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Extraits de gosho sur |
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samourai |
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De tous les temples et sanctuaires construits par l'empereur Kammu et par le Grand-maître* Saicho* au Japon, il n'en est plus un seul qui ne propage la doctrine Shingon.
Les aristocrates comme les samouraïs invitent les maîtres du Shingon à conduire leurs cérémonies, les considèrent
comme des maîtres, leur confèrent des fonctions et leur
confient des temples. Et, pour procéder à la cérémonie
de consécration des statues ou images du Bouddha, les huit
écoles ont toutes recours aux mudra et mantra dharani* se référant au bouddha Vairocana* ! Je ne suis
jamais indifférent au sort des personnes originaires de ma région
et je me préoccupe toujours de ce qui leur advient, même
si elles m'ont causé des tourments ou traité avec froideur.
Mais votre fils Yashiro, par son allure, se distinguait des autres et
j'avais été tout particulièrement frappé
par son attitude où l'on ne décelait aucune forme d'entêtement.
Il faisait partie d'un groupe auquel j'enseignais le Sutra du Lotus [quand je l'ai vu pour la première fois]. De nombreux inconnus
étaient présents et je ne lui ai pas parlé. L'exposé
fini, tous mes auditeurs sont partis et votre fils a quitté les
lieux avec eux. Mais, un peu plus tard, il m'a envoyé un messager
chargé de me dire en son nom : "Je suis originaire d'Amatsu,
dans la province d'Awa.
Depuis l'enfance, j'ai le plus grand respect pour votre dévouement.
Ma mère aussi a pour vous la plus grande estime. Pardonnez la
liberté que je prends en m'adressant à vous aussi familièrement,
mais j'aimerais vous demander conseil en privé. Je sais que je
devrais attendre que nous nous soyons vus plusieurs fois, et que nous
nous connaissions mieux. Mais, comme je suis au service d'un samouraï,
mon temps est limité, et il m'arrive quelque chose d'important.
C'est pourquoi, tout en étant pleinement conscient de mon impolitesse,
j'aimerais que vous acceptiez me rencontrer." C'est de
cette manière courtoise qu'il a sollicité mon avis. Et
comme c'était un garçon de mon pays, je l'ai invité
chez moi en lui disant qu'il n'était nul besoin de tant de cérémonies.
Il m'a parlé longuement de ce qui s'était passé
jusqu'au moment de notre rencontre, du passé et de l'avenir.
Puis il m'a dit : "Rien n'est permanent en ce monde. Personne ne
peut connaître le moment de sa mort. De plus, je mène la
vie d'un samouraï et je dois relever un défi de me battre
qui m'a été récemment lancé. Mais je redoute
ce qui se passera après ma mort. Je vous supplie de m'aider." Je lui
ai exposé des passages de sutra. Alors, Yashiro m'a dit avec
tristesse : "Je ne peux rien faire pour mon père qui est
déjà décédé. Mais je pense que précéder
dans la mort ma mère qui est veuve serait un grave manque à
la piété filiale. Si quelque chose m'arrivait, demandez
à l'un de vos disciples de se rendre auprès d'elle pour
la réconforter." C'est ainsi qu'il m'a présenté
cette requête avec politesse. Ai-je raison de supposer qu'à
ce moment-là rien de malencontreux ne s'est passé mais
que par la suite un événement lui a coûté
la vie ? [...] Dans votre
lettre, vous dites : "Parce que mon fils a tué d'autres êtres
humains, j'aimerais que vous me disiez en quelle sorte de lieu il renaîtra
dans sa vie prochaine." Une aiguille, posée sur l'eau, coule
au fond ; et la pluie ne peut pas rester suspendue au ciel. Ceux qui
tuent même une fourmi tomberont en enfer, et même ceux qui
ne font que découper des corps morts ne peuvent éviter
de tomber dans les mauvaises
voies. Comment les conséquences d'avoir tué un être
humain pourraient-elles ne pas être encore plus graves ? Pourtant, même un énorme rocher, si on le place sur un
bateau, peut flotter sur la mer ; et l'eau ne peut-elle pas éteindre
même un grand incendie ? Une faute, même légère,
entraînera dans les mauvaises
voies ceux qui ne s'en repentent pas. Mais même un crime grave,
