Commentaire de l'extrait N° 25, le 28 mars 2021
par Céline

Extrait du Niike Gosho

« Efforcez-vous d’approfondir votre foi jusqu’à votre dernier instant. Sinon vous éprouverez des regrets. Ainsi il faut douze jours pour aller de Kamakura à Kyoto. Si ayant marché pendant onze jours, vous vous arrêtez au matin du dernier jour, comment pourrez vous admirer le clair de lune sur la capitale ? Quoi qu’il advienne, restez toujours proche du moine qui connaît le coeur de ce Sutra, continuez à recevoir de lui l’enseignement correct et poursuivez pas à pas votre voyage de la foi. »

Niike Seamon no jo : samouraï qui garda la foi même lorsque les disciples de Nichiren furent persécutés (Mont Minobu, 1280).

J’ai souligné quelques mots et expressions qui m’ont parus importants.

approfondir votre foi : C’est mettre en pratique les concepts de l’enseignement du Dharma pour pouvoir les valider et ne jamais les oublier. On croit toujours savoir plein de choses sur le bouddhisme mais même le B-A BA est toujours bon à revoir. C’est un peu comme un jardinier qui réaliserait la profondeur de sa tâche et se ferait cette remarque de sagesse : « plus j’apprends dans ce métier plus je découvre que ne sait rien. »

votre dernier instant : Croire et pratiquer sans relâche, avec endurance et soif de curiosité jusqu’à la fin de sa vie.

regrets : Même si cette métaphore du voyage utilisée pour exprimer le chemin de la foi boudhique semble claire comme de l’eau et aussi légère qu’une plume, pour bien comprendre les enjeux de quitter cette route de 432 km, il me semble important d’étudier l’ensemble du contenu de ce courrier. Ainsi, le mot ‘regret’ prendra tout son sens. En introduction du Gosho, Nichiren se félicite d’être né à l’époque des Derniers jours du Dharma et plaint ceux qui ne croient pas dans le Sutra du Lotus.

Il explique que même certaines personnes qui prétendent croire dans ce Sutra qui le récitent et le recopient, ont des actes qui trahissent cet enseignement et que cela équivaut à tuer le Boudha lui-même et tous les autres Boudhas de l’univers. Qu’une telle faute, ainsi que celles des 14 offenses (voir plus bas) au Dharma, serait pratiquement impossible à expier.

Nichiren décrit dans le paragraphe suivant, l’état d’enfer dans lequel peuvent tomber les personnes qui offensent le Dharma. Décrit comme un lotus rouge cramoisi par le froid glacial qui y règne, cet enfer psychique et physique que ni la réussite et la renommée ne peuvent adoucir, tant les états d’avidité et d’esprits affamés dominent la vie de la personne.

Mais Nichiren ajoute que celui qui fait une seule offrande au moine qui garde ce Sutra, ne s’égarera pas dans les mauvaises voies et que s’il renouvelle ses dons tout au long de sa vie, les bienfaits seront immenses et il sera impossible d’exprimer sa reconnaissance envers le Boudha Shakyamuni pour tant de bonheur et les larmes de joie jailliront.

Dans le paragraphe suivant, Nichiren décrit qu’en début de pratique, portés par leur état de boudha, les pratiquants sont habités par une croyance forte et sincère mais qu’à mi-chemin la foi s’atténue. (on le voit parfois chez certains pratiquants qui décrochent du bouddhisme et partent vers d’autres écoles). Leurs dons au Boudha se font rares, ils se forgent des conceptions erronées et sombres dans l’arrogance. Cette partie du texte explique combien il est difficile de croire dans le Sutra du Lotus et qu’il est important de developper l’endurance nécessaire pour réaliser la bodhéité.

