Histoire des Écoles du Lotus


12. Revendications la Nichiren Shoshu

Ryuei Michael McCormick

http : //nichirenscoffeehouse.net/library/2transf-docs.html
 

III. Nichiren en tant que Bouddha de la Véritable Cause
des Derniers jours du Dharma

La Nichiren Shoshu prétend que Nichiren n'était pas la manifestation du bodhisattva Jogyo, l'Envoyé du Sutra du Lotus et Messager du Bouddha Atemporel Shakyamuni mais qu'il était lui-même le Bouddha de la Véritable cause, le Bouddha de Derniers jours du Dharma dont les enseignements, la pratique et l'exemple avaient la priorité sur le Bouddha Shakyamuni relégué au statut de Bouddha du Véritable Effet, bouddha provisoire dont le but était de préparer la venue de Nichiren. Toutefois personne, en dehors du clergé de la Nichiren Shoshu (pas plus que les prêtres et érudits des autres lignées Fuji descendant de Nikko) n'accorde de crédit à cette théorie.

Celle-ci est apparue sous Nichiu (1409-1482), le neuvième Grand-patriarche du Taiseki-ji. Elle fut avancée pour la première fois par Nichigen ( ? -1486) du Nishiyama Honmon-ji qui identifiait Nichiren Shonin au Bouddha dans son Gonin-shohasho-kenmon, écrit probablement entre 1470 et 1479. Nichigen et Nichiu étaient des amis proches et il est très probable que Nichiu s'inspira de la théorie de Nichigen.

Nichiu, son contemporain Nichiyo et le disciple de Nichiu, Nykkyo étaient persuadés que l'enseignement de Shakyamuni du Véritrable effet de la bodhéité était trop sublime pour les hommes qui commençaient tout juste à pratiquer et étaient incapables de le comprendre ou de l'imiter. C'est pourquoi ils estimaient plus approprié de mettre en avant et de vénérer Nichiren Shonin qui enseignait la Véritable cause de la bodhéité. Nichikan, le 26ème Grand-patriarche du Taiseki-ji a poussé plus loin cet enseignement et en fit un dogme-clef de la lignée du Taiseki-ji. Il prétendit que Nichiren était en fait le Bouddha de la Véritable cause, éveillé depuis le passé sans commencement, kuon ganjo, et qu'il était depuis kuon ganjo, le Vrai maître du Bouddha Shakyamuni. Les autres écoles (y compris les autres lignées Fuji de Nikko) n'utilisent pas le terme de kuon ganjo mais identifient le passé infini dont parle le chapitre XVI du Sutra du Lotus au temps sans commencement. De plus, la mention dans le chapitre XVI des pratiques de bodhisattva de Shakyamuni est utilisée pour étayer la théorie de l'inclusion mutuelle des mondes-états de bodhisattva et de bouddha, à l'instar de ce qu'avait fait Nichiren lui-même dans son Kanjin Honzon Sho. Tout au contraire, la Nichiren Shoshu utilise cela pour affirmer que Shakyamuni était le disciple du Bouddha de Kuon Ganjo. Pour cette affirmation Nichikan s'appuie le Ryo Kechimyaku Sho, deux textes de transmission, attribués à Nichiren mais que les autres érudits considèrent comme des faux pieux apparus pour la première fois au XVe siècle. Ces deux textes sont le Hon-in Myo Sho (Sur la Cause primordiale) et le Hyakurokka Soja ("106 articles de prévention"). Ces deux textes sont fortement impreignés du concept de l'Éveil Atemporel du Tendai médieval.

Il ressort des écrits de Nichiren qu'il se voyait lui-même dans le rôle du bodhisattva Jogyo ; et également qu'il croyait être parvenu à l'Éveil grâce à la pratique de daimoku. Nulle part dans ses écrits il ne prétend être le Bouddha de la Véritable cause ou le Bouddha des Derniers jours du Dharma, pas plus qu'un bouddha quelconque supérieur à Shakyamuni. En fait, tous ses écrits indiquent clairement qu'il voulait que tout le monde considère le Bouddha Atemporel Shakyamuni du XVIe chapitre comme l'Objet de Vénération (Gohonzon).

En ce qui concerne Nikko, ses écrits indiquent sans équivoque qu'il considérait Shakyamuni et non Nichiren comme le Bouddha Atemporel. Dans son Hara dono gohenji il écrit :

 

"L'enseignement de Nichiren est celui qui atteste que si on abandonne le Bouddha Shakyamuni qui est le Seigneur et Maître originel (honshi) des êtres sensitifs du Triple monde et si on se lie au bouddha Amida et venère Amida, alors on devient une personne coupable des cinq forfaits, et on tombe en l'enfer avici. N'est-ce pas cela la vérité ? "

Dans la même lettre il dit que : "L'intention originelle de l'apparition de Nichiren dans ce monde, est de révéler Shakyamuni, Maître de Namu Myoho Renge Kyo".

Il est évident que Nikko lui-même vénérait le Bouddha Atemporel Shakyamuni du chapitre XVI du Sutra du Lotus, conformément aux enseignements de Nichiren. Cela ne signifie pas que Nichiren n'a pas enseigné la Véritable cause. Cela ne signifie pas non plus que Nichiren n'a pas atteint l'éveil par la récitation de Namu Myoho Renge Kyo. Cela signifie que Nikko, comme tous les autres bouddhistes nichireniens, à l'exception de la lignée du Taiseki-ji post-Nichiu, ont considéré Nichiren comme celui qui transmettait la Véritable cause de la bodhéité qu'il avait reçue du Bouddha Atemporel Shakyamuni qui ne forme qu'un avec le Dharma Merveilleux, Véritable cause et Véritable effet. Comme nous, Nichiren a vécu dans le rôle d'un bodhisattva, transmettant ses enseignements et sa pratique ; il était capable de se plonger dans le monde-état de la bodhéité et faire surgir l'éveil en récitant daimokuet/ou en le contemplant. Nichiren recherchait le Bouddha éternel et nous enseignait d'en faire autant.

Il semblerait que la lignée du Taiseki-ji ait été séduite de façon très intéressée par la rhétorique du Tendai médieval sur le concept de l'Éveil Atemporel (hongaku), qu'elle a utilisé pour glorifier la vie et les enseignements de Nichiren, surclassant les enseignements de Shakyamuni. En faisant cela, les responsables du Taiseki-ji ont coupé les enseignements et la pratique de Nichiren de ses bases, l'enseignement de Shakyamuni et son exemple. En proclamant que Nichiren était le Vrai Bouddha et qu'eux seuls le comprennaient, ils prétendaient qu'ils étaient non seulement supérieurs aux autres écoles bouddhistes mais également aux autres branches du bouddhisme de Nichren, et même supérieurs aux lignées Fuji comme le Kitayama Honmonji où pourtant Nikko avait passé 36 ans de sa vie. Leur prétention à être les seuls à pouvoir transmettre le Dharma à leur clergé, ainsi que leur affirmation de posséder le Dai-Gohonzon, servaient leur pouvoir et le prestige du Taiseki-ji qui en dehors de cela était un temple de campagne, relativement peu connu.

Mes remerciements à Senchu Murano, Jackie Stone, Bruce Maltz et Chris Holte pour toutes les informations qu'ils m'ont fournies.

SUITE : La Soka Gakkai : Makiguchi, Toda, Ikeda

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