si l'on s'en repent avec sincérité, peut être expié. [...] Même
si les enfants commettent le mal, lorsque leurs parents commettent le
bien, on pardonne leurs fautes aux enfants. Par conséquent, même
si votre fils défunt Yashiro commit de mauvaises actions, si
vous, sa mère, vous vous en désolez pour lui et offrez
jour et nuit des prières pour son repos au Bouddha Shakyamuni,
comment pourrait-il ne pas être sauvé ? Et puisqu'il
avait foi dans le Sutra du Lotus, ce sera plutôt lui
qui servira de guide à ses parents. Il y eut
autrefois, dans la province de Tsukushi,
un daimyo du nom d'Ohashi
no Taro. Ayant encouru la disgrâce du shogun,
il resta prisonnier pendant douze ans d'une cellule creusée dans
les falaises de Yuinohama,
près de Kamakura. Le
jour où l'on vint l'arrêter, contraint de quitter son domaine
de Tsukushi, il dit à
son épouse : "Je suis un samouraï portant arc et flèches pour le service de mon seigneur, je ne
me plaindrai donc pas d'avoir encouru sa disgrâce. Nous vivons
côte à côte depuis notre jeunesse, et maintenant
il nous faut nous séparer. C'est pour moi une grande douleur,
mais de cela non plus je ne veux pas parler. J'ai toujours regretté
que nous n'ayons pas eu d'enfant, ni garçon, ni fille. Et vous
venez tout juste de m'apprendre que vous êtes enceinte. Je suis
bien malheureux de devoir partir sans même savoir si cet enfant
sera une fille ou un garçon ! Quel regret de penser qu'en
grandissant, cet enfant n'aura personne auprès de lui qu'il puisse
appeler père. Mais j'ai beau réfléchir, il m'est
impossible de rien faire." Ayant dit cela, il partit. Par contre, l'affirmation que le Sutra du Lotus est supérieur aux divers autres sutras ne s'appuie pas sur les propos des Maîtres de doctrine* mais sur le texte du Sutra lui-même. Ceci est comparable à un souverain affirmant sa supériorité sur ses sujets, ou à un guerrier rappelant à un homme de basse condition qu'il ne fait pas partie de la classe des samouraïs. Quel mal y a-t-il à cela ? Le Sutra du Lotus est le sutra qui correspond à la véritable intention du Bouddha. C'est le point central que saisirent Zhiyi* et Zhanlan*. Parvenir directement à la bodhéité grâce au Sutra du Lotus (Minobu, mars 1277 ? à Myoho-ama) Lorsqu'il apprit cela, le sage Nichiren
déclara : "Il faut, d'une manière ou d'une autre,
que je parvienne à l'arracher à son arrogance et à
ses illusions, et à lui épargner l'agonie dans l'enfer avici." En l'entendant dire
cela, ses autres disciples et moi, Yorimoto, inquiets, lui avons conseillé : "Nous savons bien que vos
paroles sont motivées par une profonde bienveillance, et par
votre respect du Sutra du Lotus ; mais puisque le moine Ryokan est révéré dans le Japon entier, et en particulier
par les samouraïs de Kamakura,
peut-être devriez-vous éviter de le contredire de manière
trop radicale... " La plupart
des participants commencèrent à partir, et Homma Rokuro
Zaemon et ses hommes s'apprêtèrent à faire de même.
C'est alors que j'ai appelé Homma, en indiquant que je voulais
lui parler. Quand le seigneur revint de l'autre bout du jardin, je lui
demandai à quel moment il se rendrait à Kamakura.
Il me répondit que ce serait probablement vers juillet, quand
ses fermiers auraient fini les travaux des champs. Je lui dis alors : "Un samouraï doit être toujours prêt, aux moments
périlleux, à prendre arc et flèches pour porter
secours à son seigneur et cela lui vaut des terres en récompense.
C'est sa manière à lui de cultiver les champs. La guerre
est imminente à Kamakura.
Allez-y vite, distinguez-vous dans la bataille et vous recevrez de nouvelles
terres. Vos guerriers sont réputés dans la province de
Sagami. Si vous restez à la campagne à cultiver vos rizières
et vos champs et si vous arrivez trop tard pour la bataille, ce sera
pour vous une grande honte." Homma partit en toute hâte,
sans rien dire de ses intentions. Ne participez plus à
aucune réunion. La nuit, soyez vigilant. Soyez en bons termes
avec les gardiens de nuit (note) et demandez-leur leur aide. Vous devriez toujours rester en leur compagnie.
