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Extraits de gosho sur |
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Li
Ling |
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Mon logis
était une cabane de chaume délabrée au milieu d'un
champ envahi par les mauvaises herbes, où l'on ensevelissait
les morts. La pluie coulait par le toit et les murs ne protégeaient
pas du vent. Jour et nuit, j'entendais seulement le son du vent sifflant
jusque dans mes oreilles, et je n'avais d'autre vision chaque matin
que celle de la neige recouvrant à perte de vue les chemins.
J'avais l'impression d'être tombé tout vif dans le monde
des esprits faméliques* et d'avoir été précipité dans l'un des enfers
froids. Su Wu demeura captif pendant dix-neuf ans chez les Barbares
du Nord en mangeant de la neige pour survivre, et Li Ling vécut
pendant six ans dans une grotte, vêtu d'un manteau de paille : leur expérience devenait la mienne. Ainsi,
à certains moments, j'ai été calomnié par
plusieurs centaines de personnes ; à un autre moment, confronté
à mille personnes à la fois, j'ai été persécuté
par le sabre et par le bâton. J'ai été chassé
de ma demeure et banni de ma province. Finalement, à deux reprises,
j'ai encouru la disgrâce du régent du pays, étant
une première fois exilé à Izu,
et une seconde fois, sur l'île de Sado.
Lorsque je fus banni sur cette île de la mer du Nord, je n'avais
ni suffisamment de nourriture pour vivre, ni même des vêtements
en lianes de glycines tressées pour me couvrir le corps. Les
habitants, moines aussi bien que laïcs de cette province, ont été
encore plus hostiles à mon égard que les hommes et les
femmes de la province de Sagami. Abandonné dans un champ, sans
protection contre la neige, j'ai survécu en mangeant des herbes. J'avais
l'impression de connaître le sort de Su-Wu qui survécut pendant dix-neuf ans dans la terre des barbares
du nord en mangeant de la neige, ou de Li-ling,
emprisonné pendant six ans dans une grotte au bord de la mer
du Nord. J'ai connu ces épreuves sans avoir commis le moindre
crime, mais seulement pour avoir voulu sauver tous les habitants du
Japon. Pas la
moindre statue de Bouddha n'était enchâssée, les
quatre murs étaient disjoints, et la toiture percée de
toutes parts. S'il neigeait, la neige s'accumulait sans jamais fondre.
Je restai là nuit et jour, sur une peau de bête, enveloppé
dans un manteau de paille. La nuit, il grêlait ou neigeait, il
y avait le tonnerre et la foudre. Même dans la journée,
le soleil se montrait à peine. C'était un lieu à
vous découragez de vivre. Dans cette
situation, je me comparais à Li
Ling en Chine, qui fut gardé prisonnier dans une caverne
au pays des barbares du Nord, et au maître Fadao que l'empereur Huizong des Song avait fait marquer au fer sur le front avant de l'exiler au sud du Yangzi. |
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