Le troisième enseignement (La troisième doctrine) Lettres
et traités de Nichiren Daishonin. ACEP - vol. 7, p. 165; SG* p. 866. |
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J'ai lu votre lettre d'un bout à l'autre avec attention. Vous m'expliquez que vous avez dit : "Dans le 9e volume du Hokke Mongu Ki* on lit : "Le libérer du monde des trois plans par le moyen des enseignements provisoires est ce que l'on appelle une libération éphémère." A quoi Ryosho-bo (note) vous a répondu : "Un tel commentaire ne se trouve nulle part." Il est pourtant bien dit, en effet, dans les commentaires sur la partie du Hokke Mongu* traitant du chapitre Juryo* (XVI) dans le 9e volume du Hokke Mongu Ki* : "Du passage "Pas une personne, s'étant libérée de l'éphémère..." jusqu'au passage "les enseignements éphémères du passé furent exposés pour accéder à la vérités", [le sens de ce texte est bien que] la libération du monde des trois plans au moyen des enseignements provisoires doit être appelée une libération éphémère. Pas une personne des trois véhicules ne peut manquer d'être libérée du monde des trois plans ; pas un seul être dans les mondes-états des hommes et du Ciel ne peut manquer de sortir des trois mauvaises voies. Toutefois, ils ne sont tous parvenus qu'à une "libération éphémère." Il est dit dans le 9e volume du Hokke Mongu* : "Personne ne peut manquer de sortir de l'éphémère pour accéder au véritable. Ainsi, nous comprenons que les enseignements éphémères du passé furent exposés pour donner accès à la vérité." Dans le chapitre Juryo* (XVI), nous lisons : "Hommes de foi sincère, l'Ainsi-venu voit de quelle façon, parmi les êtres vivants, certaines personnes, ayant peu de mérites et quantité de troubles, se complaisent dans des enseignements limités. (...) Parce que les êtres vivants ont des natures différentes (...) j'enseigne différentes doctrines. Cela, [l'oeuvre du Bouddha] je ne l'ai jamais négligé un seul instant (note)." Zhiyi* et Zhanlan* ont commenté ce passage. Dans cette partie du Sutra, tous les enseignements du Sutra Kegon*, exposés par le Bouddha immédiatement après son Éveil et comprenant à la fois les enseignements spécifique et parfait, et jusqu'aux quatorze chapitres de l'enseignement théorique* du Sutra du Lotus, sont appelés "des enseignements inférieurs". Ceux qui s'y complaisent sont qualifiés de personnes ayant "peu de mérites et quantité de troubles", et la libération que ces enseignements procurent est qualifiée d'éphémère. Si tel est le cas, ni les adeptes de l'école Kegon s'appuyant sur le Sutra Kegon* ; ni ceux de l'école Hosso qui se réfèrent au Sutra Jimmitsu* ; ni ceux de l'école Sanron, fondée sur les sutras Hannya* ; ni ceux de l'école Shingon qui part du Sutra Vairocana* ; ni ceux de l'école de la Terre pure, qui révèrent le Sutra Kammuryoju ; ni ceux de l'école Zen, ayant pour origine le Sutra Ryoga ; ni les adeptes des diverses autres écoles fondées sur leurs sutras respectifs - quand bien même ils liraient et réciteraient les sutras sur lesquels s'appuie leur école aussi rigoureusement qu'on le leur enseigne, - aucun d'eux ne pourra se libérer du monde des trois plans ni échapper aux trois mauvaises voies. Et encore moins ceux qui affirment que ces sutras sont les véritables enseignements et les proclament supérieurs au Sutra du Lotus ! Ils sont comparables à ces personnes qui, de rage, crachent vers le ciel ou essaient d'agriper la terre à mains nues. Quant à l'enseignement dont je parle : après la mort de l'Ainsi-venu, en Inde, pendant plus de mille cinq cents ans, elle était connue par les vingt-quatre successeurs du Bouddha - parmi lesquels Nagarjuna et Vasubandhu - mais ils ne l'ont pas révélée. En Chine, pendant plus de mille ans, la plupart des gens l'ignoraient ; seuls Zhiyi* même pour le Grand-maître* Saicho*. Maintenant quand moi, Nichiren, je m'interroge sur tout cela, je découvre qu'en plus du passage du Sutra du Lotus cité plus haut, il est écrit