Ainsi ai-je entendu:
Une fois, le Bienheureux en voyageant dans le pays Kosala, avec un grand groupe de disciples, arriva dans une ville appelée Kesaputta. Les Kalamas, habitants de Kesaputta, apprirent que "le religieux Gautama, fils des Sakyas, ayant abandonné sa famille sakya et quitté son foyer pour entrer dans la vie religieuse, voyageant dans le pays Kosala, était parvenu à Kesaputta".
(1.2) Or, une bonne réputation se propageait à propos de ce Bienheureux Gautama: Il est le Bienheureux, l'Arahant, parfaitement et pleinement éveillé, parfait en sa sagesse et sa conduite, bien arrivé, le Connaisseur des mondes, l'incomparable Guide des êtres qui doivent être guidés, l'Instructeur des dieux et des humains, le Bouddha, le Bienheureux.
(1.3) Ayant connu lui-même ce monde-ci avec ses dieux, avec ses Mara(s) et ses Brahma(s), avec ses troupes de religieux et de brahmanes, ses êtres célestes et humains, il le fait connaître.
(1.4) Il enseigne la doctrine, bonne en son début, bonne en son milieu, bonne en sa fin, bonne dans sa lettre et dans son esprit, et il exalte la Conduite pure parfaitement pleine et parfaitement pure. Rencontrer un tel Arahant est vraiment une bonne chose."
(1.5) Les Kalamas, habitants de Kesaputta, rendirent alors visite au Bienheureux. En y arrivant, certains parmi eux rendirent hommage au Bienheureux et s'assirent à l'écart sur un côté. D'autres échangèrent avec lui des compliments de politesse et des paroles de courtoisie et s'assirent ensuite à l'écart sur un côté. Certains, les mains jointes, rendirent hommage dans la direction où se trouvait le Bienheureux, puis s'assirent à l'écart sur le coté. D'autres encore, ayant énoncé leurs noms et leurs noms de famille, s'assirent à l'écart sur un côté. D'autres s'assirent à l'écart sur un côté sans rien dire.
(1.6) S'étant assis ainsi à l'écart sur un côté, ils s'adressèrent au Bienheureux et dirent: "O vénérable Gautama, il y a des religieux et des brahmanes qui arrivent à Kesaputta. Ils exposent et exaltent seulement leur propre doctrine, mais ils condamnent et méprisent les doctrines des autres. Puis d'autres religieux et brahmanes arrivent aussi à Kesaputta. Eux aussi exposent et exaltent leur propre doctrine, et ils méprisent, critiquent et brisent les doctrines des autres. O Vénérable, il y a un doute, il y a une perplexité chez nous à propos de ces diverses opinions religieuses. Parmi ces religieux et ces brahmanes, qui dit la vérité et qui des mensonges?"
(1.7) Le Bienheureux s'adressa aux Kalamas et dit: Il est juste pour vous, ô Kalamas, d'avoir un doute et d'être dans la perplexité. Car le doute est né chez vous à propos d'une matière qui est douteuse.
(1.8) Venez, ô Kalamas, ne vous laissez pas guider par des rapports, ni par la tradition religieuse, ni par ce que vous avez entendu dire. Ne vous laissez par guider par l'autorité des textes religieux, ni par la simple logique ou les allégations, ni par les apparences, ni par la spéculation sur des opinions, ni par des vraisemblances probables, ni par la pensée que "ce religieux est notre maître spirituel".
(1.9) Cependant, ô Kalamas, lorsque vous savez vous-mêmes que certaines choses sont défavorables, que telles choses blâmables sont condamnées par les sages et que, lorsqu'on les met en pratique, ces choses conduisent au mal et au malheur, abandonnez-les.
(1.10) Maintenant, je vous demande: "Qu'en pensez-vous, ô Kalamas? Lorsque l'avidité apparaît chez quelqu'un, cette avidité apparaît-elle pour le bien de cet individu ou pour son mal ?"
