On ne peut que s’interroger
sur cette double pratique de ce bodhisattva : guérisseur des
souffrances des autres par l’usage de la médecine et immolateur
de son propre corps par le feu. Bien sûr, on peut penser qu’il
s’agit de deux personnages différents mais cela n’explique
pas que dans le Sutra du Lotus, ce bodhisattva porte bel et
bien le nom de Yakuo*
bosatsu (Roi
des Remèdes) et qu’au chapitre XXVII
il est fait mention à la fois de lui et de son frère Yakujo
bosatsu (Supérieur
de Remèdes). Il est probable que cet aspect du bodhisattva a
contribué à limiter le culte populaire auquel ses capacités
de guérisseur devaient le vouer. Un autre personnage, Yakushi
nyorai (l’Ainsi-Venu Maître des Remèdes, Yaowang
rurlai, Baishajyaguru) qui présentait
une personnalité moins complexe s’avérait plus adéquat.
Quoi qu’il en soit on note plusieurs cas d’auto-immolation
par le feu de moines et de nonnes éminents en Chine entre le
cinquième et dixième siècle. Les manières
de procéder se rapportent clairement au Yakuo*
bosatsu (absorption
de substances inflammables et "emmailotage" avec des bandelettes
imprégnées). Néanmoins on décèle
aussi des éléments d’influence taoïque tels
que l’abstinence des cinq céréales ou l’absorption
de produits issus du pin (symbole de vie éternelle). Ces sacrifices
religieux inspirés finalement d’une lecture trop proche
du texte du chapitre XXIIIe du Lotus
se situent hors de la voie médiane qu’est le Dharma bouddhique.
Il ne s’agissait nullement d’actions de protestation politique
comme cela s’est pratiqué plus récemment.
Sur ces
sujets on se reportera aux travaux d’Erik Zürcher (Bouddhisme,
Christianisme et société chinoise, Julliard 1990)
ou aux conférences (en anglais) de James A. Benn (http://helios.unive.it/~pregadio/aas/benn.html)
qui associe ces pratiques à celles de l’auto-momification.