour. À partir de ce moment, l'action du Sutra du Lotus se déplace depuis le Pic du Vautour jusqu’à "l'Assemblée dans les Airs". On dit traditionnellement que Shakyamuni a exposé ce Sutra en "deux lieux et trois assemblées" (nisho-san'e) : le Pic du Vautour, ensuite dans les Airs et enfin de nouveau sur le Pic du Vautour. Lorsque nous commençons à prendre connaissance des enseignements du Bouddha, nous ne pouvons les comprendre que s'ils sont étroitement liés à la réalité quotidienne. Le premier lieu où le Sutra du Lotus fut enseigné montre que le Bouddha a d'abord tenu compte de notre réalité terrestre ; c'est l'enseignement de la sagesse. Ensuite, au cours de la Cérémonie dans les Airs, au-dessus de la Terre, le Bouddha apparaît comme un idéal au-delà du visible. Un tel phénomène est possible grâce à la compassion absolue (maitri) du Bouddha. Mais l'enseignement de la maitri (amour-empathie) n'a de sens que si nous la mettons en pratique dans notre quotidien. C'est pourquoi l'enseignement final revient au niveau de la réalité terrestre. Une fois de plus, les histoires étranges du Sutra du Lotus ne sont pas des descriptions d'un monde chimérique : leur signification spirituelle est d'une parfaite logique. Six actions difficiles et les neufs actes aisés Le Bouddha, usant de diverses comparaisons, prédit à quel point il sera difficile de prêcher le Sutra du Lotus lors au cours de l'âge de la décadence. Généralement, cet avertissement est appelé "doctrine des six actions difficiles et les neufs actes aisés" (rokunan-kui). Le Bouddha nous montre, à l'aide de plusieurs exemples que dans ce monde dur et mauvais (tojo kengo), après la disparition de l'Ainsi-venu, rien ne sera plus difficile que de lire, réciter et enseigner le Sutra du Lotus, ne serait-ce qu'à une seule personne.
Mais nous ne devons pas perdre courage devant une tâche aussi ardue. Le Bouddha nous parle des difficultés que nous aurons à surmonter pour recevoir et garder parfaitement le Sutra du Lotus, à le lire, le réciter et le transmettre. En essayant de toujours perfectionner notre pratique, nous avons déjà rencontré certaines de ces difficultés. Mais il n'y a pas de quoi se décourager. Le fait qu'en ce moment nous sommes en train d'étudier ce Sutra, que nous le gardons dans notre cœur et que nous essayons de le mettre en pratique selon nos capacités, témoigne de la possibilité de surmonter ces difficultés. Nous avons juste à nous encourager mutuellement en cet âge mauvais pour que tous les bouddhas puissent s'en réjouir.
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