(1.11) Les Kalamas répondirent: O Vénérable, l'avidité apparaît pour le mal de cet individu.
(1.12)O Kalamas, en se donnant à l'avidité, étant vaincu par l'avidité, étant enveloppé mentalement par l'avidité, un tel individu tue des êtres vivants, commet des vols, s'engage dans l'adultère et profère des paroles mensongères. Il pousse un autre à accomplir aussi de tels actes. De tels actes entraînent-ils son mal et son malheur pendant longtemps? Certainement, oui, ô Vénérable.
(1.13) Qu'en pensez-vous, ô Kalamas? Lorsque la haine apparaît chez quelqu'un, cette haine apparaît-elle pour le bien de cet individu ou pour le mal? O Vénérable, la haine apparaît pour le mal de cet individu.
(1.14) O Kalamas, en se donnant à la haine, étant vaincu par la haine, étant enveloppé mentalement par la haine, un tel individu tue des êtres vivants. Il pousse un autre à accomplir aussi de tels actes. De tels actes entraînent-ils son mal et son malheur pendant longtemps? Certainement oui, ô Vénérable.
(1.15) Qu'en pensez-vous, ô Kalamas? Lorsque l'illusion apparaît chez quelqu'un, cette illusion apparaît-elle pour le bien-être de cet individu ou pour son mal? O Vénérable, l'illusion apparaît pour le mal de cet individu.
(1.16) O Kalamas, en se donnant à l'illusion, étant vaincu par l'illusion, étant enveloppé mentalement par l'illusion, un tel individu tue des êtres vivants. Il pousse un autre à accomplir aussi de tels actes. De tels actes entraînent-ils son mal et son malheur pendant longtemps? Certainement oui, ô Vénérable.
(1.17) Maintenant, qu'en pensez-vous, ô Kalamas ? Ces choses sont-elles bonnes ou mauvaises? O Vénérable, ces choses sont mauvaises. Ces choses sont-elles blâmables ou louables? O Vénérable, ces choses sont blâmables. Est-ce que ces choses sont censurées ou pratiquées par les sages ? O Vénérable, ces choses sont censurées par les sages.
(1.18) Qu'en pensez-vous, ô Kalamas ? Lorsqu'on les met en pratique, ces choses conduisent-elles au mal et au malheur? Lorsqu'on les met en pratique, ô Vénérable, ces choses conduisent au mal et au malheur. C'est ce qui est généralement accepté. C'est ce que nous en pensons.
(1.19) Le Bienheureux dit: C'est pourquoi, ô Kalamas, nous avons déjà dit: Il est juste pour vous, ô Kalamas, d'avoir un doute et d'être dans la perplexité. Car le doute est né chez vous à propos d'une matière qui est douteuse.
(1.20) Venez, ô Kalamas, ne vous laissez pas guider par des rapports, ni par la tradition religieuse, ni par la pensée que "ce religieux est notre maître spirituel".
(1.21) Cependant, ô Kalamas, lorsque vous savez vous-mêmes que certaines choses sont défavorables, que telles choses blâmables sont condamnées par les sages et que, lorsqu'on les met en pratique, ces choses conduisent au mal et au malheur, abandonnez-les.
(1.22) Ensuite, le Bienheureux s'adressa à nouveau aux Kalamas et dit: Venez, ô Kalamas, ne vous laissez pas guider par des rapports, ni par la tradition religieuse, ni par la pensée que "ce religieux est notre maître spirituel".
(1.23) Cependant, ô Kalamas, lorsque vous savez vous-mêmes que certaines choses sont favorables, que ces choses louables sont pratiquées par les sages, que, lorsqu'on les met en pratique, elles conduisent au bien et au bonheur, pénétrez-vous de telles choses et pratiquez-les.
(1.24) Maintenant, je vous demande: "Qu'en pensez-vous, ô Kalamas ? Lorsque l'absence d'avidité apparaît chez un individu, cette absence d'avidité apparaît-elle pour le bien-être de cet individu ou pour son mal? " Les Kalamas répondirent: O vénérable, l'absence d'avidité apparaît pour le bien-être de cet individu.
