Nous commencerons par lire aujourd’hui les passages suivants du Sutra du Lotus2 :

Aksayamati, tels sont les mérites menés à accomplissement par ce bodhisattva Avalokiteshvara, qui voyage en une variété de figures de par les royaumes pour délivrer les êtres. C'est pourquoi vous vous devez de faire de tout cœur offrande au bodhisattva Avalokiteshvara.

Ce bodhisattva-mahasattva Avalokiteshvara est capable de faire don de sécurité au milieu des dangers pressants et effrayants. C'est pourquoi tous, dans ce monde Saha, l'appellent Abhayamdata.

Le bodhisattva Aksayamati s'adressa à l'Éveillé : « Vénéré du monde, je vais dès maintenant faire offrande au bodhisattva Avalokiteshvara. » Il défit alors de son cou un collier au grand nombre de perles et de joyaux, dont le prix se montait à des centaines et des milliers de pièces d'or, et le donna au bodhisattva Avalokiteshvara en lui disant : « Ô Bienveillant, accepte ce collier de rares joyaux comme vêtement du Dharma. »

Le bodhisattva Avalokiteshvara, à ce moment, ne consentit point à l'accepter. Aksayamati s'adressa de nouveau à lui : « Ô Bienveillant, accepte ce collier par bonté pour nous nous.»

Alors l'Éveillé dit au bodhisattva Avalokiteshvara : « Par bonté pour le bodhisattva Aksayamati ainsi que les quatre congrégations, les devas, nagas, yakshas, gandharvas, asuras, garudas, kimnaras, mahoragas, humains et non-humains, accepte pour cette raison ce collier. »

À ce moment, le bodhisattva Avalokiteshvara manifestant sa bonté envers les quatre congrégations ainsi que les devas, nagas, humains et non-humains accepta le collier qu'il divisa en deux parties. Il en offrit une partie au Bouddha Shakyamuni, et l'autre à la Tour aux Trésors du bouddha Taho.

Aksayamati, telles sont les forces divines et souveraines grâce auxquelles le bodhisattva Avalokiteshvara voyage dans le monde Saha.

Comme les jours précédents, partagez votre temps de pratique restant entre la lecture du Chapitre XVI en shindoku et la récitation de Namu Myoho Renge Kyo.

Le Bodhisattva Contemplateur des sons du monde porte divers noms bien que celui que nous utilisions n’ait pas vraiment grande importance. Dans le cadre de ce guide, j’utiliserai celui de Kanzeon dont le nom est ainsi prononcé en shindoku liturgique.

Ce chapitre comprend nombre d’éléments importants, et j'espère que vous y reviendrez un jour. J’ai choisi cette section car elle démontre clairement la relation de ce Bodhisattva au Sutra du Lotus, un aspect qui reste parfois ignoré ou oublié.

Il s’agit d’un bodhisattva essentiel dans les cultures bouddhiques d’Asie de l’Est et, dernièrement, en Occident. Il est même parfois le point central de leur croyance ou de leur pratique. Il y a des raisons historiques à cela, en particulier dans l’histoire du bouddhisme chinois. Des découvertes archéologiques dans les grottes bordant la Route de la Soie montrent d’ailleurs qu'un culte distinct et propre à Kanzeon commença à émerger entre les VIe et VIIIe siècles.

Avant de vénérer ce bodhisattva en dehors du contexte du Sutra du Lotus, peintures et sculptures montrent que la pratique et le culte de ce Sutra étaient axés sur la vénération des deux Bouddhas Shakyamuni et Maints Trésors, et leur stupa. Cependant, vénérer Kanzeon devint rapidement bien plus populaire à un point tel que l’associer et le relier au Sutra du Lotus fut ignoré, oublié, voire laissé pour compte. De ce fait, peu d’Occidentaux vouant un culte à Kanzeon connaissent sa relation au Sutra du Lotus.

Comme l’exprime le passage ci-dessus, le Bodhisattva Kanzeon fait des offrandes aux deux Bouddhas Shakyamuni et Taho, lesquelles soulignent qu’il leur est subordonné. Il est à mon sens tout aussi important de noter qu’offrir un collier à Kanzeon ne veut pas dire vouloir qu’il accomplisse quoi que ce soit de particulier, mais plutôt reconnaitre ce qu’il a pu accomplir.

Pourquoi ? Si nous considérons Kanzeon comme un bienfaiteur et nous adressons à lui uniquement en tant que demandeur, nous sous-estimons nos propres capacités et notre lien direct avec le Bouddha Atemporel Shakyamuni. Avoir une telle attitude est cependant facile si nous considérons Kanzeon hors du contexte du Sutra du Lotus.

Remarquez toutefois que Kanzeon attend d’abord que les Bouddhas lui permettent d’accepter le collier et qu’il ne le reçoit qu’après en être autorisé. Dès qu’il accepte cette offrande, il divise immédiatement le collier qu’il remet aux deux Bouddhas. Son attitude démontre ainsi clairement la relation étroite qui le lie en tant que disciple aux Bouddhas Taho et Shakyamuni.

Les bienfaits que procure Kanzeon et le respect que l’on éprouve envers ce Bodhisattva sont directement liés à la pratique du Sutra du Lotus et ne se substituent pas à lui. En ce qui nous concerne, pratiquer Namu Myoho Renge Kyo nous fait naturellement bénéficier de tous les bienfaits contenus dans le Sutra, y compris ceux promis par Kanzeon, le bodhisattva Contemplateur des sons du monde.

Je voudrais ici également attirer votre attention sur l’une des fonctions de ce bodhisattva qui consiste à entendre les cris de quiconque souffre. Je pense en effet que du fait que nous pratiquons le Sutra du Lotus à l'époque suivant la mort du Bouddha, et que nous avons fait le vœu de sauver tous les êtres, nous devrions prendre Kanzeon comme modèle de conduite.

Il importe que nous réalisions qu’en tant que disciples du Bouddha, nous représentons les nombreuses manifestations de Kanzeon. De même, notre vœu de vouloir diffuser et protéger le Sutra du Lotus et ses pratiquants nous permet de remplir naturellement la fonction de « ce Bodhisattva Avalokiteshvara, qui voyage en une variété de figures de par les royaumes pour délivrer les êtres ».

Pour résumer, plutôt que de considérer Kanzeon comme un bodhisattva dont nous recherchons certains avantages, voire dépendons, je pense qu’il serait plus approprié de le considérer comme un exemple à suivre dans ce monde actuel de souffrances. En outre, nous entretenons en tant que disciple une relation fondamentale et directe avec le Bouddha Atemporel, ce qui signifie qu’il n'est pas nécessaire d’y ajouter un intermédiaire.

J'espère que vous continuez à travailler l'observation des huit voies justes. Comme vous l’aurez constaté, il s’agit d’une pratique infinie puisqu’il y a toujours quelque chose à pouvoir améliorer. Le bouddhisme est une quête, une quête éternelle visant à améliorer nos vies et approfondir notre Éveil, l'Éveil qui n'est pas plus un terminus qu’une destination, mais plutôt un voyage, car il n’existe rien qui ne soit déjà là.


1Source accessible sur https://ryusho.org/blog/?p=3126

2Traduction en français accessible sur http://www.nichiren-etudes.net/lotus/lotus-25.htm