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8. Edifier sa Tour aux Trésors

Ryuei Michael McCormick

Dans une lettre à son disciple Abutsu-bo, Nichiren écrit :

« Vous êtes vous-même un bouddha authentique, doté des trois propriétés du Bouddha. C'est avec cette conviction que vous devriez réciter Namu Myoho Renge Kyo. Alors, le lieu où vous résidez et où vous récitez daimoku sera le lieu où se trouve la Tour aux Trésors. » (La Tour aux Trésors. Sado, mars 1272)

Ce passage indique que la Tour aux Trésors est un symbole des quatre bienveillances infinies qui éclosent en nous lorsque nous adhérons au Sutra du Lotus et le pratiquons.

La vie d’une personne ordinaire est souvent pleine du sentiment d’insécurité et d’anxiété. On peut parler d’une mentalité de miséreux qui use ses forces pour conserver le peu de bonheur et de sécurité qu’il s’est procuré tout en essayant constamment d’en grappiller un peu plus. L’anxiété, la frustration et l’hostilité marquent la vie de ceux qui ont cet état d’esprit d’assiégés. C’est cela que Thoreau* appelle "une vie de désespoir tranquille".

Le Sutra du Lotus nous montre cependant que la mentalité de miséreux est une illusion. Le chapitre XXI dit :

« …l'ensemble des enseignements de l'Ainsi-Venu, l'ensemble des pouvoirs supranaturels et souverains de l'Ainsi-Venu, l'ensemble du réceptacle des mystères de l'Ainsi-Venu, l'ensemble des modes fort profonds de l'Ainsi-Venu sont tous révélés et manifestés dans ce Sutra. » (note)

Cela a pour nous une importance capitale, car ces vertus et pouvoirs sont l’apanage de tous les êtres humains et pas seulement celui de l’Ainsi-Venu. Le vrai trésor n’est pas la sécurité séculière mais la vie du Bouddha, c'est-à-dire la vie de l’univers où tout - êtres vivants et objets - est interconnecté. C’est la Tour aux Trésors de paix et de générosité à l’intérieur de chacun de nous et, lorsque nous la découvrons, nous pouvons toucher la vie de tous ceux qui nous entourent  (famille, amis, collègues et ces innombrables inconnus croisés tout au long de la journée) de la même façon que nous avons été touchés par l’aide et le dévouement des autres. En ouvrant nos vies aux autres, par un sourire, par un mot aimable ou un geste désintéressé, nous leur facilitons la découverte de la Tour aux Trésors dans leur cœur. De cette manière, la prajna et l’amour-empathie
(maitri) de l’Ainsi-Venu s’étendent à travers l’espace-temps.  Comme le dit le Sutra :

« À ce moment-là, les mondes des dix directions se trouvèrent en communication sans obstacle, comme une seule Terre de Bouddha »

Le chapitre XXI dit également :

« Dans le pays où vous vous trouverez, s'il en est qui le reçoivent, le gardent, le lisent, le récitent, le copient et pratiquent selon ce qui est exposé, à l'endroit où demeureront les rouleaux de ce texte, que ce soit dans un jardin ou dans une forêt, au pied d'un arbre, dans des quartiers monastiques ou dans une résidence laïque, dans un palais, une vallée de montagne ou un désert, il vous faudra chaque fois ériger un stupa et y faire offrande. Pourquoi cela ? Sachez qu'un tel endroit est le lieu de la Voie. »

Ce passage montre que l’Éveil est à notre portée quels que soit le temps et le lieu.

Chaque fois que nous sommes en mesure d’oublier notre intérêt égoïste et faire naître l’esprit de l’Ainsi Venu dont il nous a fait part dans le Sutra du Lotus, avec ses pouvoirs et ses vertus illimités, c’est comme si nous consacrions une nouvelle terre pour ériger une Tour aux Trésors.

Henry Miller * s’interrogeait :

« Pourquoi donc ne pas nous donner – sans retenue, généreusement, complètement ? Si nous comprenons que nous faisons partie d’un processus infini, que nous n’avons rien à perdre, rien à gagner, mais seulement à vivre, nous comporterions-nous comme nous le faisons ? » (réf.)  

Un pratiquant du Sutra du Lotus devrait pendre cela à cœur, abandonner la mentalité de miséreux et laisser à sa place jaillir la Tour aux Trésors.

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