dans le Sutra du Nirvana : "Ceux qui avanceraient une autre conception des Trois trésors, sachez bien qu'ils ne pourraient plus prendre refuge dans ces trois purs trésors ou compter sur leur protection. Ils seraient incapables d'observer le moindre précepte et pour finir, ils ne pourraient pas recueillir le fruit des auditeurs-shravakas, des pratyekabuddhas ou des bodhisattvas." (note) Ce passage fait clairement allusion au [point essentiel du] chapitre Juryo* (XVI) du Sutra du Lotus. Ce chapitre y est comparé à un arbre, et les enseignements antérieurs au Sutra du Lotus et l'enseignement théorique* à son ombre. D'autres passages de sutra emploient la même métaphore. Ils enseignent que les bienfaits des cinq périodes et huit enseignements, des enseignements encore limités et de ceux qui vont au-delà, du Mahayana et du Hinayana, sont tous comparables à l'ombre, tandis que la doctrine de l'enseignement essentiel* est comparable à l'arbre. Ils comparent aussi les bienfaits obtenus par les contemporains du Bouddha, grâce aux enseignements antérieurs au chapitre Juryo* (XVI), à l'ombre d'un arbre dans l'obscurité car ils n'étaient accessibles qu'à ceux qui avaient déjà entendu le chapitre Juryo* (XVI) dans des vies antérieures. Vous m'écrivez aussi que Myosho-bo [votre adversaire dans ce débat] a affirmé que ne pas croire au Sutra du Lotus ne constituait pas en soi une opposition au Dharma, et que ceux qui ne croiraient pas ne tomberaient pas nécessairement en enfer. Mais à ce sujet il est dit, dans le 5e volume du Sutra du Lotus : "A l'égard de ce Sutra, ceux qui nourriraient des doutes et ne parviendraient pas à croire tomberont immédiatement dans les mauvaises voies."(réf.) Voilà ce que vous devriez savoir. Lorsque l'on fait la distinction entre le Sutra du Lotus et les enseignements antérieurs, afin d'évaluer la profondeur et la supériorité relative des uns et des autres, la comparaison, entre les enseignements encore limités et ceux qui vont au-delà, peut se faire selon trois niveaux de doctrine (note). L'enseignement de Nichiren représente le troisième. Le premier et le deuxième ont déjà été évoqués, même si cela a toujours été en termes aussi vagues que la description d'un rêve. Mais le troisième n'a jamais été clairement énoncé. Zhiyi*, Zhalan et Saicho* y ont fait allusion, mais sans le révéler pleinement. Ils ont laissé ce soin à notre époque, celle des Derniers jours du Dharma. C'est le temps qui correspond à la cinquième période de cinq cents ans [après la mort du Bouddha]. Toutefois, on ne m'a rien rapporté de précis sur ce débat de doctrine. Ryosho-bo est un homme d'une grande érudition. S'il avait seulement répondu : "J'ai le regret de vous le dire, mais c'est un passage que je connais bien", et s'il avait, d'une façon ou d'une autre, tenté de vous faire taire en prétendant avoir démonté nos arguments, je me demande bien alors ce que vous auriez pu faire. Mais quoi qu'il en soit, non seulement ses moines et lui ignoraient ce passage de commentaires, mais son affirmation qu'il n'existait dans aucun des soixante volumes (note) est une punition du Ciel. Son opposition au Dharma est apparue clairement lorsqu'il a rencontré un messager du Sutra du Lotus. De plus, ce débat a certainement été motivé par une raison précise. S'il vous plaît, tâchez de savoir ce qu'en ont dit Ota Jiro Hyoe de Mishima, Daishin-bo et le supérieur du temple principal. Des situations semblables sont décrites en détail dans le Sutra. Le Roi-Démon du sixième Ciel fera immanquablement obstacle au Pratiquant du Sutra du Lotus. Parmi les dix objets de méditation, cela correspond à la méditation sur les fonctions démoniaques. Par nature, le démon se réjouit de barrer la route au bien et de pousser à faire le mal. Impuissant contre certains qu'il ne peut forcer à mal agir, il est contraint de les laisser faire de bonnes actions. Il voue une haine farouche à ceux qui pratiquent les deux véhicules, les incitant à pratiquer