(1.25) O Kalamas, ne se donnant pas à l'avidité, n'étant pas vaincu par l'avidité, n'étant pas enveloppé mentalement par l'avidité, un tel individu ne tue point d'êtres vivants, ne commet pas de vols, ne s'engage pas dans l'adultère, ne profère pas des paroles mensongères. Il pousse un autre aussi à s'abstenir de tels actes. Est-ce que cela entraîne son bonheur et son bien-être?
Certainement oui, ô Vénérable.
(1.26) Qu'en pensez-vous, ô Kalamas? Lorsque l'absence de haine apparaît chez un individu, cette absence de haine apparaît-elle pour le bien-être de cet individu, ou pour son mal?
O Vénérable, l'absence de haine apparaît pour son bien.
(1.27) O Kalamas, ne se donnant pas à la haine, n'étant pas vaincu par la haine, n'étant pas enveloppé mentalement par la haine, cet individu ne tue pas d'êtres vivants et ne profère pas des paroles mensongères. Il pousse un autre aussi à s’abstenir de tels actes. Est-ce que cela entraîne son bonheur et son bien-être ? Certainement oui, ô Vénérable.
(1.28) Qu'en pensez-vous, ô Kalamas? Lorsque l'absence d'illusion apparaît chez un individu, cette absence d'illusion apparaît-elle pour le bien-être de cet individu ou pour son mal?
O Vénérable, l'absence d'illusion apparaît pour son bien.
(1.29) O Kalamas, ne se donnant pas à l'illusion, n'étant pas vaincu par l'illusion, n'étant pas enveloppé mentalement par l'illusion, cet individu ne tue pas d'êtres vivants et ne profère pas des paroles mensongères. Il pousse un autre aussi à s'abstenir de tels actes. Est-ce que cela entraîne son bonheur et son bien-être ? Certainement oui, ô Vénérable.
(1.30) Maintenant, qu'en pensez-vous, ô Kalamas ? Ces choses sont-elles bonnes ou mauvaises? O Vénérable, ces choses sont bonnes. Ces choses sont-elles blâmables ou louables? O Vénérable, ces choses sont louables. Est-ce que ces choses sont censurées ou pratiquées par les sages ? O Vénérable, ces choses sont pratiquées par les sages.
(1.31) Qu'en pensez-vous, ô Kalamas? Lorsqu'on les met en pratique, ces choses conduisent-elles au bien-être et au bonheur, ou bien ne conduisent-elles pas au bien-être et au bonheur? Les Kalamas répondirent: Lorsqu'on les met en pratique, ces choses conduisent au bien-être et au bonheur. C'est ce qui est généralement accepté. C'est ce que nous en pensons.
(1.32) Le Bienheureux dit: C'est pourquoi, ô Kalamas, nous avons déjà dit: Il est juste pour vous, ô Kalamas, d'avoir un doute et d'être dans la perplexité. Car le doute est né chez vous à propos d'une matière qui est douteuse.
(1.33) Venez, ô Kalamas, ne vous laissez pas guider par des rapports, ni par la tradition religieuse, ni par la pensée que "ce religieux est notre maître spirituel".
(1.34) Cependant, ô Kalamas, lorsque vous savez vous-mêmes que certaines choses sont favorables, que ces choses louables sont pratiquées par les sages, que, lorsqu'on les met en pratique elles conduisent au bien et au bonheur, pénétrez-vous de telles choses et pratiquez-les.
(1.35) O Kalamas, le disciple noble, qui s'est ainsi séparé de l'avidité, de la haine, de l'illusion, ayant une compréhension claire et une attention de la pensée, demeure, faisant rayonner la pensée de bienveillance dans une direction, et de même dans une deuxième, dans une troisième, dans une quatrième, au-dessus, au-dessous, au travers, partout dans la totalité en tout lieu de l'univers, il demeure faisant rayonner la pensée de bienveillance, large, profonde, sans limites, sans haine et libérée de la malveillance.
