Afin d'établir le supériorite d'un sutra sur
les autres la tradition fait examiner trois points : 1) la possibilité
qu'offre le sutra de parvenir à l'Éveil 2) la cohérence
du processus d'instruction du début jusqu'à la fin 3)
la relation originelle entre maître et disciple
En examinant ces trois points Zhiyi
affirme dans le Hokke Gengi la supériorité
du Sutra du Lotus sur tous les autres.
La première question est de savoir si tous
les êtres, quelles que soient leurs capacités, peuvent
atteindre l'état de bouddha grâce à un sutra particulier
ou non. Les sutras autres que le Sutra du Lotus ne révèlent
pas que tous les êtres humains ont la potentialité d'atteindre
l'Éveil parce que leurs capacités sont considérées
comme différentes et fixes. Au contraire, le Sutra du Lotus
affirme clairement que tous ont la capacité de parvenir à
la bodhéité en expliquant que les mondes-états,
y compris la bodhéité, sont contenus les uns dans les
autres et inhérents dans leurs vies.
La deuxième question est de savoir si le processus d'enseignement
est cohérent ou non du début jusqu'à la fin. A
la différence du Sutra du Lotus qui montre clairement
à quel moment débute et s'achève l'instruction
des hommes par Shakyamuni, les autres sutras ne le font pas. Le chapitre Kejoyu* (VII) de l'enseignement
théorique du Sutra du Lotus explique que le Bouddha
planta d'abord la graine de bodhéité dans la vie de ses
contemporains à l'époque du passé lointain de sanzen jintengo, quand il exposa le Sutra en tant que seizième fils
du bouddha Daitsuchisho. Parmi ceux qui entendirent
cet enseignement à l'époque, certains renièrent
leur foi en ce Sutra et, après avoir transmigré dans les
voies mauvaises, renaquirent en Inde du vivant du bouddha Shakyamuni.
Ce sont ses disciples-shravakas qui reçurent
de lui la prédiction de leur futur Éveil grâce à
leur foi dans le véhicule unique du Sutra du Lotus.
Dans les autres sutras, le processus de l'ensemencement et de la récolte,
ou le début et l'achèvement de l'enseignement du Bouddha,
n'est pas révélé.
La troisième question est de savoir si la relation originelle
entre le maître et le disciple est révélée.
Le terme de maître fait référence au Bouddha. Le
chapitre Juryo* (XVI) de l'enseignement
essentiel du Sutra du Lotus révèle que Shakyamuni,
à l'origine, atteignit l'Éveil dans
le passé lointain de gohyaku jintengo,
une époque bien plus éloignée que celle de
sanzen jintengo, et que, depuis cette époque, il n'a cessé
d'enseigner aux êtres humains. Les autres sutras disent que Shakyamuni
atteignit l'Éveil au cours de sa présente vie et que les hommes
reçurent pour la première fois son enseignement dans cette
vie. Même si certains sutras font état d'une relation passée
de quelques personnes avec le Bouddha, elle se situe à l'époque
où Shakyamuni était engagé dans la pratique des
austérités de bodhisattva et non lorsqu'il avait atteint
l'état de bouddha. Le lien ainsi formé n'est pas aussi
profond que celui qui existe avec ses disciples de gohyaku jintengo. Ce troisième critère est également
utilisé pour démontrer la supériorité de
l'enseignement essentiel sur l'enseignement théorique.