Si vous n'êtes pas à nouveau expulsé par votre seigneur,
il y neuf chances sur dix pour que les samouraïs de votre clan essaient
d'attenter à votre vie. Quoi qu'il arrive, n'encourez jamais
une mort pitoyable. Comme je
l'ai souvent dit, un mérite invisible entraîne une rétribution
apparente. Les autres samouraïs de votre clan ont eu beau vous calomnier
auprès de votre seigneur, et même ce dernier croire [un
instant] à leurs accusations, parce que, depuis des années,
vous avez sincèrement souhaité le salut de votre seigneur
dans sa vie prochaine, vous avez pu obtenir ce bienfait. Et ce n'est
là qu'un début : soyez convaincu que votre grande rétribution
est encore à venir. Moi [Nichiren],
je suis arrivé à la conclusion, après avoir ré-examiné
cet incident, que le camp de la cour impériale a perdu la guerre
parce qu’ils ont adressé des prières selon les principes
de l’école Shingon qui sont erronés, mensongers et déviés. Même
s’il n’y avait eu qu’une personne pour offrir une prière
à une loi aussi peu fiable, cette prière pourrait causer
un tel désastre que même une nation pourrait être ruinée
– à plus forte raison quand le dirigeant adresse des prières,
à l’unisson avec 300 moines, au Dharma de l’école Shingon qui considère le Sutra du Lotus comme son plus grand ennemi ! C’était
une conséquence inévitable que le camp de la cour impériale
ait été battu. Les années
passant, les enseignements erronés de l’école Shingon qui ont causé la catastrophe, se sont progressivement répandus
dans la région de Kanto, où les moines du Shingon,
devenus des administrateurs de grands temples, ont commencé à
propager leur enseignements erronés. Dans cette région,
la plupart des gens qui sont issus de samouraïs rustres n’ont ni la connaissance, ni la capacité pour comprendre
la différence entre enseignements véritables et enseignements
faux, mais ils croient simplement que les Trois
trésors, - le Bouddha, le Dharma et le Sangha,
devraient être respectés. Ainsi, ils sont devenus naïvement
des fidèles de l’école Shingon. Votre
foi en l'enseignement de Nichiren vous a valu l'inimitié de tous
les Japonais, celle de tous les habitants de Kamakura aussi bien que des serviteurs de votre seigneur et des membres du clan.
Que vous restiez ainsi fidèle à votre foi était
déjà difficilement compréhensible. Que vous n'
ayez pas été exclu du clan de votre seigneur était
également mystérieux. Qui plus est, à chaque fois
qu'un domaine vous était proposé, invariablement, vous
le refusiez. Ces refus devaient paraître bien étranges
aux samouraïs de votre rang,
et votre comportement aurait pu irriter votre seigneur ! Mais le Grand-maître* Kukai* n'accorde au Sutra du Lotus que la troisième place,
tandis que le Grand-maître* Ennin* le classe au deuxième rang, et le Grand-maître* Enchin* suit sur ce point Ennin*.
C'est pourquoi, à présent, quand les moines
du Mont Hiei, ceux des temples To-ji et Onjo-ji, ont sous les yeux
le Sutra du Lotus, ils lisent bien le passage affirmant qu'il
est de tous les sutras le plus élevé, mais, même
en lisant cela, ils pensent, en réalité, que le Sutra
du Lotus n'occupe que le deuxième ou troisième rang. Les nobles et les
samouraïs ne savent pas précisément tout cela. Mais
puisque les moines éminents qui les guident dans la foi partagent
tous cette opinion, les disciples laïques et leurs maîtres
commettent la même erreur. Si quelqu'un,
né dans une famille de roturiers, se prétendait aussi
noble qu'un samouraï, il serait nécessairement puni. A plus
forte raison s'il disait : "Je suis du même rang que le souverain
du pays, et même supérieur à lui" ! Non
seulement il serait puni, mais ses parents, son épouse et ses
enfants en souffriraient aussi. C'est comparable à un grand incendie
détruisant des maisons, ou bien à un grand arbre qui,
en tombant, entraîne également dans sa chute les arbustes
qui l'entourent. Pour revenir
à vous, Ueno Shichiro Jiro,
vous êtes un simple mortel, à l'époque des Derniers
jours du Dharma, et vous êtes né dans une famille de samouraïs ; on pourrait vous considérer comme un homme mauvais, et pourtant
votre coeur est celui d'un homme bon. Parce que tous, du plus puissant
au plus humble, refusent d'avoir foi en mes enseignements. Ils harcèlent
le petit nombre des croyants, leur imposent de lourdes taxes ou confisquent
leurs domaines, leurs rizières et leurs champs, et même,
dans certains cas, les mettent à mort. Il est donc difficile
de croire en mes enseignements, et pourtant votre mère et votre
défunt père ont eu le courage d'y adhérer. |
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