(1.36) Egalement, le disciple noble demeure, faisant rayonner la pensée de compassion dans une direction, et de même dans une deuxième, dans une troisième, dans une quatrième, au-dessus, au-dessous, au travers, partout dans sa totalité en tout lieu de l'univers, il demeure faisant rayonner la pensée de compassion, large, profonde, sans limites, sans haine et libérée de la malveillance.
(1.37) Egalement, le disciple noble demeure, faisant rayonner la pensée de joie sympathique dans une direction, et de même dans une deuxième, dans une troisième, dans une quatrième, au-dessus, au-dessous, au travers, partout dans sa totalité en tout lieu de l'univers, il demeure faisant rayonner la pensée de joie sympathique, large profonde, sans limites, sans haine et libérée de la malveillance.
(1.38) Egalement, le disciple noble demeure, faisant rayonner la pensée d'équanimité dans une direction, et de même dans une deuxième, dans une troisième, dans une quatrième, au-dessus, au-dessous, au travers, partout dans sa totalité en tout lieu de l'univers, il demeure faisant rayonner la pensée d'équanimité, large, profonde, sans limites, sans haine et libérée de la malveillance.
(1.39) O Kalamas, le disciple noble, qui a une pensée ainsi libérée de la haine, de la malveillance, qui a une pensée non souillée et une pensée pure, est quelqu'un qui trouve les quatre soulagements, ici et maintenant, en pensant:
(1.40)" Supposons qu'il y ait, après la mort, des résultats pour les actes bons et mauvais. En ce cas, il est possible pour moi de naître après la dissolution du corps, après la mort, dans un des cieux où se trouvent des bonheurs célestes." Cela est le premier soulagement.
(1.41)"Supposons qu'il n'y ait pas, après la mort, de résultats pour les actes bons et mauvais. Tout de même, ici et maintenant, dans cette vie, je demeure sain et sauf avec une pensée heureuse, libérée de la haine, de la malveillance." Cela est le deuxième soulagement.
(1.42)"Supposons que des mauvais résultats tombent sur l'individu qui a accompli des mauvaises actions. Quant à moi, je ne souhaite aucun mal à personne. Alors comment se pourrait-il qu'un mauvais résultat tombe sur moi qui ne fais aucune action mauvaise? " Cela est le troisième soulagement.
(1.43)"Supposons que des mauvais résultats ne tombent pas sur l'individu qui fait des actions mauvaises. Alors dans ces deux cas, je trouve que je suis pur." Cela est le quatrième soulagement.
(1.44)O Kalamas, le disciple noble, qui a une pensée libérée de la haine, de la malveillance, qui a une telle pensée non souillée, une pensée pure, est quelqu'un qui a ces quatre soulagements, ici et maintenant.
(1.45)Les Kalamas dirent: "Cela est exact, ô Bienheureux, cela est exact, ô Parfait. Le disciple des êtres nobles, qui a une pensée libérée de la haine, de la malveillance, qui a une telle pensée non souillée, une pensée pure, est quelqu'un qui a ces quatre soulagements, ici et maintenant"
(1.46) Ayant entendu la parole du Bienheureux, les Kalamas s'écrièrent: Merveilleux, ô Bienheureux, merveilleux. C'est comme si l'on redressait ce qui a été renversé, ou découvrait ce qui a été caché, ou montrait le chemin à celui qui s'est égaré, ou apportait une lampe dans l'obscurité pour que ceux qui ont des yeux puissent voir. Ainsi, le vénérable Gautama a rendu claire la vérité de nombreuses façons.
(1.47)Nous prenons refuge dans le vénérable Gautama, dans l'Enseignement (dharma), dans la Communauté (saiigha). Que le vénérable Gautama veuille bien nous accepter comme disciples laïcs jusqu'à la fin de nos vies."
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