un moindre bien dans les mondes-états des hommes et du Ciel. Il fait obstacle à ceux qui se consacrent aux pratiques du bodhisattva en leur suggérant de s'engager dans la pratique des deux véhicules. Et pour finir, si une personne pratique exclusivement l'enseignement pur et parfait, il la fera retomber dans une pratique combinant l'enseignement parfait* avec l'enseignement spécifique (bekkyo). A ce sujet, vous pouvez lire le huitième volume du Maka Shikan. Vous dites que Ryosho-bo a proclamé ensuite que ceux qui pratiquent la méditation shikan sont tenus d'observer les préceptes. Pourtant, il est dit, dans le neuvième volume du Hokke Mongu*, que [après la disparition du Bouddha] aux première, deuxième et troisième des cinq étapes de pratique on peut s'abstenir d'bserver les préceptes. Cela apparaît aussi clairement dans le texte du Sutra lui-même. Zhanlan* explique cette contradiction du Maka Shikan sous la forme d'un échange de questions et de réponses (note). Vous le verrez dans le 9e volume du Hokke Mongu Ki*. Il existe deux sortes de pratiquants à ce premier stade de la pratique, qui consiste à se réjouir [d'entendre enseigner le Dharma]. Ceux dont les capacités sont développées peuvent observer les préceptes tandis que ceux dont les capacités sont encore latentes sont dispensés de le faire. De plus, il existe des différences selon les époques, celles du Dharma correct, du Dharma formel et des Derniers jours du Dharma ; et il y a encore une différence si l'on pratique shoju ou shakubuku. Il faut également conserver en mémoire l'expression employée par Zhiyi*" [aussi insolite qu'] un tigre sur la place du marché". (réf.) Dorénavant, ne tenez plus de débats à Shimosa. Après avoir vaincu Ryosho-bo et Shi'nen-bo, si vous débattez de nouveau avec d'autres, cela ne pourra qu'amoindrir l'effet des victoires déjà remportées. J'ai entendu dire que ces moines, Ryosho-bo et Shi'nen-bo, me calomnient depuis plusieurs années. Ce ne sont que des moustiques ou des taons. Rabaisser, comme ils le font, Nichiren, qui est semblable à un roi-lion, sans l'avoir jamais vu ni entendu, est totalement insensé ! Que des adeptes de l'école Tendai-Hokke récitent eux-même Namu Myoho Renge Kyo tout en approuvant la psalmodie du Nembutsu chez les autres est déjà chose étrange. Et, non contents de ne pas leur faire de remontrances, ils calomnient celui qui réfute l'école Nembutsu, ce qui est plus étrange encore ! Quant à Daishin-bo, comme je vous l'ai déjà dit, envoyez-lui une lettre réfutant point par point ses arguments. Il est possible que les Dix Filles-démones l'aient ramené à notre foi. Peut-être l'envoyé du Roi-démon qui l'a possédé un moment l'a-t-il maintenant quitté. Le Sutra dans lequel il est écrit : "Des démons maléfiques posséderont les autres"(réf.) ne peut mentir. J'aurais encore bien des choses à vous dire, mais le messager est pressé, c'est pourquoi je vous écris cette lettre pendant la nuit. Avec mon
profond respect, Le 1er jour du 10e mois ARRIÈRE-PLAN. - Nichiren Daishonin écrivit cette lettre alors qu'il résidait sur le Mont Minobu, le 1er jour du 10e mois de 1277, pour Toki Jonin, personnage central parmi les croyants de la province de Shimosa. Samouraï devenu nyudo (c'est-à-dire se consacrant à la vie religieuse), Toki était un homme d'une considérable érudition, et Nichiren Daishonin lui confia beaucoup d'écrits importants, au nombre desquels le traité sur "Le véritable objet de vénération" Le gosho ci-dessus fut écrit en réponse au récit dans lequel Toki Jonin décrit un débat qui l'avait opposé à Ryosho-bo, éminent moine de la région et adepte de l'école Tendai. Dans sa réponse, Nichiren Daishonin commente les points soulevés dans le débat et fournit de plus amples clarifications en vue de confrontations futures. (Commentaire ACEP) En anglais : The Third Doctrine - http : //www.sgilibrary.org/view.php?page=854&m=1&q=The%20Third%20Doctrine |
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