Cette notion est très importante à garder en tête surtout à notre époque où foisonnent bon nombres de nouvelles religions inspirées du boudhisme. Plus loin Nichiren constate que les saisons s’égrainent les unes après les autres prouvant l’impermanence des choses et fait référence à ses anciens amis et pratiquants que la vie a quittés et se demande dans quel monde ils renaîtront. Il explique que dans les flammes de l’enfer, certains jurent de suivre le Sutra du Lotus mais qu’une fois dans la vie, s’ils ont la chance de renaître sous forme humaine, ils oublient leur promesse et préfèrent s’amuser et amasser des fortunes.

proche du moine
Rester proche du moine signifie, ne pas couper le lien qui existe avec lui, suivre son enseignement et ne pas changer d’école

l’enseignement correct
Dans plusieurs lettres, Nichiren explique comment, à son époque (et toujours à la nôtre), devant tant de gens qui s’opposent au Dharma, les divinités qui devraient s’occuper des pratiquants, quittent les sanctuaires et comment des moines ‘sincèrement’ malhonnêtes et les démons, égarent les croyants avec des enseignements erronés et prennent leur place. Nichiren ajoute que : « dans un lointain passé, les divinités, bodhisattva et auditeurs-shravakas, en présence de Shakyamuni, firent solennellement serment, si un pays était hostile au Sutra du Lotus, de susciter grêle et gelées en été pour conduire le pays à la famine, ou d'envoyer des parasites dévorer les récoltes ; de provoquer sécheresse ou inondations pour ruiner les champs et les fermes ; de créer des typhons qui emporteraient les hommes ; ou de se transformer en démons pour les tourmenter. »

Nichiren, rappelle qu’il est le seul détenteur de l’enseignement le plus précieux du Bouddha qui ne doit se révéler qu’à partir des premiers 500 ans des Derniers jours du Dharma. Il s’agit du seul moyen pour atteindre l’état de boudha de nos jours, tout simplement en récitant Namu Myo Ho Renge Kyo.

« Si quelqu'un comprend véritablement le bouddhisme, il doit le montrer par son respect envers le Sangha, sa vénération pour le Dharma et ses offrandes au Bouddha. Le Bouddha Shakyamuni n'est plus parmi nous maintenant ; aussi devez-vous respecter les personnes qui ont la sagesse de l'Éveil comme vous respecteriez le Bouddha lui-même. Si vous le suivez sincèrement, vos bienfaits seront abondants. Celui qui désire le bonheur dans sa vie prochaine doit renoncer à son désir de gloire et de fortune et respecter comme un boudha vivant, le moine qui enseigne le Sutra du Lotus, si humble que soit sa position. C'est ce qui est écrit dans le Sutra. »

Nichiren conclut sa lettre en expliquant que si certains passages de la lettre lui semblent obscures, il peut éclaircir ses doutes en questionnant le moine qui lui apportera le courrier.

Les quatorze offenses

ou dénigrements ou encore anti-valeurs (jushi-hibo 十四誹謗 ou jushi-hobo, 十四謗法, fourteen slanders ).

Quatorze facteurs du dénigrement du Bouddha, de son enseignement et des personnes qui pratiquent ce Dharma. Ils sont énumérés dans le Hokke Mongu Ki de Zhanlan qui s'appuie sur le chapitre III du Sutra du Lotus. Ce sont :

1) l’orgueil, kyoman;
2) l'indolence, kedai ;
3) l'autocentrisme, keiga ;
4) la superficialité, senshiki ;
5)l’attachement aux désirs terrestres, jakuyoku ;
6) le manque de discernement, fuge ;
7) l'incroyance, "égarements du doute", fushin ;
8) l'esprit de contradiction, hinshuku ;
9) le doute entretenu, giwaku ;
10) la médisance, la calomnie, hibo;
11) le dénigrement du bien, kyozen ;
12) la haine du bien, zozen;
13) la jalousie envers le bien, shitsuzen;
14) le ressentiment à l'égard du bien, konzen.

Les 4 derniers hobo concernent particulièrement les pratiquants du Sutra du Lotus comme le dit le chapitre III.

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