5. Enseignement, pratique et preuve Ryuei Michael McCormick |
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En lisant ce texte nous pourrions être impressionnés par la déclaration concise et profonde selon laquelle, fondamentalement, tous les êtres sensitifs sont des bouddhas, juste tels qu’ils sont, et que tous les crimes et la souffrance de ce monde sont simplement des phénomènes éphémères qui, en fin de compte, ont peu d’importance. Cependant, ces vers apparemment stimulants et graves ont sans doute été récités par le chef d'une bande de moines-guerriers tendai pendant qu’ils brûlaient un temple rival, comme cela a été consigné dans les premières versions du Heike Monogatari (Le Dit des Heike). Comment une telle abjection a-elle pu se produire ? Comment la croyance dans la nature de bouddha, présente dans tous les êtres, a-elle pu être pervertie au point de justifier l’agressivité et la destruction, la violence entre moines qui, théoriquement, devaient appliquer la conduite exposée par le Bouddha ? Beaucoup de personnes à l'extérieur de l'Asie, ont l'impression que le bouddhisme est une religion paisible de nonnes et de moines végétariens et passifs. Certains connaissent peut-être de réputation les moines de Shao Lin qui "ont inventé le Kung Fu", mais ils peuvent aussi imaginer que ces moines se battaient pour se défendre - et seulement lorsqu’ils n'avaient pas d’autre choix. Malheureusement, la réalité du bouddhisme n'est en rien différente de la réalité de toute autre religion. Même les idéaux les plus élevés peuvent être altérés et dévoyés par des leaders et des maîtres égocentriques et sans scrupules, afin de justifier des croisades ou des jihads. Mais comme dans les autres religions, ces interprétations égoïstes ne reflètent pas les vraies intentions des fondateurs qui seraient horrifiés de la façon dont leurs enseignements sont utilisés et corrompus. Dans le bouddhisme mahayana, on apprend que tous les êtres ont la nature de bouddha, autrement dit, le potentiel pour devenir bouddha, un Éveillé. Ce principe implique également que, même si dans leur essence tous les êtres sont bouddha et possèdent la capacité de parvenir à l’Éveil, ils n’y parviennent pas forcément. Les enseignements sur la nature de bouddha sont très complexes et donnent lieu à des interprétations fort diverses. Une interprétation particulièrement hasardeuse disait que tous les êtres sont bouddha, tels qu’ils sont. A mesure que cette interprétation s’est propagée, la distinction entre potentialité et réalité disparut : tous les êtres étaient des bouddhas et tout ce qu'ils disaient et faisaient, même si cela était contraire à la morale, était considéré comme actions de bouddha. Mais est-ce vraiment ce que le bouddhisme enseigne ? Est-ce que l’enseignement de la nature-de-bouddha conduit à la voie du ‘‘faire tout et n’importe quoi’’? Nichiren ne le pensait certes pas. Il était très critique envers ceux qui enseignaient que l'on pouvait atteindre la bodhéité sans le facteur crucial – l’adhésion sincère au Sutra du Lotus. Mais que cela implique-t-il au juste ? Est-ce que cela signifie que tant que nous croyons en un texte particulier nous sommes bouddha et pouvons faire ce qui nous plaît ? Bien sûr que non ! Pour Nichiren, la foi dans le Sutra du Lotus signifie être fidèle à l’enseignement contenu dans le Sutra du Lotus ainsi qu’au Bouddha. La foi dans le Sutra du Lotus signifie croire que nous portons à l’intérieur de nos vies la capacité de vivre comme le Bouddha vécut, de suivre son exemple. Comment ? Mais laissons Nichiren en parler lui-même :
Nichiren est même allé jusqu’à comparer la pratique de daimoku avec celle du bodhisattva Fukyo dans le Sutra du Lotus.
La pratique du bodhisattva Fukyo consistait à saluer toute personne qu’il rencontrait avec les mots suivants (vingt-quatre caractères dans le Sutra du Lotus) :
Nichiren met l’accent sur Namu, l'expression de la foi, placé devant les cinq caractères du titre du Sutra du Lotus (Myo Ho Ren Ge Kyo) et parle de l’ensemencement de la bodhéité. Mais ni la pratique de Fukyo ni celle de Nichiren ne visent l’Éveil pour une satisfaction égoïste ou pour une auto-justification. Les deux pratiques voient tous les êtres comme des bouddhas potentiels que l’on doit traiter avec respect, compassion et amour-empathie. Les deux pratiques cherchent à permettre à tous les êtres de se libérer de leurs doutes et de leurs soucis afin de révéler la même sagesse et la même compassion que celles du Bouddha. La pratique du Sutra du Lotus doit ainsi nous permettre de voir et de traiter tous les êtres comme des bouddhas en puissance et nous permettre donc d’agir de la même manière que le Bouddha. Comme Nichiren l’a enseigné :
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